C'était le XXe siècle T.1

Carnarvon beaucoup moins. Il cherchait surtout des objets plus prestigieux à exposer dans son château de Highclere. La preuve était faite néanmoins de la compétence de Carter. Désormais, Carnarvon lui accorda une confiance presque absolue.
    Or la véritable obsession de Carter était la tombe de Tout Ankh Amon.
     
    Tout Ankh Amon ?
    Un pharaon de cette XVIII e dynastie qui régna de 1552 à 1306 av. J.-C. C’est à celle-ci qu’appartinrent certains des plus grands souverains de l’Egypte, tels que la reine Hatshepsout, Aménophis I I ou encore Aménophis IV dit Akhenaton.
    On a attribué plusieurs origines à Tout Ankh Amon. Il semble qu’il faille se rallier aux conclusions de Christiane Desroches-Noblecourt : Tout Ankh Amon devait être le fils d’Aménophis III et de l’épouse nubienne de celui-ci, Tiyi. On découvre une réelle ressemblance entre le masque funéraire de Tout Ankh Amon et la tête de la reine Tiyi – d’évidente race noire – telle que la montre sa statue en ébène conservée à Berlin.
    Il a grandi à la cour d’Amarna et il est devenu roi à l’âge de neuf ans. Il a épousé la troisième fille d’Akhenaton – sa nièce. Quand il règne, il est encore enfant. Marié mais enfant. Ce que l’on attend de ce très jeune roi, c’est qu’il remette de l’ordre en Égypte et la rende au culte du dieu Amon.
    La cour de Tout Ankh Amon l’a conseillé. Il a résolu de relever les ruines et de remodeler les monuments afin que les dieux rendent leur amour et leur protection à l’Égypte. Il annonce qu’il façonnera une statue d’Amon en or, ornée de pierres rares, plus grande et plus belle que toutes celles que l’on a créées jusque-là. Ainsi Amon sera-t-il satisfait.
    Et tout autant le clergé de Thèbes.
    Car Thèbes, grâce à Tout Ankh Amon, va redevenir la capitale politique et religieuse de l’Égypte. Est-ce un grand règne qui attend Tout Ankh Amon ? Il a dix-huit mis. Tout à coup la maladie fond sur lui. Il meurt.
    Ainsi a-t-il traversé la vie, le successeur d’Akhenaton, d’un bref coup d’ailes. Son règne trop court, n’est-il pas normal qu’il ait provoqué si peu d’inscriptions, qu’il ait laissé si peu de vestiges ? Tout Ankh Amon restait l’un des moins importants – et des plus inconnus – parmi les pharaons de l’ancienne Égypte.
    Or le destin allait faire de lui le plus illustre des anciens rois de la vallée du Nil. Celui dont des millions d’hommes et de femmes répéteront le nom à travers le monde. Cela uniquement parce que Howard Carter aura découvert sa tombe.
     
    Il y avait très longtemps que Carter pensait à Tout Ankh Amon. Il avait dressé une liste des découvertes effectuées entre 1875 et 1898 et constaté que l’on n’avait trouvé ni le tombeau ni la momie de Tout Ankh Amon. Aucun texte ne faisait mention de l’emplacement de la tombe. Aucun ne parlait d’un éventuel pillage ni du transfert de la momie, comme cela s’était souvent pratiqué au temps des surabondants viols de sépultures. Carter en avait déduit que le tombeau de Tout Ankh Amon existait toujours. Si l’on gardait une chance de trouver intacte une tombe de roi, c’était bien celle-là.
    Mais où ?
    Tous les pharaons de cette époque avaient été inhumés dans la vallée des Rois. Ce qui conduisait à penser que Tout Ankh Amon devait s’y trouver aussi. Cependant, l’Américain Théodore Davis était toujours détenteur de la concession de la vallée. Il y avait découvert les tombes de Thoutmôsis IV, d’Hatshepsout, de Siptah, de Iouiya, et de Touiyou, – arrière-grand-père et arrière-grand-mère de l’épouse de Tout Ankh Amon –, la tombe d’Horemheb, le caveau destiné à recevoir la momie d’Akhenaton après son transfert de Tell el-Amarna, et enfin la tombe d’Amenhotep. En 1914, Davis affirmait qu’à son avis, « la vallée n’avait plus rien à livrer ». En juin, il abandonna officiellement sa concession. Sur les instances de Carnarvon et de Carter, Gaston Maspéro la leur attribua mais il était lui-même d’avis qu’on ne trouverait plus rien dans la vallée. Il le déclara avec beaucoup de franchise aux deux Anglais.
    Carter et Carnarvon demeuraient persuadés qu’à certains endroits de la vallée, recouverts par les rejets des fouilles précédentes, on pourrait encore procéder à des examens fructueux.
    Récit de Howard Carter  : « Nous savions qu’un travail titanesque nous