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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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eu de Premier ministre. » Pourtant, à Matignon, tout le monde s’y est mis – Marie-France Garaud et autres – pour demander à Bignon de retirer son amendement.
    Mercredi matin, au Conseil des ministres, Jacques Chirac ne dit pas un mot, me fait savoir Françoise Giroud. « En fait, me confie-t-elle, c’est sa présence au gouvernement qu’il est en train de jouer. Il fait la gueule : coordonnez sans moi », fait-il comprendre à Giscard.
    D’Yves Guéna, sur le coup de midi, cette phrase engageante : « Il faut sauter les obstacles les uns après les autres. » Ce qui montre que l’UDR a envie, comme Guichard, d’arriver à un compromis, fût-il « merdeux ».
    Je rencontre ce mercredi à 15 heures Claude Labbé dans les couloirs de l’Assemblée. Il me répète que tout peut arriver, qu’il ne répond de rien. Après un début de discussion dans l’hémicycle, le gouvernement prend la décision de réserver l’article 1 tout entier. Cela tourne à la pantalonnade.
    Rendez-vous avec Tomasini à 18 heures. Beaucoup de choses, me dit-il, nourrissent la grogne de l’UDR : la déclaration de Lecanuet, le 23 mai dernier, à Rennes 31 , qui démontre la volonté des giscardiens d’isoler l’UDR ; l’article du général Méry sur la Défense et l’OTAN, dans lequel le président de la République ne voit que du bon sens au moment où Pierre Messmer mobilise contre elle le ban et l’arrière-ban des gaullistes historiques ; l’absence de volonté globale, comme dit Michel Debré, de lutte contre l’inflation ; enfin, dernier élément qui n’est pas le moindre, l’intronisation de Jean-Jacques Servan-Schreiber comme porte-parole de la majorité réformatrice.
    « L’UDR a le sentiment que Giscard laisse faire. Face à cela, Jacques Chirac a deux préoccupations : d’abord, coller à Giscard etfaire en sorte que les lignes de forces de Giscard ne divergent pas trop de celles de De Gaulle et de Pompidou ; ensuite, préserver l’unité du groupe sur les plus-values. En l’état actuel, c’est loin d’être gagné : si on n’impose pas la discipline de vote, le groupe se divisera en quatre, un quart s’abstenant, un quart votant pour, un quart contre, et un quart ne participant pas au vote. Ce qui serait une catastrophe.
    « En désespoir de cause, on pourra utiliser la procédure de l’article 49 alinéa 3 : le gouvernement engagerait sa responsabilité sur le texte, qui serait considéré comme adopté, sauf si une motion de censure est déposée et votée. »
    Pour finir la journée, Edgar et Lucie Faure tentent une sorte de médiation : ils invitent Chirac et Ponia à l’hôtel de Lassay.
    Quand Chirac arrive, visage bronzé par le soleil de Brégançon, il tombe sur une grappe de journalistes assoiffés d’informations.
    « A-t-il fait beau à Brégançon ? lui demande-t-on.
    – Oui, dit Chirac, sauf un petit moment à mon arrivée. J’en ai profité pour faire une énorme sieste, j’adore ça.
    – Vous n’avez pas parlé des plus-values ?
    – Pratiquement pas, je vous l’assure. Ceux qui me connaissent savent que je ne mens jamais. Par omission, peut-être, mais pas autrement. »
    Il s’interrompt quelques instants et reprend, offensif : « Ce débat a d’ailleurs dérapé sur le plan politique par suite de déclarations intempestives. La déclaration de Lecanuet à Rennes est par exemple un manquement élémentaire à la coordination. Personne ne m’a prévenu, je n’ai appris qu’après que beaucoup de gens étaient au courant. Mais pas moi. C’est vrai : il n’y a aucune coordination dans le discours de Rennes ! »
    Il continue, volontairement plus calme, ayant dit ce qu’il avait à dire : « Aujourd’hui, ce débat sur les plus-values a donc retrouvé le terrain technique. Par conséquent, la loi sera votée sans problème et le groupe UDR ne se divisera pas.
    – Donc, pas de problème ?
    – Soyez tranquilles, d’une façon ou d’une autre, les choses s’arrangeront ! » nous assure Chirac.
    Il entre chez Edgar et Lucie Faure, y reste une heure et prend congé : il n’a pas adressé la parole, si ce n’est pour lui dire bonjour, à Ponia, qui d’ailleurs n’a pas été plus bavard avec lui.

    Rendez-vous avec Marie-France Garaud aujourd’hui, ce matin. « Les républicains indépendants ont un comportement de femelle, me dit-elle bizarrement d’entrée de jeu : ils entendent que tout procède

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