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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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pourri ! Mas-su ! Mas-su ! Mas-su !
    En hâte et atterré, Salan se retire. Il se savait impopulaire mais pas à ce point.
    Lucien Neuwirth : « Salan avait la réputation d’être un officier, disons, républicain. Alors, quand il a paru sur le balcon, il s’est fait siffler, huer, et j’ai pris à part les gens de la tendance Lagaillarde et autres. J’ai dit : "Vous êtes complètement dingues, ce n’est pas le moment d’agir comme ça." Lagaillarde m’a répondu : "Oui, c’est embêtant." Et puis la sonorisation ne marchait pas…»
    De sa grosse voix, Massu intervient :
    — Il faut que je leur parle, que je les calme.
    À son arrivée, quand on lui a proposé de faire partie du Comité de Salut public, il a refusé catégoriquement :
    — Pas de militaire, hein !
    On l’a convaincu que, précisément, il fallait des militaires. C’est son propre nom que l’on a inscrit en tête de liste sans qu’il s’y oppose. Il présidera donc le Comité.
    Quand Massu s’avance sur le balcon, Neuwirth fait ce qu’il faut. Miracle, la sonorisation fonctionne ! La voix amplifiée au maximum saisit la foule :
    — Moi, général Massu…
    Une immense acclamation !
    À ce moment précis surgit enfin Delbecque ! Quelques gaullistes déterminés l’entourent. Surpris, les autres le regardent. Il se présente :
    — Delbecque. Je suis l’envoyé de Jacques Soustelle.
    Sensation. Le nom de Soustelle a été scandé toute la journée par la foule. On inscrit immédiatement Delbecque sur la liste du Comité. Il le vice-présidera.
    D’emblée, il s’impose. Son autorité, personne ne la met en question. Tranquillement, il s’en va saluer Salan qui, hors de lui, lance :
    — Vous n’êtes qu’un voyou !
    Sans répondre, Delbecque parle du général de Gaulle. De Gaulle dont l’arrivée au pouvoir résoudra tous les problèmes. Quand les deux hommes se séparent, ils sont convenus que « le Comité de Salut public se soumettra au commandement militaire ».
     
    Quand, au début de l’après-midi, Pflimlin est monté à la tribune du Palais-Bourbon, nul n’aurait parié sur ses chances de former un gouvernement. Sous les coups de boutoir de ses adversaires, celles-ci n’ont cessé de diminuer au cours des heures suivantes. Dans la soirée, quand la nouvelle du « coup d’Alger » est arrivée à Paris, dans l’instant il a semblé qu’un vent glacé soufflait sur l’hémicycle. On a procédé au vote. Pflimlin a été investi par 280 voix contre 120.
    D’emblée, le nouveau président du Conseil se trouve confronté non seulement à une Algérie devenue dissidente mais à une opinion qui le désavoue avant même qu’il soit installé à Matignon. Il incarne à ses yeux le régime et l’on ne veut plus du régime. Durant deux semaines, Pierre Pflimlin va présider un fantôme de gouvernement. Il pourrait frôler le ridicule. Cet honnête homme n’y sombrera jamais.
    Les socialistes ont fini par accepter de rester dans le gouvernement et Jules Moch a accepté le ministère de l’Intérieur. Il n’ignore rien de ce qui se prépare. Il connaît l’existence des mouvements militaires qui peuvent être déclenchés d’une heure à l’autre et sait que les paras peuvent atterrir, les uns venant d’Algérie, d’autres arrivant du Sud-Ouest. Par lui, Pflimlin sera tenu au courant jour après jour. Malgré cette terrible épée de Damoclès suspendue sur sa tête, il tâchera de gouverner.
     
    La nuit s’avance et, sur le Forum, la foule qui s’égosille toujours, quoique sur un registre affaibli, ne se résigne pas à se disperser. Il est plus de 2 heures du matin quand Lagaillarde suggère une solution : on va annoncer le ralliement de Salan au mouvement. On prend la précaution de disséminer des paras parmi les manifestants : les réverbères, brisés depuis longtemps, ménagent une obscurité propice à la manœuvre. Les paras, dûment endoctrinés, devront applaudir et acclamer de façon progressive. L’un d’eux dira à Yves Courrière : « Décidément, à Alger, on aura tout fait ! »
    À 2 h 45, en pleine lumière, le colonel Thomazo se présente sur le balcon. On salue Nez de cuir par des hurlements de joie.
    — Je viens vous lire un appel du commandant en chef, le général Raoul Salan…
    Cette fois les paras en mission sont pratiquement seuls à crier :
    — Vive Salan !
    Le reste se méfie. Thomazo poursuit :
    — Le général Salan est des

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