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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Pourquoi avez-vous fait le contraire de ce que je vous demandais ? Le gouvernement donne l'impression de reculer. Il a l'air aux abois. C'est la pire des choses dans les moments de crise. »
    Le Général me fait passer, ou plutôt me jette par-dessus son bureau, le numéro de Combat de ce matin, qui titre sur la largeur de la une : « De Gaulle a cédé. »
    AP : « Mon général, vous avez vous-même été trahi par la presse assez souvent pour comprendre que je l'ai été aujourd'hui. Voici exactement ce que j'ai déclaré hier à l'Assemblée. »
    Je lui tends le Journal officiel, dont je me suis heureusement muni, en lui montrant du pouce le passage que j'ai souligné en marge : « Il est clair que l'on se trouverait dans une situation insoluble si l'agitation qui a amené la suspension des enseignements devait recommencer avec la reprise des cours. Par conséquent, une telle mesure ne peut pas être prise dans un climat de désordre et de violence. »
    Il chausse ses lunettes, lit, se détend :
    « À la bonne heure ! Les conditions que vous avez posées ne sont pas remplies ! C'est évident ! Donc, vous ne rouvrez pas la Sorbonne. Ce n'est pas nous qui changeons d'avis. Ce sont les anars qui repoussent nos propositions. Il vous suffit de l'expliquer. »

    « Qu'est-ce qui vous prouve que les communistes ne sont pas de mèche avec les gauchistes ? »
    Le Général s'est radouci. Comme il le fait quand il a piqué une colère et s'en veut d'y avoir cédé, il compense son irritation par un surcroît de bienveillance.
    GdG : « Mais enfin, expliquez-moi qui sont ces excités. Qu'est-ce qu'ils ont dans la tête ?
    AP. — Il y a dans les manifestants trois catégories. D'abord, les gauchistes, c'est-à-dire les "enragés" de Nanterre, les "Jeunesses communistes révolutionnaires" qui sont trotskistes, les "Comités d'action lycéens" qui sont dans leur mouvance au niveau du secondaire, les "maoïstes" ; ils sont très peu nombreux, mais fanatisés.Puis les communistes, beaucoup plus nombreux, qui sont en bisbille avec les gauchistes, mais qui ne veulent jamais se laisser dépasser. Enfin, une masse moins engagée, mais qui est tentée de se joindre aux gauchistes si on leur tape dessus.
    « Le problème est de ne pas laisser les gauchistes semer le désordre impunément, et en même temps, de ne pas les réprimer trop brutalement, sinon les communistes et la masse modérée voleront à leur secours.
    GdG. — Vous dites que les communistes sont en bisbille avec les gauchistes. Qu'est-ce qui vous prouve qu'ils ne sont pas de mèche ?
    AP. — Les gauchistes ne cessent d'insulter les communistes. Cohn-Bendit, le 1 er mai, les a traités de "crapules staliniennes". L'Humanité, la semaine dernière, et les journaux soviétiques aujourd'hui encore, ont publié des articles très violents contre eux.
    GdG. — Que veut exactement ce Cohn-Bendit ?
    AP. — Il reproche aux communistes de s'être laissé digérer par la société bourgeoise, qu'il considère comme pourrie et inamendable. Ce qu'il veut, c'est détruire l'ordre établi, dont le parti communiste est un garant. C'est ainsi qu'il a chassé Juquin, député communiste, de Nanterre il y a quelques jours, et tout à l'heure encore, Louis Aragon sur la place de la Sorbonne. Il a insulté le professeur Kastler et le mathématicien Schwartz, hommes de gauche, qui pourtant voulaient les défendre, lui et ses amis. Pourquoi ? Parce que tous deux sont favorables à la sélection.
    GdG. — Et il réclame des réformes dans l'Université ?
    AP. — C'est le cadet de ses soucis. Il dénonce d'avance les réformes qui chercheraient à mieux adapter l'enseignement aux besoins de la société, puisque c'est cette société qu'il récuse. Il ne veut en rien se montrer complice de l'ordre établi. C'est sans doute pourquoi il exerce une fascination sur beaucoup de jeunes, qui n'avaient jamais imaginé un pareil culot. »

    « Ce qui les intéresse, c'est de flanquer la chienlit ! »
    Pendant notre entretien, La Chevalerie apporte au Général une dépêche AFP reproduisant les propos que viennent de tenir Cohn-Bendit et Sauvageot. Il la lit et me la tend.
    GdG : « Ils se fichent bien de leurs cours et de leurs examens ! Ce qui les intéresse, ce n'est pas le retour au calme et au travail, c'est de flanquer la chienlit ! Vous voyez bien qu'il ne faut pas céder ! Il ne faut pas leur faire confiance !
    « Ils n'ont qu'un objectif, foutre en l'air le régime et le pays. Et les

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