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Camarades de front

Camarades de front

Titel: Camarades de front Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sven Hassel
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enfourna dans sa bouche un morceau de gâteau et commença à feindre un combat de boxe contre d’imaginaires adversaires.
    – Pas d’énergie inutile ici ! cria Petit-Frère d’une voix de stentor. Ramasse tes sous et va chercher de la bière sinon on t’en donnera de la boxe fantôme !
    Un bon coup de poing fit atterrir le sapeur sur le lit du Schleswigois Thomas Jensen. Il se releva et alla s’asseoir sur un autre lit. Thomas ne se mêlait jamais de rien. On murmurait qu’il avait été volontaire en 1939 et lui-même ne disait ni oui ni non. Mais qu’il eût le mal du pays, tout le monde pouvait s’en rendre compte. Volontaire ou non, il n’en pouvait plus de la guerre et on disait aussi qu’il s’était amoché le bras lui-même, échappant d’un cheveu au conseil de guerre. Thomas la bouclait comme une huître dès que quelqu’un se montrait un peu curieux. Le légionnaire avait ordonné à Petit-Frère de tirer les vers du nez à l’infirmière-major, laquelle savait tout de Thomas, mais le pauvre idiot avait tout gâché en débitant son histoire d’un trait. L’infirmière Emma regarda Petit-Frère en réfléchissant, puis hocha la tête, à la suite de quoi ils s’étaient couchés tous les deux. Mais un peu plus tard, Emma était allée trouver le légionnaire qui dormait du sommeil du juste et l’avait jeté à bas de son lit d’une poigne irrésistible.
    – Serpent marocain ! Inciter Petit-Frère à espionner ! Tu es un beau salaud. Puis elle avait caressé la joue de Petit-Frère et était sortie tandis que le géant lui envoyait des baisers.
    – Tu es le plus grand imbécile que la terre ait jamais porté ! s’était écrié le légionnaire furieux.
    Petit-Frère sourit, tout heureux.
    – Je suis bête, nomade, je le sais bien. J’ai mal tourné ma phrase, mais tu vois, je ne peux pas mentir.
    – En effet, renonça le légionnaire.
    – Tu ne viens pas avec nous, Georg, tirer un bon coup ? disait Bauer à Georg en le regardant fixement. A vingt ans, c’est l’âge.
    – Merci, très peu pour moi. Je suis les conseils du Dr Gœbbels aux jeunes soldats. Se tenir loin de l’alcool, du tabac et des femmes.
    Bauer commença à se curer les dents avec le couteau sibérien.
    – Très juste. Toutes les femmes sont des démons, elles vous foutent la vérole et le reste. Ce serait mieux de les liquider toutes, pas vrai ? – Il éclata de rire et fit un mouvement significatif de la pointe de son couteau. – Tailler dedans avec un engin comme ça ! – Il se remit à rire.
    Georg s’arrêta brusquement de manger son gâteau et resta la bouche ouverte devant Bauer qui ricanait et balançait le couteau au-dessus de sa tête.
    – Pourquoi dis-tu ça ? demanda-t-il tranquillement.
    Bauer le dévisagea : – Les femmes sont des ordures, c’est pas ton avis ?
    – Je ne comprends pas, fit Georg, je ne t’ai jamais vu comme ça. – Il posa son gâteau sur la table et arpenta nerveusement la chambre. – Je n’ai rien contre les femmes, celles que je connais sont toutes gentilles avec moi. Ma mère était gentille ; c’était si merveilleux quand elle venait me dire bonsoir avant que je m’endorme quand j’étais petit. Maintenant elle est morte… brûlée par le phosphore. Je pense qu’elle est au ciel.
    – Dieu sait où elle est, dit brutalement Bauer. – Il ne riait plus mais il jeta un coup d’œil vers le légionnaire lequel jouait toujours aux dés, l’air indifférent. – N’as-tu jamais couché avec une femme ? reprit Bauer en se penchant pour observer le jeune soldat.
    Stein, très nerveux, se mit à siffler. Il sentait comme nous tous que Bauer allait trop vite.
    – Non ! s’écria Georg. Je hais tout ça ! Tu comprends à la fin ! Je hais ça… vous êtes des animaux, des bêtes immondes quand vous pensez aux femmes ! Et quand les femmes ont envie de la même chose que vous, alors elles sont les instruments de Satan !
    Bauer recula, effrayé, devant le regard de Georg ; on y lisait la folie. Le jeune soldat se prit les cheveux à poignées comme s’il voulait les arracher puis il tomba sur son lit, enfouit son visage dans ses mains et se mit à sangloter.
    Dans la salle se fit un silence pesant. Tous regardaient atterrés le jeune soldat, mais, de nous quinze, cinq seulement comprenaient ce qui se passait. Petit-Frère se leva, remonta son pantalon et se dirigea vers Georg, mais, telle une panthère, le légionnaire bondit,

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