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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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débrouille pour communiquer son indignation aux Français qui l’écoutent. Et qui, au surplus, le jugent sympathique.
    François Mitterrand a lui aussi décidé de reprendre un tour de France des vingt-cinq plus grandes villes françaises.

    Je ne parle pas, ou peu, de l’affaire Markovic dans ce cahier parce que l’enquête marque le pas. Je ne m’y intéresse que par ses conséquences politiques. J’ai été une des premières, par hasard, à savoir comment Georges Pompidou avait appris qu’il était, ainsi que sa femme, la cible de rumeurs. Rome et Genève l’avaient fait oublier. Et puis, brutalement, début mars, les rumeurs sont reparties avec l’annonce, par une dépêche de l’AFP, que les avocats de Marcantoni demandaient l’audition de Georges et de Claude Pompidou. Coup politique monté par mon vieil ami Capitant, ministre de la Justice ? Ou suite naturelle de l’enquête ? Pompidou a d’emblée contre-attaqué par un autre communiqué où il affirmait ignorer tout de ce fait divers crapuleux. Le Général l’a aussitôt reçu à dîner avec sa femme, et les rumeurs à l’heure où j’écris, fin mars, se sont apaisées.

    9 avril
    La campagne officielle à la télévision est l’occasion d’un nouvel accrochage entre l’état-major de Mitterrand et celui du Parti socialiste. Sans consulter qui que ce soit à gauche, la SFIO s’est attribuée à elle seule le temps de parole réservé à tout le groupe de la Fédération de la gauche. Guy Mollet et Gaston Defferre parleront, pas Mitterrand.
    Mauroy aussi est privé de télévision. Je doute que les relations entre Guy Mollet et lui soient au beau fixe. Aujourd’hui, j’avais rendez-vous cité Malesherbes avec lui pour qu’il me parle du futur congrès constitutif du nouveau Parti socialiste qui doit toujours avoir lieu les 9 et 10 mai à Alfortville. Lorsque j’arrive, Pierre Mauroy me dit qu’il vaut mieux aller au bistrot d’à côté, que nous y serons mieux pour parler. Je comprends qu’il préfère ne pas s’exposer à rencontrer Guy Mollet en compagnie d’une journaliste.
    Nous voici donc au café proche du siège de la SFIO, presque comme deux comploteurs. Nous choisissons une table dans un coin, sans remarquer que, derrière le pan de mur, se trouvent... Guy Mollet et Ernest Cazelles, sur qui nous tombons nez à nez ! Tout le monde se salue sans enthousiasme. Mauroy est pris la main dans le sac, en train – c’est sûrement en ces termes que Guy Mollet résume les choses – de brader les secrets de la SFIO.
    D’ailleurs, sitôt Guy Mollet et son complice partis, Mauroy me confirme que ce dernier le soupçonne de s’entendre trop bien avec François Mitterrand et les conventionnels, qu’il lui arrive même de parler à son propos de « trahison ». Il paraît qu’il l’a fait récemment, dans le bureau qu’il occupe et où il l’avait convoqué, lui, Mauroy : tout le monde a pu entendre les éclats d’une engueulade entre les deux hommes. Ce qui est étonnant, c’est que Guy Mollet lui-même considérait il y a peu Mauroy comme son dauphin, puisque c’est à lui qu’il a laissé la place de secrétaire général adjoint.
    À quelques jours du congrès constitutif du nouveau parti, et surtout du référendum, tout cela est lamentable. Ce climat remet-il en cause le fait que Mauroy soit désigné, à l’issue du futur congrès, comme le premier secrétaire du nouveau Parti socialiste ? Sans doute pas.
    Une « répudiation » serait tout de même très étonnante, étant donné les liens qui unissent depuis si longtemps Mollet et Pierre Mauroy.
    À moins que Guy Mollet ne puisse pas supporter que quelqu’un d’autre prenne sa place ?

    10 avril
    De Gaulle a été interviewé aujourd’hui par Michel Droit. L’entretien s’est passé dans le bureau du Général, à l’Élysée, au premier étage, dans, paraît-il, le décor d’origine exécuté pour l’impératrice Eugénie en 1861. Il partira donc si les Français votent non 11 .
    C’est là, évidemment, qu’on peut se poser des questions sur Pompidou. Le fait qu’il se soit porté candidat à la présidence de la République change les choses : les Français de droite risquent bien depréférer demain un Pompidou plein d’allant à un de Gaulle aujourd’hui vieillissant. Auront-ils toujours peur du départ du Général s’ils sont sûrs que Pompidou sera là pour occuper la place ? Le « chantage » du Général aura-t-il le

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