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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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quelque sorte officiellement, que le roi était mort.
    « Dans l’intervalle, avec mes deux confrères inconnus, nous avions fait les premières constatations. Deux blessures par balles. L’une à l’épaule droite, l’autre au défaut des côtes, au sommet de l’hypocondre droit. La balle avait atteint le foie et, dans une direction progressivement de bas en haut, suivi jusqu’au poumon du même côté, comme l’attestait la mousse sanglante aux narines. C’était la blessure mortelle.
    « Ces constatations ont pu être refaites dix à douze minutes plus tard par moi pour les montrer au professeur Olmer et à mon camarade le médecin commandant Assali, professeur agrégé, chirurgien à Michel-Lévy (où il devait peu après s’occuper du général Georges).
    « C’est avec Assali que nous avons tous deux rajusté les vêtements du roi et ragrafé sur la poitrine avec deux épingles nourrice le ruban de la Légion d’honneur déchiré. Puis, aidés de Mme Jouhannaud qui était allée chercher une carafe d’eau et du coton hydrophile, tous trois nous avons lavé le sang sur le visage et les mains. Le sang mousseux s’écoulant encore des narines, j’y ai placé haut, sans qu’on les voie, deux tampons d’ouate.
    « Il y avait vingt minutes – vingt-cinq peut-être – que le roi était entré dans la préfecture. Je suis parti par une porte, derrière  (36) . »
    Les deux médecins inconnus du docteur Hérivaux s’appelaient Coste et Camas. Le docteur Henry les a rejoints.
     
    À l’Hôtel-Dieu, d’autres médecins tentent de sauver Barthou. Ils ont décelé une simple fracture de l’avant-bras gauche, mais l’artère humérale a été coupée au-dessus du coude. Sur place, on lui a bien fait un garrot, mais au poignet ! En arrivant à l’hôpital, Barthou était vidé de presque tout son sang.
    On décide d’intervenir chirurgicalement. On le porte sur la table d’opération, on l’anesthésie, on lie l’artère sectionnée, on procède à une transfusion. Tout cela se révèle inutile. À 16 h 40, Louis Barthou, ministre des Affaires étrangères, rend le dernier soupir.
    La thèse officielle sera que le roi Alexandre et Barthou ont été atteints par le même assassin. C’est faux. Un document inédit révélé par l’historien Jacques de Launay – remarquable découvreur – prouve le contraire. Une balle a en effet été trouvée postérieurement à l’arrière gauche de la Delage, dans les coussins de la voiture. Le laboratoire de police technique de Marseille a enregistré, le 9 octobre 1935, le rapport d’expertise de son directeur, le docteur Béroud, et de l’expert armurier Gatimel. En voici l’extrait décisif : « La balle trouvée dans la voiture royale du côté gauche où était assis le président Barthou constitue le projectile blindé de cuivre d’une cartouche de 8 mm, modèle 1892. Cette balle est du même calibre que celles tirées par les agents de police. Elle n’a pas été tirée par l’un ou l’autre des pistolets trouvés en la possession de Kelemen  (37) . Donc cette balle correspond aux balles tirées par les revolvers des agents de police  (38) . »
    Il ressort des dossiers de police que Vlada portait deux armes, une dans chaque main. Un parabellum Mauser 7,65, avec quatre chargeurs dont un, contenant dix cartouches, qui a été vidé – et un pistolet Walter 7,65 qui n’a pas servi. Cinq balles ont été tirées par Vlada sur Alexandre, quatre sur le général Georges. Nous en sommes à neuf balles. La dixième a été tirée par l’oustachi sur le policier Galy qui tentait de s’interposer. À ce moment-là, son chargeur était vide. Comment douter ? Ce ne peut être que par une balle française que Louis Barthou a été tué.
     
    Ainsi, le roi Alexandre est mort, Louis Barthou est mort. À l’hôpital militaire, le général Georges agonise. Contre toute attente, il survivra.
     
    À bord de son train spécial, la reine Marie de Yougoslavie a quitté Belfort en direction de Lyon. À Besançon, le train est annoncé pour 18 h 30.
    Le convoi stoppe le long du quai. Le préfet du Doubs, M. Peretti della Rocca, demande aussitôt à rencontrer le maréchal de la Cour. Il reçoit l’assurance que la reine ignore tout. Le préfet décide de monter lui-même dans le train et d’y rester afin de pouvoir informer la reine avec les ménagements qui s’imposent. Le convoi quitte Besançon à 19 h 20.
    Dès qu’elle

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