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Camarades de front

Camarades de front

Titel: Camarades de front Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sven Hassel
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de Tante Dora. Elle remuait les lèvres en lisant : « Avis aux déserteurs et aux lâches ! – -Je demande au peuple allemand et surtout aux femmes d’avoir à l’œil ces lâches qui essaient de se cacher dans les colonnes de réfugiés pour passer de l’Est à l’Ouest. Aucune pitié pour ces misérables déserteurs ! Vous, fières femmes allemandes nationales-socialistes, dénoncez-les impitoyablement, qu’il s’agisse d’étrangers, ou de vos maris, fils et frères. Il n’y a pas de place pour eux dans notre grande Allemagne nationale-socialiste ! Signé : Heinrich Himmler. »
    Tante Dora hocha la tête :
    – Quel monstre ! Mais attends un peu qu’on lui coupe enfin ce qui dépasse !
    – Et à nous aussi, dit sèchement le légionnaire, si nous faisions les imbéciles. La seule chance de survivre-à cette folie est de suivre le mouvement… en silence. Se défiler là où c’est possible. – Il lui prit le menton. – Et se débrouiller pour avoir dans la poche de bons papiers imperméables à l’examen le plus minutieux. – Il montra du doigt un grand feldwebel qui ressemblait à un hippopotame : – Regarde celui-là avec sa gueule de pleine lune, ça le démange de pincer un déserteur et de le pendre avec une pancarte sur la poitrine. Tu pleures, ma vieille Dora ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Dora, ne pleure pas ! – Il essuya gauchement les larmes qui coulaient sur le fard.
    – Tu es bête, tu es bête, sanglotait la grosse femme en cachant son visage sur l’épaule du légionnaire. Je t’écrirai, Alfred, toutes les semaines…
    Elle caressa la joue balafrée en regardant la locomotive qui crachait sa vapeur en gros nuages blancs et elle pensa r – On dirait un fauve qu’il faut nourrir avec de la chair et du sang ! – Elle reprit : – Où crois-tu qu’on vous envoie ?
    Le légionnaire jeta un regard vers le pont où bringuebalaient les tramways avant de répondre : –
    Alte a écrit dernièrement que le régiment se trouve près d’Orscha, dans le secteur central. Orscha est un nœud de routes entre Minsk, Tula et Moscou. La route va jusqu’en Sibérie, ajouta-t-il, et se termine à Kolyma où des camarades à nous travaillent maintenant dans les mines.
    Orscha ! pensa-t-elle. Un nom. Un nom inconnu, un point sur une grande carte. Un endroit triste et sale dans l’éternité russe où passent des milliers de soldats dont la plupart ne reviennent pas.
    Elle lui caressait les mains qu’un sort méchant destinait à apporter à d’autres soldats et qu’elle aurait tant préféré voir mélanger des boissons…
    – Alfred ! murmura-t-elle, en dévorant le laid visage de ses yeux durs qui se mouillaient de larmes, ne comprends-tu pas, imbécile, que je t’aime ? Pourquoi ? Je n’y comprends rien. J’ai été violée à douze ans, à quinze je me suis mise à aimer ça, maintenant je n’y pense plus. Des enfants, nous ne pouvons plus en avoir, mais nous sommes deux êtres humains qui se comprennent et peuvent s’aimer. Tous les deux nous savons ce qu’est la vie, un carnaval affreux où il faut porter un bon masque. Alfred, je t’attendrai trente ans s’il le faut. Un jour on se réveillera d’un mauvais rêve, alors nous vendrons la bicoque et nous disparaîtrons quelque part où nous pourrons travailler.
    Le légionnaire se mit à rire :
    – Où, Dora ? Au Thibet ?
    Elle secoua la tête : – Non, au Brésil. Ma sœur y possède un vrai bordel ; il y a de la place pour deux. Pas de gendarmes, pas de Stapo, mais le droit de respirer librement !
    Une petite infirmière frais émoulue des Ecoles du Führer dansotait le long du quai en accrochant çà et là une branche de sapin aux poignées de portes, comme elle l’avait vu faire dans un film de guerre. Elle s’essuyait les yeux avec le coin d’un mouchoir et jetait la tête en arrière comme une Walkyrie en criant : – Merci aux héros ! Merci de combattre pour nous autres, femmes allemandes, et de nous défendre contre la peste soviétique !
    Un fantassin au visage de renard lâcha un gros pet et lui dit dans le nez : – T’as besoin de te faire mettre ça, ma fille ! – Un rire énorme s’éleva des compartiments voisins, tandis que le fantassin y allait en plus d’une claque sur les fesses.
    – Dépêche-toi de rentrer ! Les vainqueurs approchent.
    La petite infirmière, outrée, arracha la branche de sapin et courut se plaindre à un feldwebel de gendarmerie qui

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