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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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s’est engagé lorsqu’il était dans un creux abyssal, se retrouve en tête aujourd’hui.
    « Ils ont commis l’erreur de croire que les ralliements allaient leur apporter des voix. Au contraire, plus la classe politique allait du côté du manche, plus Balladur perdait des voix ! Nous leur avons mis dans les pattes la querelle sur les élites, sur les technostructures, sur l’immobilisme. C’est la revanche des professionnels sur les amateurs ! »
    8 mars au soir
    Anecdotes glanées dans un dîner.
    Le ministre dont on dit qu’il serait allé faire des ronds de jambe à Chirac, c’est François Bayrou. Source sûre...
    Pierre Rosanvallon me raconte l’audition de Jacques Chirac au clubSaint-Simon, audition encore plus amusante que ce qu’on m’en avait rapporté. Il ne s’est adressé, au milieu de tous les intellectuels et politiques présents, qu’à Alain Minc, sur un ton volontairement populaire, l’appelant quasiment Môsieur Minc : « Le postier de Garges-lès-Gonesse, vous ne savez pas où c’est, vous, Môsieur Minc, Garges-lès-Gonesse ? » Et le reste à l’avenant.
    9 mars
    Balladur s’est déplacé aujourd’hui dans la Sarthe. Première étape de son voyage : la visite d’une association de réinsertion professionnelle. Il y a là une vingtaine de personnes, pour la plupart au SMIC, qui retapent des réfrigérateurs endommagés pour apprendre le métier de réparateur en électroménager.
    Lorsqu’Édouard Balladur arrive en tenue de campagne, Barbour vert et cravate en maille, le sénateur Jacques Chaumont et François Fillon 11 l’entraînent serrer la main d’une petite dame sur le pas de sa maison. Il s’y prête de bonne grâce, sans montrer un goût immodéré pour ces effusions forcées. Puis il écoute de longues minutes le président de l’association parler de ses activités. Il s’ennuie modérément, pose des questions de bon ton, sans en faire trop. Il quitte les réfrigérateurs pour passer au rayon cuisinières. Ballets de caméras derrière les appareils ménagers. Balladur a quelques mots bien venus pour parler de deuxième chance et de la société du gaspillage. Tout le monde applaudit.
    Arrivée au musée de l’Automobile cher au cœur de François Fillon, amateur de formule 1, et, bien sûr, du circuit voisin des Vingt-Quatre heures du Mans. Déjeuner au Technoparc après quelques phrases de bienvenue de Fillon, maître des lieux.
    À table, je suis assise à côté de Roland du Luart 12 , qui me raconte comment il s’efforce depuis plusieurs mois de diviser l’UDF pour qu’aucun candidat autre que Balladur ne puisse en émerger, pour que l’UDF renonce à présenter un candidat, et donc qu’elle se range peu ou prou derrière Balladur. Symétriquement, nous parlons de l’échec de la stratégie de Sarkozy qui a été – qui est toujours – dans l’incapacité de faire éclater le RPR et de briser la résistance, qu’il a sous-estimée, de Jacques Chirac.
    Le ralliement de Charles Millon à Chirac choque profondément l’autre député UDF de la Sarthe, Pierre Hellier : il m’assure que Millon doit démissionner de la présidence du groupe UDF. « Autrement, menace-t-il, les députés qui soutiennent dès maintenant Balladur finiront par créer leur propre groupe, autonome, à l’Assemblée. » Intéressant : j’étais sûre que Balladur trouverait l’essentiel de ses supporters à l’intérieur de l’UDF, qu’il en entraînerait derrière lui un maximum, comme l’avaient laissé penser les premiers ralliements, ceux de Léotard et de Simone Veil ; je ne pensais pas qu’il y aurait une telle division, grosso modo entre une partie des jeunes Républicains indépendants, gagnés à la cause de Balladur, et Giscard, Charette et Millon, qui lui sont hostiles.
    Pendant le déjeuner, le Premier ministre vient s’asseoir quelques instants près de moi : il plaisante sur les voitures de sport, qu’il n’aime pas vraiment, et sur le sport, qu’il aime encore moins. Nous parlons ensemble de sa campagne : « J’ai toujours su que ce serait dur, me dit-il. Rappelez-vous : de Gaulle, en 1965, est descendu à 35 % dans les sondages. Georges Pompidou a dû faire campagne, en 1969, pour remonter l’avance prise par Alain Poher. »
    Je lui demande si, à son sens, il est plus facile de commencer sa campagne en dernier que le contraire. « Oui, sûrement, répond-il avec humour, encore que je n’en sache rien. J’en suis

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