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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Mais c'est la première fois que j'observe dans les sondages une chute pareille dans la cote d'un chef d'État ou de gouvernement. Celle de De Gaulle est tombée en un mois de 63 % d'opinions favorables à 41 %.»
    Il y voit quatre causes possibles :
    1  La nouvelle tentative d'attentat à l'École militaire, quiprouve que les affaires d'OAS ne sont toujours pas réglées et que le gouvernement n'a pas réussi à rétablir la sécurité.
    2  Ou bien, la condamnation à mort de six des conjurés du Petit-Clamart.
    3  Ou bien, la rudesse avec laquelle le Général a claqué la porte au nez des Anglais pour leur barrer l'entrée dans le Marché commun.
    4  Ou, enfin, la grève des mineurs.
    Il n'exclut pas une combinaison des quatre facteurs. J'ai répondu à mon bon maître que je n'hésitais pas. Le sondage permanent que me permet le contact hebdomadaire avec mes électeurs ne m'a jamais trompé. L'attentat éventé et le zut aux Anglais les ont fort peu émus, et auraient plutôt fait monter la cote du Général. Les six condamnations à mort ne les bouleversent pas ; d'ailleurs, la plupart d'entre elles seront sûrement commuées, puisque, cette fois, le chef, Bastien-Thiry, en fait partie. C'est évidemment le quatrième facteur qui a tout gâché. (Faut-il qu'un grand sociologue soit contaminé par le parisianisme, pour formuler de pareilles hypothèses !)

    Pompidou, à qui je raconte cette visite de son vieux camarade
    — ils appartiennent à la même promotion de la rue d'Ulm —, partage mon sentiment : « Mais le quatrième facteur n'a eu de telles conséquences, que parce que les Français se sont rebellés. Ils ressentent que les élections de novembre dernier ne les reflètent pas. C'est l'inconvénient du scrutin majoritaire. Quand une crise éclate, l'opposition se sent infiniment plus forte dans le pays qu'à l'Assemblée. Les Français n'ont pas vraiment voulu cette Assemblée inconditionnelle. La grève des mineurs a servi de révélateur. »

    « Comme un caprice pharaonique »
    Après un silence, Pompidou revient sur le regret qu'il m'a déjà exprimé il y a un mois : « Je m'en veux d'avoir envoyé un motard le samedi à Colombey, sans attendre que le Général revienne le lundi. Le Général est trop honnête et a inscrit à la main le lieu et la date. La presse a mis l'accent sur ce "décret de Colombey" saugrenu. Ça a exposé le Général beaucoup plus qu'il n'aurait dû l'être. Alors qu'à Paris, sa signature, parmi quatre ou cinq autres, n'aurait pas retenu l'attention. Ce qui aurait dû être un paraphe de routine a été présenté comme une provocation personnelle du monarque, adressée à la classe ouvrière. Comme un caprice pharaonique. Je ne me le pardonne pas. »
    1 Allusion aux origines démocrates-chrétiennes de ce syndicat, qui n'est pas encore devenu CFDT. Le Général me redira cette expression à plusieurs reprises, sans doute pour m'inciter à l'employer, pendant les années 1963, 1964 et 1965 à propos du MRP, puis de Jean Lecanuet pendant la campagne présidentielle. Et il l'enregistrera même entre les deux tours, au cours de ses entretiens avec Michel Droit ; mais il la fera supprimer sur nos instances.
    2 Député gaulliste, polytechnicien, ancien ministre de l'Industrie.
    3 Historien et sociologue.

Chapitre 8
    «NOUS AURONS GAGNÉ SI NOUS SAVONS TIRER LES CONSÉQUENCES »
    Matignon, 23 avril 1963.
    Pompidou a le droit d'être satisfait. La grève des mineurs, véritable psychodrame national, est terminée. Pendant ces semaines, il a été sans cesse sur la brèche. C'est lui qui a négocié avec les syndicats. Lui qui a chargé Massé d'une mission d'étude et de conciliation sur le « rattrapage » souhaitable, et qui a fait ainsi sortir le gouvernement de l'impasse. Lui qui a chargé le conseiller d'État Toutée d'élaborer une procédure pour régler à l'avenir ce genre de problèmes dans l'ensemble du secteur public. Lui qui a décidé souverainement du taux des augmentations à accorder. Il a été tout à fait à l'aise dans ce rôle d'homme-orchestre.
    Ce matin, à la fin de notre réunion quotidienne — nous restons tous deux seuls dans son bureau —, il me déclare : « Les leçons de cette crise sont claires :
    « Primo : la démagogie ne paie pas. Les politiciens, les curés ou les plumitifs qui se sont empressés de faire pleurer Margot en auront été pour leurs frais. Notamment, les gaullistes, de gauche ou pas de gauche, qui ont voulu nous

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