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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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l'idéed'un partage de l'Algérie 2 , je ne peux qu'être sensible à la chaleur qu'il témoigne à ces Français d'outre-Atlantique, alors que les Français d'outre-Méditerranée semblent le laisser plus froid :
    « Vous êtes le Québec ! Vous êtes les Canadiens français ! Il n'y a pas de temps écoulé qui ait pu effacer du coeur de notre peuple la nostalgie de ceux de ses enfants qu'il avait laissés là-bas voici tantôt deux cents ans ... »
    Quand il parle de « notre peuple », avec lequel il se confond, le Général pousse un peu fort : les Français ignorent tout du Québec.
    « " Je me souviens ! " c'est la devise du Québec. En le voyant en votre personne, la France vous en dit autant. »
    Ces dîners officiels dans le Salon des Beauvais sont souvent compassés. Ce soir, on sent le souffle de l'Histoire.
    Au café, Louis Joxe me dit avec bonhomie : « Ne vous fatiguez pas à répandre vos idées sur le partage de l'Algérie. Le Général ne va pas se laisser prendre les pieds dans un nouveau piège en Algérie, quand sa grande pensée, vous l'avez bien entendu, est de réveiller le fait français dans le monde, pour faire équilibre aux Anglo-Saxons. »

    Comédie-Française, 6 octobre 1961.
    Cette soirée, par son protocole et sa symbolique, amplifie la soirée d'hier. Le programme porte :
    Comédie-Française
    soirée de gala
    honorée de la présence de
    S.E. M. Jean LESAGE
    Premier Ministre de la Province
    de Québec

    Dans les invitations, est glissé un carton : « S.E. M. Lesage, Premier Ministre, et les membres du gouvernement de la Province de Québec honorant ce gala de leur présence, les invités sont priés de vouloir bien occuper leur place avant 21 heures. » Il n'échappe pas aux connaisseurs que ce sont les formules usitées pour les visites officielles des chefs d'État.
    À l'entracte, Geoffroy de Courcel m'entraîne vers le foyer. Je lui fais remarquer que le programme comporte Le Chandelier d'Alfred de Musset et Une visite de noces de Dumas fils. S'agirait-il du mariage de la France et du Québec, et le Général tiendrait-il le chandelier ? Courcel n'est pas d'humeur à plaisanter : « Je ne crois pas du tout que le Général, en accordant au Premier ministre du Québec des honneurs exceptionnels, cède à un caprice. Il a les yeuxouverts sur les mouvements profonds des sociétés de ce temps. Il est sans doute, une fois de plus, en avance d'un demi-siècle sur nous, pauvres mortels. »
    Nous rejoignons Lesage, ainsi que deux de ses collègues, Gérin-Lajoie, ministre de l'Éducation, et René Lévesque 3 , ministre des Ressources naturelles. Ils sont « le gouvernement de la Révolution tranquille ». Ils ne doutent pas du succès du mouvement spontané de réveil du peuple québécois, qu'ils accompagnent et s'efforcent d'amplifier.
    Quant au Général, il engage résolument un processus, comme eût dit Claudel, de mutuelle co-naissance : il voudrait que le nouveau Québec et la France nouvelle naissent l'un à l'autre. C'est comme si, après avoir laissé tomber nos compatriotes pendant deux siècles, nous les redécouvrions.

    « Je n'aurais eu qu'un mot à dire pour que la Belgique éclate »
    Salon doré, après le Conseil du 3 septembre 1962.
    Couve de Murville a commenté au Conseil les tensions internes entre les deux communautés linguistiques de la Belgique. Le Général me dit :
    « Après la guerre, je n'aurais eu qu'un mot à dire pour que la Wallonie demande son rattachement à la France et que la Belgique éclate. Mais justement, ce mot, je n'ai pas voulu le dire. »
    Ce mot, voudra-t-il le dire pour le Canada ? Je n'ose le lui demander. Il y a au Canada et en Belgique des problèmes comparables d'incompatibilité entre deux peuples. Mais le Général ne semble pas les assimiler l'un à l'autre. À creuser, si l'occasion s'en présente...

    « Les Français se rebelleront contre les Anglais »
    Conversation au cours d'un voyage en Champagne, 24 avril 1963.
    Tandis que notre autorail longe les vignobles, je dis au Général : « Voilà un vin inimitable et que pourtant on imite partout : en Crimée, en Australie, en Californie.
    GdG. — Staline a eu le mauvais goût de me porter un toast avec du champagne russe. Les Canadiens, en 60, ont cru me faire plaisir en me faisant boire du champagne canadien, à Toronto. C'était un comble. Je leur ai dit : "Il faut autant de courage pour fabriquer duchampagne au bord des Grands Lacs, qu'il en faudrait pour transporter les

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