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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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colonels marquèrent leur satisfaction par une boutade ironique   :
    —  Ils sont venus trop tôt, qu’ils attendent.
    Le manque de sommeil m’avait rendu très irritable. Je déclarai que, pour ma part, je n’étais pas d’humeur à les recevoir   ; j’aimais les hommes qui s’accrochaient avec courage à leurs opinions. M’efforçant de chasser les sénateurs de mon esprit, je poursuivis mon petit déjeuner. Mais Hérode, qui semblait se trouver partout à la fois en ces journées mouvementées leur sauva la vie. Les Germains, ivres et d’humeur querelleuse, armés de leurs javelots étaient sur le point de les transpercer, ils étaient à genoux, criant grâce. Les gardes n’avaient pas même fait mine d’intervenir. Hérode dut invoquer mon nom pour ramener les Germains à la raison. Dès qu’il eut mis les sénateurs, sauvés de justesse, en lieu sûr il arriva dans la salle où je prenais mon petit déjeuner et déclara d’un ton ironique   :
    —  Excuse-moi, César, mais quand je t’ai conseillé de mater le Sénat, je ne pensais pas que tu prendrais mes propos à ce point au sérieux. Tu devrais traiter ces malheureux avec un peu plus de douceur. S’il leur arrive malheur, où trouveras-tu une autre équipe aussi merveilleusement servile   ?
    Il devenait de plus en plus difficile pour moi de sauvegarder mes convictions républicaines. Quelle situation burlesque, moi, le seul véritable anti-monarchiste, contraint de me conduire comme un monarque   ! Sur les conseils d’Hérode, je convoquai le Sénat au palais. Les officiers ne firent aucune difficulté pour me laisser quitter le camp. La division des gardes au complet m’escorta, neuf bataillons marchant devant moi et trois derrière, suivis par le reste de mes troupes, la Garde du palais tenant l’avant-garde. Là-dessus se produisit un incident des plus embarrassants. Cassius et le Tigre, ayant fini leur petit déjeuner, se joignirent au défilé et prirent la tête de la Garde du palais, avec Lupus entre eux. J’ignorais tout de cette initiative, l’avant-garde était loin devant moi et hors de vue de ma litière. Les hommes de la Garde, habitués à obéir à Cassius et au Tigre, en conclurent qu’ils agissaient sur les ordres de Rufrius, le nouveau commandant des gardes, alors qu’en vérité Rufrius avait signifié par écrit à ces deux officiers qu’ils étaient destitués de leur commandement. Les spectateurs furent mystifiés et lorsqu’ils comprirent que ces imposteurs enfreignaient délibérément les ordres reçus, ils menèrent grand tapage. L’un des protecteurs du peuple courant tout au long de la colonne vint m’informer de la situation. Je ne savais que dire ou que faire. Du moins cette provocation ne pouvait-elle rester impunie   ; Cassius et le Tigre défiaient non seulement les ordres de Rufrius mais aussi mon autorité.
    Comme nous parvenions au palais, je demandai à Hérode, à Vitellius, à Rufrius et à Messaline (qui m’accueillit avec des transports de joie) de discuter sur-le-champ avec moi de la marche à suivre. Les soldats furent alignés devant le palais, toujours flanqués de Cassius, Lupus et du Tigre qui parlaient entre eux avec assurance, mais qu’évitaient tous les autres officiers. J’ouvris la séance en déclarant qu’en dépit de mes liens de parenté avec Caligula (mon neveu) et des promesses faites à son père, mon cher frère Germanicus, de veiller sur lui et de le protéger, je ne pouvais me résoudre à reprocher à Cassius son assassinat. Caligula avait appelé sur lui la mort violente de mille façons. Je déclarai également que Cassius avait des états de service inégalés dans l’Armée, et que si je pouvais être sûr que ses motifs, en frappant, avaient été aussi nobles que ceux du second Brutus, je lui aurais volontiers pardonné. Mais quels avaient été ses véritables mobiles   ?
    Rufrius le premier prit la parole   :
    —  Cassius dit maintenant qu’il a frappé au nom de la Liberté, mais en vérité, ce qui l’a encouragé à frapper, c’était une insulte à sa propre dignité, Caligula passait son temps à le taquiner en lui donnant des mots de passe ridicules et indécents.
    —  Et s’il avait été mû par le ressentiment, il serait encore excusable intervint Vitellius, mais le meurtre a été comploté des jours et même des mois à l’avance. Il a été commis de sang-froid.
    —  Oublies-tu, dit Messaline, qu’il n’a pas commis un

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