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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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lorsqu’il avait fini par accepter de lui parler, sur les coups de 2 ou 3 heures du matin dans son bunker : elle était accueillie par la garde rapprochée du leader palestinien, toujours vigilant, toujours armé jusqu’aux dents, même au beau milieu de la nuit. Il lui a plusieurs fois parlé des heures durant, souvent sans que cela débouche sur une interview en bonne et due forme. Cette fois, elle a touché le gros lot : il a accepté ce soir de répondre aux questions de Patrick Poivre d’Arvor, tandis qu’elle, Catherine Gentile, se tenait à l’IMA aux côtés de Yasser Arafat.
    Le résultat a été une des interviews les plus retentissantes qu’Arafat ait jamais accordées à la presse française et, je pense, internationale. Interrogé sur sa position à lui, Arafat, sur la charte de l’OLP 15 , plus précisément sur la suppression de l’État d’Israël, il répond en français, lui qui s’exprime volontairement en arabe depuis qu’il est ici, avec un air de faire une bonne grosse blague, par cette petite phrase : « C’est caduc. » « Ça veut dire que vous l’oubliez ? » insiste PPDA. Je n’ai pas à l’oublier, répond en substance Arafat, j’ai toujours proposé de trouver une solution à deux États. Ce qui veut dire que son programme politique n’a jamais été d’envisager de supprimer Israël.
    Inouï, quand on y pense : il emploie un mot que peu de Français ont eu l’occasion d’entendre prononcer dans leur vie, et il l’emploie pour renoncer publiquement au pan le plus important de la charte de l’OLP : la destruction annoncée d’Israël !
    Lorsque j’entends la première affirmation d’Arafat, j’en crois à peine mes oreilles. Patrick de même, qui, en fin d’interview, revient sur l’éradication de ce passage de la charte. Yasser Arafat répète alors une deuxième fois le mot caduc , affirme sa volonté de voir coexister des musulmans, des chrétiens et des Juifs sur une terre de paix.
    « L’appel palestinien trouvera-t-il des hommes courageux en Israël ? » se demande-t-il. Comment les Israéliens pourraient-ils vous faire confiance ? insiste en direct l’écrivain Marek Halter, invité par TF1. « Mon ami, mon très cher ami, lui répond Arafat dans un sursaut d’amabilité. Comme je l’ai dit, la charte est devenue caduque. Nous donnerons toutes les garanties pour dissiper ces peurs et ces appréhensions... Si on veut la paix, tendons-nous la main. »
    Marek Halter approuve – de loin.
    C’en est véritablement bouleversant. J’ai l’impression d’assister en direct à un de ces formidables événements par lesquels, sans craindre les grands mots, la face du monde peut être changée. À cause de pareils moments, la télévision est vraiment unique : rien, aucun papier de quotidien, aucune analyse d’hebdomadaire ne saurait communiquer pareille émotion, donner autant l’impression de changer l’Histoire.

    20 mai
    Jean Poperen réunit les affiliés de son « courant » à la Sorbonne. L’ancien communiste qu’il a été a tenu à ne pas adhérer directement au Parti socialiste, mais à animer, depuis maintenant près de vingt ans, un carré de fidèles. Du PC il a gardé un certain ton, un certain air de « dignitaire ». Du socialiste qu’il est devenu il a pris une certaine bonhomie, de la rondeur, de la chaleur. Il est ministre des Relations avec le Parlement et aussi, d’une certaine façon, pour quelques journalistes, ministre des Relations avec la presse...
    Je ne suis pas certaine qu’il aime Mitterrand, même si, venant du PSU, il a été un des premiers militants de la « gauche des clubs » à adhérer à la Fédération de la gauche démocratique et socialiste. Il affiche une grande liberté vis-à-vis du Président : il ne le dit pas expressément, mais je vois, lorsqu’il parle de la gauche et de ses propres convictions, qu’il doute un brin de celles de Mitterrand. Il a derrière lui un passé de résistant, de militant, de chef de courant : il s’est rallié à Mitterrand sans l’aimer, parce que cela lui a paru la seulevoie. Il garde un œil de lynx sur les faiblesses des uns, les courtisaneries des autres. Et il a la langue bien pendue. Mais pas de confidences aujourd’hui : l’amphithéâtre de la Sorbonne ne s’y prête guère.

    29 mai
    Rencontre avec Jean-Noël Jeanneney qui me parle des fêtes du Bicentenaire, notamment de celle du 14 Juillet. Un défilé grandiose est prévu

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