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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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autres sont comme des moutons qui suivent les meneurs sans rien dire. Il faut d'abord rétablir l'ordre. C'est une affaire de rapport de forces. Vous avez donné l'impression que nous étions plusfaibles qu'eux. Il faut leur montrer que nous sommes les plus forts. Nous n'allons pas céder à leur ultimatum !
    AP. — Il est clair qu'après les déclarations de ces enragés, si nous rouvrions la Sorbonne sans condition, nous reconnaîtrions que l'insurrection a gagné. »
    Je pensais que le Général allait me parler de l'ouverture, aujourd'hui même, de la Conférence de la paix avenue Kléber. Il ne m'en souffle mot, mais je suis sûr qu'il ne pense qu'à ce contraste étrange. D'un côté, le triomphe de sa politique étrangère : que les Américains et les Nord-Vietnamiens aient décidé de se rencontrer à Paris pour essayer de découvrir les sentiers de la paix : quelle joie ! De l'autre, ces émeutes échevelées : quel écoeurement !

Chapitre 14
    « ON NE CAPITULE PAS DEVANT L'ÉMEUTE »
    Jeudi 9 mai 1968, fin d'après-midi.
    Je préviens Joxe et Fouchet de la position du Général, qui ne les étonne pas, et qu'ils estiment tous deux parfaitement justifiée par la violence verbale des meneurs cet après-midi. Ils considèrent que la réouverture de la Sorbonne est désormais du niveau du gouvernement et échappe à la compétence des autorités universitaires. J'en informe le recteur Roche, à charge de répercuter l'information sur les doyens des cinq facultés qu'il va réunir.
    Roche est pris à contre-pied. Il avait compté ferme, comme moi, sur l'issue positive de la désescalade. Au téléphone ce matin, dès mon arrivée au bureau, nous en avions ébauché l'économie : réouverture immédiate de Nanterre, réouverture plus progressive de la Sorbonne, à cause de la priorité donnée à l'agrégation — sa délicate machine ne tolère aucun à-coup — dont les épreuves se déroulent jusqu' à samedi.
    Roche a longuement réuni les doyens. À la mi-journée, j'approuve au téléphone leur communiqué, qu'ils publient à peu près au moment où Cohn-Bendit annonce que la Sorbonne ouverte sera une Sorbonne occupée, et où je pars pour l'Élysée :
    « Le recteur et les doyens de l'Université de Paris ont décidé de lever la suspension des cours.
    «Les cours, travaux pratiques, travaux dirigés, reprendront donc progressivement. Le recteur et les doyens appellent les enseignants et les étudiants à reprendre leur travail. Ils comptent sur les étudiants pour éviter tout incident et tout désordre. »

    Retour de l'Élysée, j'explique à Roche qu'on ne peut hélas ! compter sur les étudiants pour éviter tout incident et tout désordre, puisque leurs chefs annoncent et programment les incidents et les désordres : « Nous maintenons donc la fermeture de la Sorbonne en attendant le retour au calme. En revanche, les portes vont s'ouvrir à Nanterre, où aucun incident ne s'est produit depuis le 3 mai. »
    Je le sens troublé. J'attends de lui qu'il informe les doyens. Eux et lui ont-ils été moins attentifs que nous aux positions et aux provocations des chefs du mouvement anti-universitaire ? Vers 19 heures, le recteur déclare à l'AFP :
    « Je suis en conversation constante par téléphone avec le Ministre. Il connaît les positions très précises qu'ont prises l'Universitéet les doyens sur la réouverture de la Sorbonne, mais lui seul peut la rendre effective. Pour l'instant, c'est donc le statu quo. La décision des étudiants d'occuper les locaux a certainement modifié la position du Ministre. »

    Reste donc à publier une décision, que les autorités universitaires ne veulent manifestement pas assumer, ni même partager. Comme le Général m'a reproché d'avoir été trop long à la télévision lundi, je me borne à rédiger un bref communiqué.
    « Le recteur et les doyens ont arrêté ce matin des dispositions pour organiser immédiatement une reprise progressive des cours et travaux pratiques à la Sorbonne. Ils ont adressé un appel aux étudiants afin que soit évité tout incident et tout désordre. Or, un important rassemblement s'est formé devant la Sorbonne. Il y a été annoncé que la Sorbonne allait être "occupée" et qu'il y serait tenu "des discussions jour et nuit". Il ne s'agit nullement de retour au calme ni au travail.
    « Les conditions de la reprise des cours ne sont pas encore réunies. La Sorbonne restera donc fermée jusqu'au retour au calme. Le ministre met

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