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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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République populaire hongroise et l’URSS, des négociations concernant, entre autres choses, le retrait des forces stationnées en Hongrie… Je suis convaincu que les relations hungaro-soviétiques, édifiées sur cette base, apporteront des fondations solides à une amitié sincère et véritable entre nos peuples.
    Quelle que soit son immense bonne volonté, le Vieux se découvre en décalage avec l’insurrection. Ce qu’exige le peuple hongrois, un tract partout répandu l’exprime clairement : « Nous voulons un gouvernement national où seront représentés les leaders de la jeunesse insurrectionnelle ! Nous voulons la résiliation du pacte de Varsovie et, bien sûr, le retrait immédiat et pacifique des troupes soviétiques de notre territoire national ! »
    Ce retrait, certes, Nagy l’a annoncé. De là à répudier le pacte de Varsovie, il y a un pas immense qu’il se refusera d’abord à franchir. Il sait à quel point les Soviétiques accordent la priorité à leur système de défense. Dans le climat du « dégel », Nagy sent que l’on peut obtenir beaucoup des Soviétiques mais assurément rien qui puisse paraître, à leurs yeux, compromettre leurs positions stratégiques.
    Dans ces conditions, va-t-on vers une catastrophe ?
     
    Il faudra du temps pour connaître la raison de l’étrange silence soudain descendu sur Budapest. Si les chars soviétiques ont cessé de tirer, c’est sur l’ordre direct de Khrouchtchev qui, faute d’autre moyen, a décidé de venir à bout de la révolution hongroise par la séduction ! Partout dans la ville, non seulement les Russes se glissent hors des tourelles de leurs chars mais ils engagent avec les insurgés d’imprévisibles dialogues. Certains nous ont été conservés :
    Un insurgé  : « Nos ennemis, ce sont les AVH de la clique Rakosi et Gerö. Ils ont déjà tiré sur nous et sur vous. Pourquoi les soutenir ? »
    Un Soviétique  : « Vous avez raison, il faut vous défendre. On va même vous aider ! »
    Ceux qui ont vécu cette fraternisation entre les habitants de Budapest et les occupants soviétiques s’en souviendront toute leur vie. Les archives cinématographiques garderont la trace irréfutable des chars russes escortés par une foule béate et pacifique, et sur lesquels, brandissant leurs drapeaux nationaux, s’accrochent des grappes d’insurgés en armes réclamant à grands cris le limogeage de Gerö. Or c’est chose faite.
    Les chars se sont arrêtés sur la place du Parlement. On voit Soviétiques et Hongrois coude à coude, détendus, heureux, parlant et plaisantant ensemble. Du haut des toits du palais officiel où ils sont postés depuis le début des « incidents », des hommes de l’AVH considèrent avec stupeur ce qui se déroule sous leurs yeux et qui représente pour eux une abominable hérésie. Cela va au-delà de ce que peuvent tolérer ces policiers staliniens. Ils ouvrent le feu, au hasard, sur cette foule offerte, frappant aussi bien leurs compatriotes que les Soviétiques. Fous furieux, les Russes ripostent et, ne sachant où donner de la tête, tirent dans tous les sens.
    Résultat : six cents morts.
     
    Dans ce que l’on appellera bientôt la révolution de Budapest, une page vient d’être tournée. Les insurgés disent qu’ils sont tombés dans un piège. Les Russes le croient aussi. Une heure avant, ils riaient ensemble. Maintenant, de part et d’autre, on compte les morts.
    Ce soir-là, cette révolution commence à s’étendre à la province. À Debreczen, la troisième ville du pays, un comité « socialiste révolutionnaire » désarme l’AVH et s’empare du pouvoir. À Gyor, grand centre industriel, dix mille personnes manifestent en faveur de la libération des prisonniers politiques. Ailleurs, on forme des « conseils révolutionnaires ». Les villages annoncent la dissolution des kolkhozes et les paysans prennent le chemin de la capitale pour y conduire des camions pleins de vivres. « Jamais, depuis onze ans, dira Tibor Meray, Budapest n’a été aussi bien approvisionnée en vivres que durant ces journées. »
    Voilà peut-être le fait nouveau essentiel de la révolution hongroise de 1956 : ces conseils révolutionnaires qui, à partir du 24 octobre, se créent partout, dans les villages, les villes, les cantons. Souvent, pour assurer leur pouvoir, ils ont dû livrer des combats acharnés contre l’AVH. Des régions entières passent sous leur autorité. Ils

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