Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
Vom Netzwerk:
la France dans cette course à l'espace.
    GdG : « Nous ne sommes plus un mastodonte. Nos possibilités financières sont loin de nous permettre de faire aussi bien que chacun des deux super-grands. Ce qu'il faudrait, c'est que, en nous mettant avec les autres pays européens, nous arrivions à faire des lanceurs aussi puissants que les Américains ou les Russes. Tout seuls, nous ne comblerions pas le retard. Mais l'Europe ensemble devrait réussir à le réduire. Et comme nous sommes le pays européen le plus avancé, nous devrions prendre une position dominante dans ce secteur. Ça justifierait l'effort que nous avons engagé. »
    Il reprend son souffle, comme il fait quand il veut dire le fond de sa pensée :
    «L'Europe, ça sert à quoi? Ça doit servir à ne se laisser dominer ni par les Américains, ni par les Russes. À six, nousdevrions pouvoir arriver à faire aussi bien que chacun des deux super-grands. Et si la France s'arrange pour être la première des Six, ce qui est à notre portée, elle pourra manier ce levier d'Archimède. Elle pourra entraîner les autres. L'Europe, c'est le moyen pour la France de redevenir ce qu'elle a cessé d'être depuis Waterloo: la première au monde.»

    « Il ne faut pas être habile, il faut être offensif »
    Élysée, 3 septembre 1962.
    Au Conseil, la veille de son départ pour son voyage en Allemagne, le Général fait un développement chaleureux sur l'union franco-allemande, qui doit se substituer à l'Union des six États, dite «plan Fouchet ». Si chaleureux, et par contrecoup si accablant pour Spaak et Luns, que Pompidou me glisse: « Le Général veut punir les Belges et les Hollandais. Mais, surtout, ne parlez pas d'eux ! »
    Décidément, de Gaulle n'est jamais à court d'imagination et d'action. Son initiative du plan Fouchet a échoué, parce que Belges et Hollandais ne veulent pas d'une Europe non-supranationale si les Anglais n'en sont pas ? Qu'à cela ne tienne: il contre-attaque, en préparant une étroite entente franco-allemande qui sera un concentré du plan Fouchet, et en se disposant à barrer la route du Marché commun aux Anglais.
    Les ministres MRP, en démissionnant, mettent en danger la base parlementaire du gouvernement? Sans perdre de temps à essayer de les convaincre, le Général va répliquer en donnant au Président de la République la formidable assise de la souveraineté populaire, ce qui va ruiner toute velléité de retour au régime d'assemblée, avant même que la première élection au suffrage universel ait effectivement eu lieu.

    Après le Conseil. «Il ne faut pas être habile, me dit-il en m'accueillant dans le Salon doré. Il faut être offensif.» Il peut se le permettre. D'autres que lui, ne le pouvant, sont bien obligés de recourir à l'habileté. «Le Général, m'a soufflé Pompidou, est un personnage atypique. Ce qui lui réussit condamnerait les autres à l'échec. Ce qui réussit aux autres échouerait avec lui. »

    « L'Allemagne, c'est comme un tronc fendu en son milieu »
    Je le questionne sur le voyage en Allemagne qu'il entame demain. Il m'en parle avec une sorte de tendresse. Il souhaite une bonne « couverture» par la presse et surtout la télévision. Il doitprononcer quatorze discours en allemand, ce qui obligera la RTF à baisser le son dès les premiers mots et à donner lecture du texte français. Il veut vérifier que ce sera bien fait. Il tient, à la fois, à ce que le public français comprenne qu'il parle allemand, et saisisse le sens de ce qu'il dit.
    La peine qu'il se donne d'ordinaire pour écrire, puis apprendre par cœur, a été poussée cette fois à son paroxysme. Son interprète Jean Meyer m'a raconté comment il a aidé Pierre Maillard — conseiller diplomatique à l'Élysée et agrégé d'allemand — à traduire les textes rédigés en français par le Général ; comment celui-ci a lu plusieurs fois à haute voix en leur présence les traductions, de manière à placer l'accent tonique où il faut; et comment il les a répétées encore devant eux, sans le texte, après les avoir apprises. Selon Meyer, le Général a presque oublié son allemand scolaire. Il sait le sens global d'une phrase, mais il en apprend les sons par mémoire phonétique, sans connaître le sens des mots. Et ce travail, énorme même pour un surdoué, il s'y est livré dans la quinzaine qui a suivi l'attentat du Petit-Clamart... De la part d'un homme de soixante-douze ans, c'est à peine croyable.
    Sur

Weitere Kostenlose Bücher