C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
sur cette attitude extraordinaire – même questionnée par Manchester –, il est plus que probable que ce « quelque chose » qu’elle cherche à atteindre n’est autre qu’un fragment de la boîte crânienne de son mari. L’accélération brusque de la voiture la déséquilibre. Clint accomplit un suprême effort pour se hisser sur la voiture. Jackie l’aperçoit, lui tend le bras qu’il empoigne. Il saute sur le marchepied, repousse Jackie. « Il est impossible de dire lequel a sauvé l’autre », signale à juste titre Manchester. « Je la forçai à se rasseoir sur la banquette arrière, dira Hill, puis je me hissai au sommet de la banquette arrière et m’y allongeai. » De la voiture d’escorte, David Powers a assisté à toute la scène. Il a déclaré que « Mrs Kennedy serait vraisemblablement tombée de voiture par l’arrière et se serait tuée si Hill ne l’avait pas repoussée à l’intérieur de la limousine ». On lit dans le Rapport Warren : « Mrs Kennedy ne s’est pas souvenue avoir escaladé l’arrière de la voiture. »
La voiture présidentielle fonce dans le tunnel du viaduc, en sort à cent à l’heure, s’engage sur l’autoroute, vers l’hôpital Parkland.
Le film tourné par Abe Zapruder prouve que la tragédie s’est déroulée en seize secondes. Seize secondes !
Sur le lieu de l’attentat, c’est une « confusion totale ». Un témoin voit des spectateurs « couchés sur l’herbe en bordure de la route ». D’autres courent en criant. « Des agents brandissent leurs armes. » Les Noirs paraissent saisis de terreur. Ils s’imaginent que « des extrémistes de droite ont décidé de massacrer tous les leurs et que l’on tire sur eux du haut des fenêtres ». Des pères « se jettent sur leurs enfants qu’ils ont étendus sur le gazon ». Un de ces Noirs, John Draster, hurle :
— Lynch, they lynch us !
Un cri, dans la foule :
— L’assassin est arrêté !
Des policiers entourent en effet un jeune homme blond.
Un journaliste, Douglas Kiker, court en brandissant sa carte de presse. Il rencontre une autre journaliste, Marianne Means, en pleurs. Il existe entre elle et le président une intimité si grande que l’on en jase. On raconte même que, si Jackie a tenu à accompagner son mari au Texas, c’est parce qu’elle a appris que Marianne Means serait du voyage… De grosses larmes coulent sur les joues de la jeune femme :
— Il est arrivé quelque chose à Jack, c’est affreux ! Mon Dieu, ayez pitié !
Sur les soixante policiers du Secret Service , plus de la moitié est restée sur les lieux du drame. Ils écartent « énergiquement tout le monde de leur chemin, ils braquent leurs mitraillettes vers le ciel ». Nerin E. Gun témoigne : « Leur désarroi faisait peine à voir. Depuis soixante ans, dans ce corps spécialisé, on exécutait régulièrement des manœuvres pour préparer les hommes à ce qu’il fallait faire en cas d’attentat. Devant la nécessité d’agir, ils s’étaient trouvés désemparés comme des enfants brusquement égarés dans la foule, loin de leurs parents. » Remarque aigre-amère de Gun : « Le Secret Service , qui fait preuve d’une telle autorité quand il s’agit d’intimider les journalistes, garde une très grande part de responsabilité dans cette affreuse tragédie. »
Peu à peu, le calme revient sur Elm Street. Les gens se concertent. Le jeune homme blond s’est justifié. Où est l’assassin ? D’où a-t-on tiré ?
Avant John Kennedy, trois présidents des États-Unis ont été assassinés durant leur mandat : en 1865, Abraham Lincoln ; en 1881, James Garfield ; en 1901, William McKinley. Leur mort a, chaque fois, fait grand bruit et suscité une profonde émotion. La différence fondamentale avec le meurtre de John Kennedy est qu’à l’époque où ils vivaient il n’existait ni radio ni télévision (148) .
Dès l’instant où la première dépêche sur l’assassinat de John Kennedy a été envoyée sur les ondes, les rumeurs ont commencé à se répandre. Parfois fondées, souvent invraisemblables, parfois folles. Elles n’ont fait que s’amplifier au cours des jours suivants. Estimant qu’elles étaient préjudiciables à l’image que doit donner de lui-même un pays bien gouverné, doté d’une bonne justice et d’une police efficace, la Chambre des représentants et le Sénat ont bientôt souhaité que se réunisse une
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