Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
Vom Netzwerk:
Home Rule .
    C’était compter sans l’Ulster. On a l’habitude de dire et d’écrire : le protestant Ulster. C’est aller un peu vite. En 1911, sur un peu moins de 1 600 000 habitants, l’Ulster comptait 700 000 catholiques et 900 000 protestants. Sur neuf comtés, quatre seulement étaient à majorité protestante. Mais ceux-là vont peser de tout leur poids dans la bataille.
    Depuis des années, l’Ulster affirme son opposition irréductible au Home Rule . Quand, en avril 1912, la Chambre des Communes vote la loi qui l’institue enfin, c’est, en Ulster, une véritable explosion de haine. Il n’est pas de temple où l’on ne prêche contre les papistes. Aucun slogan n’a jamais eu autant de succès que celui-ci : Home Rule means Rome Rule  ; Home Rule veut dire le gouvernement de Rome. On rédige une pétition que signent 500 000 habitants de l’Ulster qui affirment vouloir empêcher le Home Rule « par tous les moyens qui seront nécessaires ». Dans les villes et dans les villages, on forme des groupes armés. Bientôt, ils sont si nombreux qu’il est possible de les fédérer dans une Ulster Volunteer Force , commandée par un général. Cette force protestante compte 80 000 hommes ! À la Chambre des Communes, c’est un avocat qui mène le combat pour l’Ulster, sir Edward Carcon. Il menace de constituer en Ulster un gouvernement provisoire :
    — On me dit que ce sera illégal. Bien entendu ce sera illégal. Le maniement d’armes est illégal… Les Volontaires sont illégaux, et le gouvernement sait fort bien qu’ils sont illégaux, mais le gouvernement n’ose pas intervenir… N’ayez pas peur des illégalités.
    En septembre 1913, ce gouvernement provisoire est créé en Ulster et Carcon en devient président. Celui-ci, perdant toute mesure, se rend en Allemagne pour rencontrer le Kaiser. Il faut bien se rendre à l’évidence : l’Ulster est pratiquement en sécession. Le 14 mars 1914, Churchill, premier lord de l’Amirauté, accuse l’Ulster de « haute trahison ». Il menace :
    — À la force, nous répondrons par la force.
    On envoie l’armée en Ulster pour mettre à la raison les unionistes, mais les soldats et les officiers sont en grande majorité protestants. Le général Gough et cinquante-sept officiers démissionnent. Voilà un gouvernement désarmé. D’autant plus que les révoltés de l’Ulster franchissent encore une étape : un navire débarque secrètement en Irlande du Nord 25 000 fusils et 3 000 000 de cartouches – venant d’Allemagne – et destinés aux Volontaires protestants. Les autorités anglaises, dûment prévenues de ce débarquement, n’ont pu ou voulu s’y opposer.
    Asquith, Premier ministre, déclare :
    — Si nous donnons l’ordre de marcher contre l’Ulster, il est certain que la moitié des officiers fera grève.
    Sur un ton très britannique, il ajoute :
    — Cela n’est guère plaisant.
    Assurément, le gouvernement de Sa Majesté se trouve dans une impasse. Mais les Irlandais du Sud ?
     
    En 1858, avait été fondée l’Irish Republican Brotherhood (I.R.B.), une société secrète qui ne rassembla jamais plus de deux mille adhérents, y compris les Irlandais émigrés en Amérique. Le recrutement s’était toujours fait parmi les milieux cultivés. Le but à atteindre : l’indépendance nationale. Les moyens ? Tous, y compris la violence. Chaque fois qu’éclataient en Irlande des manifestations en faveur de l’indépendance, voire de l’autonomie, on était sûr de trouver, au sein de ceux qui défilaient ou revendiquaient, une majorité de membres de l’I.R.B. En 1910, l’I.R.B. – sortie peu à peu de la clandestinité – a publié un journal bi-mensuel, Irish Freedom (la Liberté irlandaise). Tous ceux que nous avons vus entourer Patrick Pearse sur le perron de l’hôtel des postes, le lundi de Pâques 1916, étaient membres de la Fraternité républicaine irlandaise.
    À la veille de la guerre de 1914, les membres de 1T.R.B. donnent naturellement libre cours à leur colère. Va-t-on tolérer plus longtemps les provocations de l’Ulster ? Pour répondre aux Volontaires de l’Ulster, un parlementaire, John Redmond, a créé, en novembre 1913, un mouvement qu’il a appelé les Volontaires irlandais. Tout aussitôt, il a recueilli 200 000 adhésions, chiffre énorme, et qui montre à quel degré de fièvre, en Irlande du Sud, on est aussi parvenu. Sur ces 200 000, 2 000 ont été

Weitere Kostenlose Bücher