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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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prétendre qu’elle m’avait épousé par intérêt. J’étais ruiné à l’époque et quant à mon éventuelle accession au trône, elle ne l’avait à coup sûr jamais envisagée.
    Le port d’Ostie ne fut certes pas la seule de mes réussites dans le domaine de travaux publics. Les vers que me récita la sibylle de Cumes lorsque je lui rendis visite un jour, sous un déguisement, dix ans avant de devenir empereur, prophétisaient que je donnerais à Rome «   l’eau et le pain hivernal   ». Le pain hivernal était une référence à Ostie, mais l’eau désignait les deux grands aqueducs que je devais construire. Les prophéties sont choses curieuses. Qu’il en soit fait une par exemple, dans l’enfance, et l’on y prête sur le moment la plus grande attention, puis une sorte de brume paraît l’envelopper   ; elle vous sort alors totalement de l’esprit jusqu’au jour soudain où cette brume se dissipe et la prophétie se réalise. Ce fut seulement une fois mes aqueducs terminés et consacrés, et le port également achevé, que je me rappelai les vers de la sibylle. Sans doute pourtant n’avaient-ils cessé de rôder constamment au fond de mon esprit, comme chuchotés par un dieu qui m’incitait à entreprendre ces projets grandioses.
    Mes aqueducs étaient des plus nécessaires   ; la réserve en eau existante, bien que largement supérieure à celle de n’importe quelle autre cité au monde, était très insuffisante pour les besoins de Rome. Les Romains adorent l’eau fraîche. Rome est une ville de bains, de viviers et de fontaines. En vérité, bien que Rome fut maintenant desservi par sept aqueducs, les riches avaient réussi à détourner la majeure partie de l’eau publique pour leur usage personnel, étant autorisés à se brancher sur les canalisations principales –  leurs piscines avaient besoin d’une eau renouvelée chaque jour et il fallait arroser leurs vastes jardins  – si bien que la plupart des citoyens démunis en étaient réduits l’été à utiliser l’eau du Tibre pour boire et faire la cuisine, ce qui était fort malsain. Cocceius Nerva, ce vieil homme vertueux, que mon oncle Tibère gardait auprès de lui comme son bon génie, et qui finit par se suicider, –  ce Nerva, donc, que Tibère avait nommé inspecteur des Aqueducs, lui conseilla de montrer sa magnanimité en donnant à la cité une réserve d’eau digne de sa grandeur   ; et il lui rappela que son ancêtre Appius Claudius l’Aveugle avait gagné une gloire éternelle en amenant la voie Appienne jusqu’à Rome, sur une distance de huit milles, le long du premier aqueduc de la cité. Tibère entreprit de suivre les conseils de Nerva, mais ajourna les travaux, les remettant toujours selon son habitude, jusqu’à la mort de Nerva. Pris alors de remords, il envoya ses ingénieurs à la recherche de sources adéquates, correspondant aux règles établies par le célèbre Vitruve. De telles sources doivent présenter un débit abondant tout au long de l’année, leur eau doit être douce et limpide, ne pas entartrer les conduits   ; elles doivent en outre se situer à une hauteur telle que, suivant la pente convenable conférée à l’aqueduc, l’eau courante atteigne l’ultime réservoir à un niveau suffisant pour lui permettre d’atteindre, par le moyen des canalisations, les maisons les plus élevées de Rome. Les ingénieurs durent pousser leurs prospections assez loin dans la campagne. Dans les collines qui s’élèvent au sud-est de la cité, ils finirent par trouver deux sources abondantes fournissant une eau d’excellente qualité, appelées la Source Bleue et la Source Curtienne. Elles jaillissaient dans la région de la trente-huitième borne sur la route de Subiaco et il était possible de les jumeler. Il y avait aussi le Nouvel Anio, une rivière que l’on pouvait capter à la quarante-deuxième borne sur la même route, mais de l’autre côté   ; ses eaux seraient acheminées par un deuxième aqueduc qui recueillerait au passage celles d’une autre rivière, l’Herculanien, en face de la Source Bleue. Les ingénieurs signalèrent que les eaux en provenance de ces sources remplissaient toutes les conditions requises et qu’on n’en trouverait nulle part plus près de la ville. Tibère avait fait établir des plans pour deux aqueducs et demandé des devis   ; mais il décida aussitôt qu’il n’avait pas les moyens d’entreprendre les travaux et mourut peu

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