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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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faire fouiller les femmes ne me plaisait guère, mais Messaline insista et je consentis à condition que la fouille fût exécutée par ses affranchies et non par mes soldats. Messaline insista encore pour que des factionnaires en armes assistent aux banquets. Du temps d’Auguste, cette pratique aurait été considérée comme des plus despotiques, et j’avais honte de voir ces soldats alignés le long des murs   ; mais je ne pouvais prendre aucun risque.
    Je déployai beaucoup de zèle pour rendre aux sénateurs le respect d’eux-mêmes. En choisissant de nouveaux représentants, Messaline et moi avions veillé à examiner aussi scrupuleusement leur situation de famille que leurs aptitudes personnelles. Comme si les plus anciens du Sénat en avaient eux-mêmes formulé la demande, alors qu’en réalité l’idée venait de moi, je promis de ne choisir que des citoyens romains d’ascendance mâle à quatre générations. Je tins cette promesse. La seule exception apparente fut celle de Félix, mon secrétaire aux Affaires étrangères, que j’eus l’occasion quelques années plus tard d’investir de la dignité de sénateur. C’était un jeune frère de mon affranchi Pallas, né après que leur père eut reçu sa liberté   ; il n’avait donc jamais été esclave, contrairement à Pallas. Mais je ne trahis pas pour autant ma promesse au Sénat   ; je demandai à un membre de la maison Claudia –  non pas un véritable Claude, mais un homme appartenant à une famille faisant partie des serviteurs des Claudes, originaire de Campanie auquel avaient été accordées la citoyenneté et l’autorisation de prendre le nom des Claudes  – d’adopter Félix comme son fils. Félix a donc maintenant, du moins en théorie, les quatre générations nécessaires derrière lui. Mais des murmures de jalousie s’élevèrent dans la salle lorsque je le présentai au Sénat. Quelqu’un déclara   :
    —  César, ces irrégularités n’avaient pas cours du temps de nos ancêtres.
    Je répliquai avec colère   :
    —  Je ne pense pas, Seigneur, que tu aies le droit de parler ainsi. Ta propre famille n’est pas d’une noblesse si ancienne, j’ai entendu dire que tes ancêtres vendaient des fagots dans les rues du temps de mon bisaïeul, et j’ai entendu dire aussi qu’ils trichaient sur le poids.
    —  C’est faux   ! hurla le sénateur. C’étaient d’honnêtes aubergistes.
    Un éclat de rire général le fit taire. Mais je me sentis obligé d’en dire plus.
    —  Lorsqu’il a été nommé censeur il y a plus de trois cents ans, mon ancêtre Claude l’Aveugle, vainqueur des Étrusques et des Samnites et le premier auteur romain distingué, admit les fils des affranchis au Sénat exactement comme je l’ai fait. De nombreux membres de cette confrérie doivent leur présence ici aujourd’hui à cette innovation de mon ancêtre. Leur plaît-il de donner leur démission   ?
    Le Sénat accueillit alors Félix chaleureusement.
    Il y avait de nombreux riches oisifs parmi les chevaliers –  comme il y en avait eu, en vérité, même du temps d’Auguste. Mais je ne suivis pas l’exemple d’Auguste en leur permettant de demeurer oisifs. J’annonçai que tout homme se dérobant à une charge publique qu’on l’invitait à assumer serait expulsé de l’Ordre. Pour trois ou quatre cas, je tins parole.
    Parmi les documents que j’avais prélevés au palais dans le coffre privé de Caligula je découvris ceux qui se référaient aux procès et à la mort, sous le règne de Tibère, de mes neveux Drusus et Néron, et de leur mère Agrippine. Caligula prétendait avoir tout brûlé au début de son règne, à titre de pardon, mais en vérité n’en avait rien fait, et les témoins à charge contre mes neveux et ma belle-sœur ainsi que les sénateurs qui avaient voté leur mort avaient vécu dans la constante terreur de sa vengeance. J’étudiai avec soin les papiers et convoquai tous les survivants parmi les hommes désignés pour avoir joué un rôle dans ces meurtres judiciaires. Le document concernant chacun d’entre eux lui fut lu en ma présence et remis ensuite en main propre pour qu’il le brûlât devant moi. Je pourrais mentionner ici les dossiers codés concernant la vie privée de certains notables et que Tibère avait pris à Livie après la mort d’Auguste mais sans réussir à les déchiffrer. J’y parvins, pour ma part, bien après, mais ils faisaient allusion à des événements

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