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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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épaules: « Il n'est pas besoin d'être passé par Saint-Cyr pour faire un feu croisé. »

    « Le Général ne se baisse jamais »
    Une heure et demie s'est écoulée. Pompidou téléphone à Colombey, où les voyageurs arrivent seulement. Alain de Boissieu répond, puis le Général prend le téléphone. Pompidou dit en termes simples et justes l'émotion du gouvernement. Il nous résume ce qu'il vient d'apprendre: «Le Général a dit: "C'est un vrai miracle ! " Alain de Boissieu avait demandé à son beau-père de se baisser. Celui-ci n'en a rien fait. La trajectoire d'une balle montre que, s'il s'était baissé, il était mort. Il a fait comme à Notre-Dame, il y ajuste dix-huit ans 1 . Ses principes l'ont sauvé: devant le danger, le Général ne se baisse jamais 2 . »

    Nouvelle réunion, le lendemain, dans le bureau du Premier ministre.
    Pompidou est pris d'une sainte colère. «Ça ne peut pas continuer comme ça! On obéit aux humeurs du Général, alors qu'ilfaut lui être assez fidèle pour savoir qu'on ne doit pas tenir compte de ses humeurs! Tout le monde a peur de se faire engueuler et personne ne fait rien. Vous avez déjà vu un chef d'Etat qui prend si peu de précautions, alors qu'il n'y en a sûrement pas un sur la Terre, en ce moment, qui soit aussi menacé que lui? Tous les chefs d'État qui sont reçus à Paris ont un service de protection. C'est réglé une fois pour toutes: un énorme convoi, des motards par-devant, par-derrière et des deux côtés, des voitures banalisées qui précèdent et qui suivent, une voie jalonnée, des patrouilles sur le trajet. Pour le Général, rien! rien! rien!
    Frey. — Je décline toute responsabilité. Il ne veut ni motards, ni estafettes, ni jalonnement. On avait décidé l'an dernier de mettre des policiers ou des soldats sur les trottoirs, le long du trajet, lui tournant le dos pour balayer du regard le trottoir et l'immeuble. Le Général m'a fait une scène. Il m'a déclaré que ce n'était pas convenable que des soldats tournent le dos au chef des armées. Que voulez-vous que j'y fasse?
    Pompidou. — Le Général se balade comme un simple particulier! Personne n'est responsable. Désormais, je prends cette affaire en main.
    Frey. — Depuis l'attentat qui a coûté la vie à Alexandre de Yougoslavie et à Barthou, c'est une tradition que les voyages officiels sont rattachés à l'Élysée ; ils ne dépendent pas de la sécurité générale du ministère de l'Intérieur.
    Pompidou. — Je ne veux plus entendre parler de guerre des polices. Il faut renforcer la sécurité du Général, un point c'est tout. C'est un problème concret, que nous devons être capables de résoudre! Ça doit être la tâche essentielle du ministre de l'Intérieur. Désormais, vous êtes responsable de la sécurité du Général, sous mon contrôle. Vous en référez à moi pour le moindre problème! Mais il existait bien une voiture blindée?
    Frey. — Oui, mais elle est si lourde qu'elle se traîne à 40 à l'heure.
    Pompidou. — Et la voiture blindée dont se sert Kennedy, elle fait du 40 à l'heure? Si on n'est pas foutu de fabriquer en France un moteur qui puisse tirer une voiture blindée, il n'y a qu'à acheter une voiture avec moteur américain !
    Messmer. — Si on savait d'avance les moyens qu'utiliseront les conjurés, on pourrait s'y opposer efficacement. Mais on ne sait pas ce qu'ils vont inventer. Il y a une grande variété de types d'attaques, contre lesquelles il faudrait se prémunir simultanément.
    Pompidou. — Bien sûr, on ne peut rien contre l'attentat individuel. Si un illuminé veut assassiner le chef de l'État et fait pour cela le don de sa vie, personne ne l'empêchera. Même un cuirassé est incapable de se protéger contre un kamikaze japonais. C'est l'histoire de Ravaillac ou de Damiens — sauf qu'aujourd'hui, on ne se servirait plus d'un canif.
    « Ce qui est plus grave, c'est l'agitation qui est favorisée tous les jours par la presse, la radio, la télévision. (Il me regarde d'un air de reproche.) Ça crée une telle psychose, que n'importe quel faible d'esprit risque de se laisser entraîner. C'est une incitation au crime! D'ailleurs, je n'ai pas la télé 3 , mais on m'a dit que les présentateurs de la télévision, hier soir, ont commenté tout ça avec des airs goguenards, comme si c'était un attentat bidon.
    « Et puis, il y a la subversion de l'État. La mort de De Gaulle comme fin en soi. L'action pour l'action. On ne sait

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