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Chasse au loup

Chasse au loup

Titel: Chasse au loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Armand Cabasson
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monture de Pagin et celui-ci sauta en croupe. De nouvelles détonations crépitèrent. Elles provenaient de tous les côtés et se mêlaient à leurs échos, si bien que les Français avaient l’impression d’être pris sous un déluge de balles.
    — Ils nous encerclent ! cria Lefine, tassé sur lui-même avec Pagin agrippé à sa taille.
    Les cavaliers s’engouffrèrent dans la forêt, martelant des talons les flancs de leurs chevaux. Les obstacles les ralentissaient. Margont crut apercevoir quelqu’un et donna un coup de pistolet dans un amas de fougères, sur sa gauche. En représailles, un coup de feu claqua sur sa droite et s’écrasa contre le tronc d’un pin, expédiant sur ses joues des gerbes de fragments d’écorce. Une pente légère aidait les chevaux. Margont, trop impatient, pressait sa jument. Celle-ci, effrayée et exaspérée, s’emmêla les pieds dans des branches mortes et se rattrapa en posant un sabot sur un tapis d’aiguilles desséchées. Le sabot glissa, la tête de la bête plongea et Margont faillit vider ses étriers et basculer en avant. Trois coups de feu crépitèrent encore, mais plus pour la forme que pour tuer. Les Français s’étaient suffisamment éloignés. Relmyer salua Lefine comme si celui-ci arborait des épaulettes de colonel.
    — Sans vous, avec leurs maudits signaux, ils auraient parfait leur nasse et aucun de nous n’en aurait réchappé. Voulez-vous être incorporé dans les hussards ?
    — J’ai eu mon soûl de cette vie-là pour aujourd’hui, mon lieutenant.
    Les chevaux continuaient à dévaler la pente d’un trot pressé que les fourrés et les arbres ralentissaient constamment. Margont entendait à peine les Autrichiens clamer quelque chose.
    — Ils appellent des renforts ?
    Relmyer sourit.
    — Non. Ils disent : Bienvenue en Autriche.

 
    CHAPITRE VII
    Lefïne était furieux. Il allait et venait sous le toit de branchages aménagé par Saber et Piquebois, près de leur tente.
    — Les partisans ont failli nous trouer la peau !
    C’était bien la dixième fois qu’il répétait cette phrase, comme si celle-ci était devenue une limite indépassable.
    — Cette enquête, c’est sa guerre, pas la nôtre ! s’exclama-t-il, là encore pour la énième fois.
    Margont était adossé à un tronc. Quel miracle d’être officier : l’île de Lobau se transformait à toute allure en une ville-bastion, mais, lui, il avait la chance d’avoir du temps libre ! Lefine était couvert de sueur.
    — Enfin, pourquoi voulez-vous vous mêler de cette affaire ? C’est pour cette Autrichienne ? Cette Luise Mitter quelque chose... Pourquoi aller s’amouracher d’une belle qui a des problèmes quand on peut en câliner deux qui ont le coeur léger ? Ah, ce n’est pas que pour elle. Ce sont encore les magnifiques idées de la Révolution qui sèment la zizanie dans votre tête !
    Il ôta sa chemise pour en changer. Son épaule gauche portait la cicatrice d’un coup de sabre : souvenir espagnol d’un dragon léger anglais. Une estafilade barrait son ventre : attaque à la baïonnette mal parée.
    Un coup de crosse prussien avait fracassé sa clavicule droite. L’os s’était consolidé dans une posture vicieuse, si bien qu’une arête osseuse anormale saillait, mettant la peau sous tension comme si elle voulait jaillir hors de ce corps. Un semis de brûlures tapissait son dos, traces de projections incandescentes dues à l’explosion d’un caisson à munitions. La saga de l’Empire se lisait sur la peau couturée des soldats.
    — Être un Bon Samaritain, ce n’est pas une qualité, mais une tare.
    Il enfila sa nouvelle chemise avec tant de colère qu’il faillit la déchirer. Margont se rafraîchissait en s’éventant avec un livre. Décidément, la littérature était pleine de ressources.
    — Ce n’est pas cela. Ce n’est pas que cela.
    — Mais si, c’est toujours cela ! « Il faut apporter les idéaux de la Révolution aux autres peuples ! », « À bas les monarchies, vive la Liberté ! » Je les connais, vos chansons. Vous êtes un fruit de la Révolution, mais l’arbre est en train de mourir. Nous avons tous été naïfs ! Parce que moi aussi, j’y ai cru : liberté et égalité pour tous, la paix, le progrès, une Constitution garantissant les mêmes droits à chacun... Ce sont des utopies et vous, vous vous battez encore pour elles ! Cette armée est emplie de soldats qui veulent libérer le monde. Cela

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