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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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souhait de Michel Debré de me voir préparer une loi d'orientation sur la recherche, pour mettre un peu d'ordre dans ce secteur qui ressemble à un chantier.
    Pompidou : « Je vous mets en garde contre les emballements de Debré. (Il ne me dit pas qu'il trouve que Debré dépasse sa fonction de ministre des Finances et se prend de nouveau pour le Premier ministre, mais c'est clair qu'il y pense.) La notion de loi d'orientation est chère à Debré, mais elle est exécrable. Nous traînons comme un boulet la loi d'orientation agricole. Les voeux pieux qu'elle contient ligotent inutilement le gouvernement. La "parité" qu'elle a affirmée est une catastrophe. Vous n'éviteriez pas d'inclure dans une loi d'orientation des résolutions à la fois vagues et contraignantes, dans le genre : "La recherche scientifique se donne pour objectif d'obtenir la parité avec la recherche scientifique américaine." Nous ne serions pas sortis de l'auberge !

    Pompidou : « Sur ce point de vocabulaire, le Général a raison »
    «En revanche, j'admets la notion de loi de programme, qui permettrait d'établir des priorités et qui donnerait la possibilité aux différents organismes de recherche de préparer des plans à long terme plus précis que ceux qu'autorise le V e Plan. Il est clair que l'annualisation du budget ne convient pas pour des entreprises à long terme comme la recherche. Une loi-programme de trois ans permettrait de corriger ce défaut de la procédure budgétaire.
    « J'estime, d'autre part, qu'il y aurait plus d'avantages que d' inconvénients à faire entrer dans le cadre de cette loi de programme la recherche spatiale et la recherche nucléaire pacifique.
    AP. — Civile, dirait le Général.
    Pompidou. — Civile, si vous voulez. Sur ce point de vocabulaire, le Général a raison... (Sous-entendu : il a tort sur d'autres points ; ce qu'il n'aurait pas dit, non plus, il y a quelques années.) »
    Ce sont là des orientations importantes, dont il faudra tenir compte rapidement pour la marche de nos travaux. En tout cas, cette conversation me rassure sur l'avenir de notre loi, que je craignais de voir enterrée au niveau de Matignon.

    Pompidou : « Ça coûte horriblement cher, sans autre bénéfice que la gloriole »
    Pompidou me décoche, comme une flèche, un paradoxe goguenard : « C'est ennuyeux ! Je constate que les Français prennent goût aux réussites spatiales. Ça se met à passionner les gens, avec tout le battage que vous faites. Il y a un mois que vous avez pris ce ministère et vous remplissez tellement les radios et les télés avec les performances de la France qu'il va être maintenant difficile derevenir en arrière. Or ça coûte horriblement cher, sans autre bénéfice que la gloriole. »
    Je dis qu'il me paraît impossible de ne pas soutenir la réputation de troisième puissance spatiale que la France vient de se donner. Elle nous crée une obligation vis-à-vis de nous-mêmes.
    Pompidou exprime des doutes à propos de l'utilité du lancement du satellite français FR1 à partir de la base américaine de Vandenberg : « 10 milliards, pour quoi faire ? (Il parle en anciens francs quand il veut gonfler la dépense.) Tout ça est aberrant ! Aberrant. »
    En revanche, le Premier ministre paraît très bien disposé à l'égard des militaires, à qui revient le mérite essentiel d'avoir fait les lanceurs : « Pourquoi ne pas transférer sur eux les moyens que nous donnons au programme CECLES-ELDO, qui ne sert à rien. Il faut que nous arrivions à satelliser une tonne et nous devrions pouvoir y arriver par nos propres moyens. Alors, nous aurons nos satellites de télécommunications bien à nous. Alors, nous serons capables de tirer des profits commerciaux de nos entreprises. Alors, nous serons vraiment la troisième puissance spatiale. Nous ne le serons pas si nous restons à la remorque d'un programme européen plus ou moins tocard. »

    Pompidou : « Il n'y a qu'une méthode, le secret ! »
    J'exprime mon inquiétude sur la politique d'information à suivre pour la série d'explosions de cet été. Il se rembrunit quand je lui parle des conséquences nationales et internationales possibles et de la nécessité d'étudier sérieusement le problème.
    AP : « Il faut choisir entre deux méthodes. Ou bien nous préparons nos expériences en secret et nous décourageons la curiosité des journalistes ; nous faisons transiter tous les matériels et tous les personnels, à proximité de Mururoa, par

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