Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997
préférable.
21 avril
Inattendue, cette prise de position de Rocard sur Maastricht : « Les accords sont très imparfaits. »
22 avril
Apparemment, pas de vagues sur la consultation Maastricht. Le Conseil constitutionnel a donné son avis à toute allure. Le Conseil d’État n’a pas vu d’obstacle au projet de loi gouvernemental ; le Conseil des ministres l’a adopté ce matin et Pierre Bérégovoy a confirmé tout à l’heure à l’Assemblée la voie choisie.
23 avril
Petit déjeuner avec Roland Dumas. C’est donc le grand déploiement sur Maastricht. Trois ministres suivront l’affaire en permanence : Michel Vauzelle, pour les aspects juridiques, Élisabeth Guigou et lui, pour les aspects politiques. La concertation a commencé : Roland Dumas a vu Édouard Balladur et s’est rendu hier chez VGE, rue de Bénouville.
Avec Giscard, me dit-il, l’accord est presque complet, à ceci près qu’il semble estimer que le Sénat élaborera une contre-proposition au texte gouvernemental sur la révision constitutionnelle.
Quant à Balladur, il se serait montré plus souple, plus diplomate que Jacques Chirac – ce qui n’est pas une prouesse. Dumas parle d’ailleurs des contacts que Balladur lui a dit avoir sur le sujet avec les centristes.
Je demande à Roland Dumas si Giscard lui a parlé de JacquesChirac. Dumas refuse de me répondre pour, dit-il, ne pas jeter de l’huile sur le feu entre eux deux. Ce qui, en soi, est une réponse ! Je crois comprendre néanmoins que Giscard a parlé de la rapidité avec laquelle Chirac, l’autre jour, a évoqué la nécessité d’un référendum sur un sujet aussi grave, et de la non moins grande vélocité avec laquelle il y a partiellement renoncé.
Le calendrier et la tactique, Bérégovoy les a révélés au JT : premier passage à l’Assemblée nationale début mai ; au Sénat, début juin. C’est à ce moment-là qu’on verra si le texte peut être adopté à la majorité des 3/5. S’il s’avérait que c’était impossible, le gouvernement choisirait la voie du référendum. Quand cela ? Avant l’été ? Difficile.
29 avril
La discussion sur Maastricht a commencé. Devant les 73 députés de la commission des lois d’abord, hier mardi.
Transfert de compétences ou transfert de souveraineté ? Y a-t-il ou non subsidiarité des pouvoirs ? Le débat porte sur le fond, avec des clivages qui dépassent tous les partis : il y a des pro-Maastricht forcenés dans l’opposition, des anti-Maastricht au RPR, des pro-Maastricht tièdes chez les centristes.
Au-delà des discussions en commission, les dés sont jetés : Mitterrand et le gouvernement mènent le jeu.
Chirac, en tout cas, a dit oui à Maastricht. Un oui sans enthousiasme, un oui quand même ! Il m’avait déjà à peu près tenu ce discours avant les élections : Maastricht ne fait pas peur (« c’est une plaisanterie »), ce n’est pas la grande affaire dont parle Mitterrand, pas la peine de faire des vagues.
À côté de lui, Philippe Séguin, lui, ne recule pas d’un poil : il est contre le traité de Maastricht depuis sa signature, et il le demeure.
Manifestement, Chirac sacrifie tout à l’union de l’opposition. Il ne rompra pas sur ce sujet avec Giscard et les centristes. Comme Mitterrand, en son temps, avait agi vis-à-vis des communistes...
Débat mardi.
30 avril
Alors, l’effet Bérégovoy ?
Après l’erreur du premier débat à l’Assemblée, le nouveau Premier ministre, contrairement à Édith Cresson, fait preuve d’un sens aigu de la communication. Un bon personnage, et ce que j’appellerais un « immobilisme nuancé ». Claude Estier, qui ne passe pas pour critique à l’égard de tout gouvernement socialiste, a cette formule dans Libération : « Bérégovoy pense que toute réforme qui peut aujourd’hui susciter la controverse est plutôt malvenue. »
Tout un programme !
2 mai
Hier, François Mitterrand a parlé une nouvelle fois aux Français à l’occasion du 1 er mai. Idéal pour s’adresser à sa majorité, à ce fameux « peuple de gauche », comme s’il y avait entre Pierre Bérégovoy et lui une sorte de répartition des rôles, ou plutôt des cibles politiques.
Après les débuts que l’on sait au Parlement, Pierre Bérégovoy a remonté le courant. Il bénéficie néanmoins aujourd’hui, d’après les sondages, d’un mini-état de grâce. Il rassure les Français, il cajole les patrons, il
Weitere Kostenlose Bücher