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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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doit suivre un trajet en forme de Z. De Main Street, on tourne à droite – à angle droit – dans Houston Street. Puis à gauche – en angle aigu – dans Elm Street. Après ce virage, le cortège doit passer très exactement sous les fenêtres du Depository . Il longera, quelques dizaines de mètres plus loin, un monticule herbeux, dont une pergola à colonnes marque la limite. Au fond, le remblai du chemin de fer sous lequel – par un triple tunnel – le cortège poursuivra sa marche.
    À 12 h 29, dans la voiture de tête, le chef de la police Curry braque son volant pour pénétrer dans Elm Street. Un virage à 120 degrés. Au volant de la Lincoln, Bill Greer doit presque s’arrêter devant le Texas School Book Depository . Le même problème se pose au chauffeur du vice-président, Jacks, qui maugrée, en apercevant le tournant :
    — Zut, c’est pratiquement un demi-tour.
    Maintenant, la Lincoln roule vers le viaduc. Il fait chaud. Très chaud.
    Dans la voiture de tête, l’agent secret Lawson regarde le viaduc vers lequel on s’avance. Là-haut, sur le remblai, il aperçoit plusieurs personnes. Indiscutablement, voilà une faille dans le service de sécurité. Lawson agite la main avec énergie, faisant signe à un agent de police de « faire circuler » ces gens-là. L’agent ne comprend pas.
    Nellie Connally montre le viaduc à Jackie :
    — Nous y sommes presque. C’est tout de suite après ça.
    Tout de suite, en effet : le Trade Mart se trouve à cinq minutes. C’est là que les Kennedy doivent présider le banquet que l’on espère rémunérateur. Le parti démocrate a besoin d’argent.
    Jackie regarde le viaduc et le Triple Underpass (passage souterrain à trois niveaux). Elle se souviendra avoir pensé : «  Comme la fraîcheur du tunnel va être agréable …  (143)  »
    Parmi les spectateurs, beaucoup de Noirs. Dans une ville où sévit la ségrégation, ils ont préféré venir saluer « leur » président en dehors du centre. Jackie se tourne vers la gauche pour répondre aux applaudissements.
    Sur la droite, un petit garçon de cinq ans lève la main pour saluer le président. John F. Kennedy lui sourit – et lève aussi la main, pour lui répondre.
    Il est exactement 12 h 30.
     
    Abraham Zapruder est, à Dallas, propriétaire du magasin de mode « Jennifer Junior ». Ce matin-là, il s’est exceptionnellement accordé une heure de vacances. Ce n’est pas tous les jours que l’on peut considérer, de ses yeux, le président des États-Unis d’Amérique. Le magasin n’est pas situé bien loin du trajet que doit suivre le cortège. Peu avant 12 h 30, Zapruder, armé de sa caméra 8 mm, a gagné Elm Street et s’est posté devant la porte du Texas Book Depository Building .
    Précisément, le préposé à la surveillance du Texas Book , Roy S. Truly, se tient devant la porte de cette entreprise. De là, on domine le carrefour Houston Street-Elm Street. Zapruder connaît bien Truly. La conversation s’engage. Un sens rigoureux de l’économie gouverne toutes les actions d’Abraham. Il confie à Truly qu’il veut gaspiller le moins de film possible :
    — Le Kodachrome me coûte cher, quatre dollars pour vingt-cinq pieds, et puis il faut sans cesse recharger ma caméra : Kennedy me filera sous les yeux.
    Il quitte Truly pour chercher un angle de prise de vues plus favorable. Il le découvre, environ vingt mètres plus loin, en grimpant « sur une plate-forme, devant une petite arcade qui domine la pelouse descendant vers Elm Street ». Il se trouve alors à égale distance du carrefour et du viaduc. Devant lui, il ne voit que « quelques curieux assis sur la pelouse verte, comme pour un pique-nique ». Satisfait, Zapruder attend.
    À midi trente minutes et quelque secondes, la voiture du président s’encadre dans l’objectif Zoomar du tailleur-cinéaste. Aussitôt, Abe presse sur le déclic de sa caméra. Ce faisant, il entre dans l’histoire. En quelques jours, le nom d’Abraham Zapruder va conquérir la célébrité, comme celui de l’homme qui aura filmé l’assassinat de John F. Kennedy.
     
    La Lincoln roule à 17,5 km à l’heure. Elle passe sous un grand arbre. Zapruder fait pivoter sa caméra, lentement, vers la droite – l’un de ces « travellings » que les cinéastes amateurs s’enorgueillissent de bien réussir. Obstacle imprévu : un panneau de signalisation s’interpose soudain entre la Lincoln bleue et l’objectif

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