Ce jour-là
mon nom parmi les cinq derniers. Steve aussi. Il tenait à faire ce qui lui paraissait juste. Steve était un des leaders du groupe et, quand il avait une idée, les types l’écoutaient.
À la fin de l’entraînement au combat rapproché, dans le Mississippi, nous avions perdu un tiers de l’effectif. Les types éliminés n’arrivaient pas à assimiler l’information assez vite pour prendre la décision correcte en une fraction de seconde. Ils n’étaient pas mauvais, et nombre d’entre eux réussiraient les tests au deuxième passage. Ceux qui ne se représentaient pas retournaient dans leur ancienne unité où, en général, ils excellaient.
La rumeur disait que si on réussissait à franchir l’étape du CQB, on avait une chance sur deux d’aller jusqu’au bout. Les instructeurs connaissaient la rumeur, si bien qu’à Virginia Beach ils ont maintenu la pression pour nous rappeler que nous étions encore très loin d’en avoir fini.
Nous n’avions fait que les trois premiers mois d’une formation qui en comptait neuf. Les six derniers n’allaient pas être plus faciles. Après le CQB, nous devions apprendre à manier les explosifs, mener la guerre sur terre et nous initier aux systèmes de communication.
L’une des missions centrales des SEAL est l’abordage des navires. Nous avons passé des semaines à aborder toute une gamme de bâtiments, du bateau de croisière au porte-conteneurs. Même si nous allions passer beaucoup de temps en Irak ou en Afghanistan, il nous fallait être efficace sur l’eau aussi. Nous avons répété des opérations consistant à gagner la rive à la nage à travers les rouleaux pour surveiller une plage et conduire un raid. Puis nous disparaissions dans l’océan pour retrouver notre bateau un peu plus loin au large.
Le dernier mois de l’entraînement était consacré à la sécurité des VIP. Le premier détachement qui assurait la sécurité du président afghan Hamid Karzaï appartenait aux SEAL. Nous avons aussi eu un cours approfondi en SERE, Survival Evasion Résistance & Escape [survivre, s’évader, résister et s’échapper].
Comme je l’ai déjà dit, le rythme de l’entraînement était rapide. Et, on l’a vu, les instructeurs ne nous faisaient pas de cadeaux.
La clef de la réussite était la gestion du stress.
Les instructeurs nous fatiguaient et nous gardaient à cran pour nous forcer à prendre des décisions importantes dans les pires conditions. Il n’y avait que cette méthode pour simuler les conditions du combat. Le succès ou l’échec d’une mission dépendait directement de la manière dont les participants sauraient prendre en compte l’information dans un environnement ultra-stressant. La différence entre le BUD/S et la Green Team c’est qu’avec cette dernière il ne suffisait pas de courir, nager, résister au froid et à la fatigue. La Green Team testait les limites de notre force mentale.
Pendant cette période, on nous a aussi initiés à la culture du commandement. Quand on nous appelait sur le bipeur nous avions une heure pour nous présenter. Tous les matins à six heures, on avait droit à un message-test. Ces bipeurs sont devenus une source supplémentaire de pression, utilisée par les instructeurs qui le faisaient souvent sonner avant l’aube.
Un dimanche, vers minuit, mon bipeur m’a réveillé. Encore à moitié endormi, j’ai roulé jusqu’à la base dans les temps, et ai reçu l’ordre d’enfiler ma tenue de sport et d’attendre. Nous allions faire des tests physiques.
Nous ne devions jamais nous trouver à plus d’une heure de la base, et il n’était pas question de boire une bière de trop. Nous devions être parfaitement opérationnels quand on nous appelait, car on pouvait se retrouver une heure après dans un avion en partance pour n’importe quelle destination sur la planète.
Mes camarades ont commencé à arriver. Le bipeur en avait cueilli certains dans la tournée des bars, semblait-il.
« Tu es ivre ? demanda un instructeur à un candidat.
— Bien sûr que non. J’ai juste pris une bière. »
Après presque une heure, je n’avais toujours pas vu Charlie.
Il arriva avec une vingtaine de minutes de retard. Les instructeurs étaient furieux. Il avait eu une amende pour excès de vitesse sur l’autoroute, ce qui l’avait retardé un peu plus encore. Heureusement, il n’eut droit qu’à une réprimande et put rester avec nous.
À quelques semaines de la fin de la
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