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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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fait une déclaration qui n'est sûrement pas improvisée :
    GdG : « Tout le monde se rend compte de l'importance primordiale de l'Éducation nationale, notamment dans l'enseignement supérieur. Il est nécessaire que ce problème soit résolu, comme nous avons résolu précédemment d'autres problèmes plus difficiles que celui-là. Chacun constate qu'il y a de plus en plus d'étudiants en lettres et qu'il y a beaucoup moins d'étudiants en sciences, beaucoup moins de futurs ingénieurs ou techniciens supérieurs, qu'il n'en faudrait.
    « Il est donc indispensable d'inverser la tendance. Il faut que l'orientation dans les lycées et la sélection d'entrée dans les facultés permettent de grossir ou de réduire les effectifs. Le Plan est fait pour cela. Il n'est pas fait pour pronostiquer ce qui se passerasi l'on continue tout simplement à suivre la ligne de pente, mais pour faire en sorte que les choses se passent conformément aux besoins de la société. Autrement dit, il faut que les étudiants soient acheminés vers des filières qui déboucheront sur des avenues, non vers des filières qui déboucheront sur des impasses.
    « Il est indispensable d'améliorer la prévision, notamment pour les effectifs. Il est étrange que l'Éducation nationale ne connaisse jamais à temps le nombre des étudiants qu'elle va recevoir. (Se tournant vers Fouchet :) Il est bien de dire ce que vous venez de dire, mais il faut le dire à temps. Il aurait été nécessaire de canaliser l'afflux, de ne pas le laisser se déverser comme une inondation. Pourquoi permettre que les universités soient envahies par des étudiants qui n'ont rien à y faire ? Tous ceux qui veulent y entrer, y entrent. Ils s'y assoient s'ils trouvent à s'asseoir. Ils embouteillent tout le système universitaire. Ils ne savent pas eux-mêmes ce qu'ils font là, si ce n'est de bénéficier des avantages multiples que le contribuable leur consent et de se dérober devant les responsabilités de la vie active. Ils ne veulent pas sortir de l'adolescence.
    «Vous constituez cette commission au bout d'un an. Il y a longtemps qu'elle aurait dû l'être. Elle doit faire des propositions, notamment sur les jeunes qu'on n'est pas obligé de recevoir dans l'enseignement supérieur. Vous devez lui donner et vous donner des délais précis et limités. Dès que le problème aura été débroussaillé, nous organiserons enfin la sélection, qui aurait dû l'être depuis des années et des années. »

    1963 ! Quatre ans ont passé, et j'ai l'impression que cette exhortation m'est destinée. Fouchet a écarté le calice. Ai-je été nommé pour le boire? La sélection dans l'Université reste à organiser. L'orientation dans les lycées aussi. La planification des enseignements, tout autant. Mais si Fouchet, avec son énergie peu commune et son absolue fidélité au Général, n'y a pas réussi, n'est-ce pas à cause de la formidable résistance des gens et des choses ?
    La réponse m'est donnée quelques heures plus tard, quand, avant de me passer ses pouvoirs devant les chefs de service rassemblés, Fouchet me donne ses conseils en tête à tête : « Surtout, gardez-vous d'enfourcher les dadas du Général sur l'orientation et la sélection. Ils lui ont été inspirés par un technocrate, un nommé Narbonne 2 . Pompidou et moi sommes des libéraux. Nous nous sommes refusés à imposer aux jeunes un avenir choisi par l'État. Vous connaissez le Général. On ne le sert bien que si on le protège contre lui-même. »

    « Vous prenez la tête d'une armée »
    Salon doré, 13 avril 1967.
    Aussitôt après m'avoir nommé à l'Éducation nationale, le Général me convoque.
    GdG : « Vous voilà à la tête d'un immense secteur.
    « À la Recherche, vous avez bien fait. Seulement, vous n'aviez pas le commandement direct. Vous donniez des impulsions et des instructions à des organismes qui étaient placés sous votre tutelle, mais qui étaient autonomes et dont la responsabilité quotidienne ne vous incombait pas. C'étaient des satellites qui gravitaient autour de vous. Cette fois, vous prenez la tête d'une armée. Bien sûr, vous avez une administration, une hiérarchie, un secrétaire général, des directeurs. Mais c'est vous seul qui commandez. Vous êtes comptable d'un million de fonctionnaires et de dix millions d'élèves et d'étudiants. C'est beaucoup plus que les armées, qui ne font plus guère que 500 000 hommes. A quoi s'ajoute que les armées obéissent.

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