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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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journaux m'ont fait dire : les Américains sont venus en France pour sauver la Joconde. Ce qui, évidemment, est idiot. Mais Kennedy ne s'y est pas trompé, et comme la fin de mon discours s'était terminée dans le brouhaha et qu'on ne l'avait pas entendue, il a repris cette phrase pour en faire le début de son propre discours, en s'écriant : "Le ministre vient de dire que les soldats américains avaient sauvé la Joconde. Je le remercie de l'avoir dit." Là-dessus, Kennedy a parlé de cette "force de frappe artistique indépendante et bien à vous". C'était une plaisanterie parfaitement amicale. Elle a soulevé les rires cordiaux que provoque tout joke dans une cérémonie semblable. Présenté par la presse française, cela a pris figure d'une déclaration de guerre. Plus d'une page et demie du discours de Kennedy était consacrée au général de Gaulle, dont il faisait un éloge stupéfiant. On était très loin de penser à un quelconque conflit franco-américain.
    GdG. — C'est une opération considérable et, au total, bénéfique. Elle n'est pas terminée, puisque la Joconde va rester aux États-Unis encore plusieurs mois.
    « Mais quand la Joconde sera à New York, pour Dieu, qu'on ne mette pas l'ONU dans le coup ! »

    « Mon refus ne change rien à l'amitié franco-américaine »
    Au même Conseil du 16 janvier, Messmer fait une communication sur l'état d'avancement de la force nucléaire. Le Général conclut : « Nous pouvons tuer en quelques heures autant de Russes qu'il existe de Français. Ça nous donne la certitude qu'ils ne nous attaqueront pas.»

    À l'issue du Conseil, le Général revient de lui-même sur la communication de Malraux :
    « Malraux a raison, notre presse est scandaleuse. Cettecérémonie, organisée par Kennedy pour fêter Mona Lisa et Malraux, c'était un geste considérable d'amitié franco-américaine. L'intéressant de l'affaire, c'est que Kennedy se servait du geste que nous avions fait en lui confiant un tableau, pour se valoriser aux yeux de son opinion. Le discours de Kennedy, vous l'avez lu ? Non, naturellement, il n'est nulle part. Faites-vous-le donner par Couve ou par Malraux, il est gênant à force de louanges à l'égard de la France et de votre serviteur. Qu'est-ce qui en a transpiré dans notre presse ? Une phrase à propos de la "force de frappe artistique indépendante", que nos journalistes ont montée en épingle comme si elle tournait en dérision notre force de frappe atomique. Aucun journal français n'a relevé que le prestige de la France en était venu au point que le Président des États-Unis renforçait sa propre position en Amérique en montrant l'intimité des liens qui l'unissent à de Gaulle ! Au contraire, tous les journaux français ont ironisé sottement sur cette phrase, qu'ils ont présentée comme un coup de patte hostile à notre pays.
    « Évidemment, le discours avait dû être transmis par une dépêche d'agence, mais on s'est arrangé pour couper tout ce qui était favorable et pour ne garder que ce qui pouvait être présenté comme défavorable. C'est cela qu'on appelle "l'objectivité". On se sert d'un discours à la gloire de la France pour ridiculiser la France. Vos journaleux me détestent et ont trouvé là une bonne occasion de le montrer. Quant à votre RTF, naturellement, elle n'a pas fait mieux.
    « S'il y avait pourtant une chose sur laquelle il était honnête de mettre l'accent, c'était bien le fait que mon refus d'accepter la proposition des Bahamas ne change rien à l'amitié franco-américaine. Il n'y a aucun rapport entre les sentiments qui unissent nos deux peuples depuis deux siècles, et telle ou telle péripétie d'une négociation. Kennedy ne se faisait absolument aucune illusion sur les chances de voir aboutir la proposition de force multilatérale qu'il a faite à la France. Cela n'a pas diminué d'un degré la chaleur de son accueil. »
    Bien que je me sente durement mis en cause, le ton du Général est serein ; comme résigné à l'inévitable.

    « Si notre force de frappe était aussi inoffensive que des arbalètes... »
    Il vaut mieux changer de sujet. La presse française n'a pas le monopole de l'agressivité :
    AP : « On vous a montré l'article de Joe Alsop ? Des extraits en ont été repris dans toute la presse française.
    GdG. — Oui, naturellement, j'ai vu ça. Alsop n'est pas de nosamis 1 . Ce qui m'étonne toujours, c'est le pouvoir d'entraînement dont dispose en Amérique et dans tout

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