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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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passe le papier à Carreyrou qui est en train de poser les premières questions à Simone Veil, et qui, du coup, oriente son interview de manière différente, moins affirmative, du genre : à l’heure qu’il est, compte tenu des chiffres qui nous parviennent, on ne saurait parler de réussite ni d’échec – toutes phrases que nous employons dans des cas semblables... En écoutant Carreyrou, ayant au surplus suivi à distance, non sans stupeur, le manège préalable d’Étienne, Simone Veil comprend sur-le-champ ce qui se passe et attend, dans la dignité, d’en savoir un peu plus long sur ses résultats.
    En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, elle est passée de 15 à 8,4 %, de la demi-victoire au semi-échec : elle le prend, je dois le dire, avec un calme olympien, à sa manière. C’est nous qui sommes plus embarrassés qu’elle.
    Le reste de la soirée, qui a si mal commencé, se déroule sans grande surprise 16 . Tout le monde est content : Giscard d’arriver en premier, ce qui lui redonne existence et légitimité ; Fabius démontre que le Parti socialiste, derrière lui, est un peu au-dessus de la moyenne des scores obtenus par son parti à des européennes : petite revanche par rapport au poste de premier secrétaire qu’il n’a pas obtenu.
    Le plus frappant est le nombre d’abstentions. À mon avis, les Français en ont marre de voter. Ils ont été convoqués neuf fois en l’espace de treize mois. Ils doivent prendre cela comme une incitation à aller pêcher à la ligne.

    24 juin
    Tonnerre dans le ciel de l’opposition : le groupe des « rénovateurs », qui a repris du poil de la bête après les européennes, s’est réuni à Lyon aujourd’hui.
    Je reprends le récit là où je l’avais abandonné après les journées parlementaires de Nice. S’ils avaient déjà rué dans les brancards, si Dominique Baudis avait même été, devant les caméras du journal télévisé, jusqu’à demander à Giscard de laisser la place aux jeunes, ils n’avaient finalement pas osé prendre la décision de rompre avec les partis de l’opposition en faisant liste séparée pour les européennes. Passé le scrutin du 18 juin, Michel Noir et François Bayrou – ce dernier a été le directeur de campagne de Simone Veil – ont décidé de rassembler douze députés issus du RPR et de l’UDF dans l’espoir de secouer le cocotier, d’ébranler l’hégémonie au sein de la droite française, depuis des années, de Chirac et Giscard.
    Avec Michel Noir qui avait déjà pris ses marques, voici quelques mois, aux journées parlementaires, et qui vient d’être élu maire de Lyon, il y a Philippe Séguin, qui semble avoir intellectuellement et politiquement le plus grand poids, bien qu’il paraisse plus hésitant sur la ligne à suivre que les autres quadras, Alain Carignon, maire de Grenoble, Michel Barnier, plus jeune président de conseil général de France, Étienne Pinte, maire adjoint de Versailles, et François Fillon, élu en 1981 député de la Sarthe et, du même coup, benjamin de l’Assemblée nationale. Derrière François Bayrou, il y a Bernard Bosson, maire d’Annecy (dont Chevènement disait en rigolant : « Bosson, c’est tout un programme ! ») et surtout Dominique Baudis, tout juste réélu maire de Toulouse. Et puis il y a encore, si ma mémoire n’est pas défaillante, Philippe de Villiers et deux autres dont j’ai oublié les noms 17 .
    Parmi les jeunes qui ne les ont pas suivis, il y a Nicolas Sarkozy, chiraquien inconditionnel, de surcroît secrétaire général adjoint du RPR, Alain Juppé, Jacques Toubon. François Léotard, un peu plus âgé que ceux-là, a été tenté, paraît-il, puis a renoncé. Mais sans doute n’est-il pas prêt à laisser quelqu’un d’autre que lui mener une telle aventure 18 .
    Le trait commun à tous ceux qui participent aujourd’hui à la réunion de Lyon est qu’ils jugent le moment venu de se débarrasser des « vieux », c’est-à-dire crûment de Giscard et de Chirac qui tiennent le devant de la scène depuis plus de vingt ans pour l’un, plus de quinze ans pour l’autre. Au fond, c’est ce qui leur tient lieu de lignepolitique. Et aussi cette certitude – celle de trois ou quatre d’entre eux au moins – qu’ils feraient de meilleurs présidents de la République que Giscard, non réélu en 1981, et que Chirac, battu pour la deuxième fois en 1988.
    Pas beaucoup de tendresse pour leurs

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