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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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Général m'a prescrit de faire sur les initiatives qu'il comptait prendre. Aucun de mes collègues n'y a prêté la moindre attention. Pompidou ne m'en a pas soufflé mot; peut-être craint-il de m'initier au secret qu'il a lui-même percé et qu'il croit que j'ignore...
    1 Il avait déjà utilisé cette expression le 16 avril (voir pp. 99-100) et le 4 mai (voir p. 125).

Chapitre 15
    PREMIER ENREGISTREMENT : « L'ENTREPRISE D'USURPATION »
    Vendredi 8 juin 1962.
    Jean Chauveau 1 me téléphone ce matin: «J'avais oublié de vous dire qu'un des privilèges de celui qui est chargé de l'Information est d'assister à tous les enregistrements radiotélévisés du Général. C'est à midi: excusez-moi de vous prévenir si tard. »
    Il faudrait décommander au dernier moment des rendez-vous:
    AP : «Est-ce vraiment utile?
    Chauveau. — Bien sûr! Vous avez le droit de faire des objections au Général. Notez bien, ajoute-t-il en riant, que je ne vous le recommande pas vraiment.
    AP. — Donc, c'est inutile.
    Chauveau. — Ce sera probablement inutile. Mais le Général m'a expliqué, à propos d'un de vos prédécesseurs, que c'était constitutionnellement nécessaire. Comme le Président de la République n'est pas responsable devant le Parlement, il faut, chaque fois qu'il parle en public, qu'il ait à ses côtés un ministre. Lequel peut répondre devant la représentation nationale de ses faits et dires. Ou bien, par sa présence muette, il a manifesté son accord: il doit ensuite se solidariser avec le Président. Ou bien, s'il n'est pas d'accord, il peut le manifester.
    AP. — Ce que vous dites est bien extraordinaire! C'est déjà arrivé?
    Chauveau. — Je ne crois pas. Mais si le Général dit en votre présence quelque chose qui ne vous revient pas, vous avez le moyen de lui présenter des observations ou suggestions; et, s'il n'en tient pas compte, vous pouvez toujours démissionner, comme vos cinq collègues l'autre jour (nouveau rire). C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Général n'effectue jamais un déplacement dans les territoires de la République sans avoir au moins un ministre à ses côtés, ou à l'étranger sans le ministre des Affaires étrangères. »
    On fait des découvertes tous les jours: je ne savais pas le Général si soucieux des prérogatives du Parlement.

    « Par-delà les hommes qui passent »
    Dans la cour de l'Élysée, un gros camion de la RTF. Dans le salon Murat, au rez-de-chaussée du palais, des techniciens s'affairent à dérouler des câbles, déplacent quatre caméras grosses comme des canons de marine, qui enregistreront simultanément, de manière à éviter de tout recommencer si quelque raccord s'impose. La maison du roi est là : Burin des Roziers, Galichon, Chauveau. Nous attendons.
    Chauveau me confie le texte de l'allocution: « Si vous repérez une divergence entre le texte écrit et le texte dit, vous pourrez la signaler au Général. Il décidera si le texte récité doit être conservé, ou bien s'il fait un raccord, auquel cas le texte écrit pourrait être modifié en conséquence; ou encore si le texte écrit fait foi, bien qu'il ne coïncide pas avec le texte récité.»
    À midi pile, arrive le Général, déjà maquillé, précédé d'un huissier et suivi d'un aide de camp, en procession. Serrements de mains rituels: « Heureux de vous voir... Content de vous saluer... » Sans oublier aucun des techniciens à proximité, une bonne douzaine, dont les visages sont tous empreints d'une sorte de respect religieux, bien que plus d'un vote sûrement communiste.
    Le Général se place derrière un bureau en faux Louis-XV. Dans son dos, une bibliothèque en trompe-l'œil, aux riches reliures peintes sur contreplaqué. «Silence, on tourne!» L'acteur se dépense de la voix et du geste.
    Aucune différence entre les textes écrit et dit: il a récité par cœur, sans la moindre hésitation ni erreur. En revanche, deux passages m'ont fait sursauter.
    D'abord, il dénonce le 13 mai 1958 comme « l'entreprise d'usurpation venue d'Alger ». C'est sa façon de «régler leur compte aux gens du 13 Mai », comme il m'en avait prévenu voici neuf jours.
    En outre, le Général déclare imperturbablement ce qu'il m'avait aussi annoncé : « L'accord direct entre le peuple et celui qui a la charge de le conduire est devenu, dans les temps modernes, essentiel à la République [...] Solennellement, par le suffrage universel, nous avons, au moment voulu, à assurer

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