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Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Titel: Christophe Colomb : le voyageur de l'infini Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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Luis de La Cerda et Antonio de Marchena.
C’était peut-être une nouvelle épreuve que lui imposait le custode et il
espérait avoir devancé tous ses désirs.
    Juan Perez avait retrouvé avec plaisir un autre visiteur, ce
Génois qui lui avait fait si forte impression à leur première rencontre. Il
l’aperçut au loin, vêtu d’un bon pourpoint et de chausses de laine, en pleine
conversation avec Antonio de Marchena et le comte de Medina Celi. Ils avaient
tous le sourire aux lèvres et paraissaient discuter comme s’ils étaient de
vieux amis. Le prieur se signa. Ses oraisons avaient été exaucées. Cristobal ne
quitterait pas la Castille et laisserait donc en pension à la Rabida son fils,
Diego, ainsi qu’il en avait exprimé le projet. Le gamin était intelligent et le
moine se faisait fort de le préparer à la vie religieuse. Elle lui procurerait
infiniment plus de bonheur et de stabilité que l’existence d’errant dont son
père semblait se contenter.
     
    Quand Cristobal vint le voir en fin de journée, Juan Perez
se garda bien de l’interroger directement. Il le savait économe de ses paroles
et très prudent, comme s’il possédait de lourds secrets. Cette fois, le Génois,
qui donnait l’impression d’avoir forcé sur le vin, se montra plutôt loquace. Il
expliqua à son interlocuteur que, grâce à l’intervention d’Antonio de Marchena,
le comte de Medina Celi lui octroyait une pension mensuelle et s’était engagé à
parler de son fameux projet aux souverains lorsqu’ils viendraient faire leurs
pâques à Cordoue. Il ne doutait pas un seul instant que Ferdinand d’Aragon et
Isabelle de Castille lui ordonneraient de se mettre à leur service et de prendre
le commandement de la flotte que le comte se proposait de réunir et d’envoyer à
Cypango.
    Juan Perez sourit :
    — Cypango, vous n’avez que ce mot à la bouche. On en
viendrait à penser qu’il s’agit d’une formule magique. Prenez-y garde, cela
risque de vous coûter fort cher si l’on vous soupçonne de sorcellerie.
    — Ce qu’à Dieu ne plaise. Bon Chrétien je suis, bon
Chrétien je reste. La preuve en est que je vous confie ce que j’ai de plus
précieux au monde, mon fils Diego. Faites en sorte de lui donner une solide
éducation, celle que je n’ai pas eu le bonheur de recevoir.
    — Nous en ferons un bon moine.
    — Tout doux, l’abbé, je vous vois venir. Si mon
entreprise réussit, l’homme que vous avez devant vous sera fait chevalier. À ce
moment-là, j’aurai sans doute pour Diego d’autres projets. Il servira mieux
l’Église à la cour que dans une cellule de ce monastère.
    — Merci de ce compliment, je vous croyais moins ingrat.
    — Frère Perez, j’aurais mauvaise grâce à me moquer de
vous et à ne pas vous manifester par avance ma gratitude pour toutes vos bontés
passées, présentes et à venir. Il est certaines choses toutefois dont je ne
puis encore faire état qui risquent de changer du tout au tout la carrière de
mon fils. Sachez que j’ai tant de raisons d’espérer que j’ai décidé de
consacrer la modeste pension que me versera le comte de Medina Celi à payer les
soins que vous prendrez d’un autre Diego, le fils de mon ami Don Rodrigo, afin
qu’il soit éduqué en même temps que mon Diego. Ne dites rien de tout cela à son
père, orgueilleux comme il est, il risquerait de prendre la mouche et de
s’estimer offensé.
    — Ne prenez aucun engagement que vous ne pourrez tenir.
Mais j’en ferai ainsi que vous me le dites. Vous êtes, messire Cristobal, un
diable d’homme. Vous obligez les gens et les choses à se plier à votre volonté.
Espérons que vous y réussirez une fois de plus.
     
    *
     
    Depuis plusieurs jours, Cristobal ne tenait littéralement
plus en place. Il arpentait la vaste pièce qui lui tenait lieu de salle de
travail, de long en large. Tantôt, il se lançait dans une tirade, vérifiant que
sa voix portait bien, tantôt, il s’exerçait à faire des courbettes et à marcher
à reculons en prenant bien garde de ne pas choir. De temps à autre, il appelait
Beatriz pour lui demander de faire une ultime retouche au pourpoint qu’il avait
commandé au meilleur tailleur de la ville. Ce dernier, excédé par ses
récriminations et ses incessantes requêtes, avait fini par lui interdire
l’accès de sa boutique. Plus jamais il n’accepterait pareil client dans sa pratique,
un étranger aussi capricieux et exigeant qu’une vieille femme et qui

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