Clio Kelly et l'éveil de la gardienne
sais-tu qu’elles sont là-bas ?
Morgan ne donna aucune réponse et, bien que son esprit soit encore embrumé, il sortit de la pièce en quatrième vitesse, attrapa une serviette qui reposait sur l’un des brancards et entreprit de se sécher à la va-vite tout en espérant qu’ils arriveraient à temps…
Les chaînes lui meurtrissaient la peau mais Clio ne s’en souciait guère. Les yeux perdus dans le vague, le corps engourdi par le froid, elle ne parvenait pas à comprendre comment elle avait pu se faire avoir de la sorte !
Bien que ses mouvements fussent restreints, elle essaya de toucher le serpent qui ornait son cou mais il restait inaccessible. Un faible gémissement l’arracha à ses tentatives ; à son grand soulagement, sa compagne reprenait conscience.
Elle battit plusieurs fois des paupières afin de s’habituer aux ténèbres qui l’entouraient.
Le cœur de la gardienne s’emballa sous l’inquiétude.
— Je suis là, Alex, murmura Clio autant pour la rassurer que pour elle-même.
— Où sommes-nous ?
— Je ne sais pas, certainement au fond de la grotte. Nous avons finalement découvert l’antre de la Bête, malheureusement, ils nous attendaient…
— Ils ? Que veux-tu dire par « ils » ?
Clio n’eut pas le temps de répondre car la porte de leur prison s’ouvrit.
— Ah ! Je vois que vous êtes enfin réveillées ! s’exclama une voix féminine.
La silhouette se dessina à contre-jour. Alexia dut plisser les yeux pour reconnaître cette femme aux cheveux coupés courts, de la même couleur que la mousse qui poussait sur les pierres glacées.
— C’était donc toi qui aidais Anthony et la Bête, dit Clio avec froideur.
— Anthony ? s’écria Anaïs tandis qu’elle s’approchait de Clio. Anthony n’a rien à voir avec cette histoire ; lui et l’autre idiot me servaient simplement à me tenir au courant des informations que la police ne dévoilait pas.
— Mais alors, qui est l’homme que j’ai vu avec la Bête ? demanda Clio avec une surprise non feinte.
Anaïs émit un petit rire de gorge, ses iris brillaient sous l’effet de la démence. Elle claqua des doigts et une forme sombre apparut derrière elle. Clio comprit aussitôt son erreur : l’homme qui se trouvait au côté de la serveuse présentait en effet une vague ressemblance avec Anthony, mais ses yeux étaient les mêmes que ceux d’Anaïs. Contrairement à sa parente, ses prunelles étaient vides de toute folie, on pouvait y lire la crainte et la terreur. D’une main tremblante, il saisit les doigts que lui tendait sa compagne et les porta à ses lèvres.
— Voici mon jeune frère, Jean-François.
— Mais pourquoi faites-vous ça ? demanda Alexia qui ouvrait la bouche pour la première fois depuis que le couple de geôliers était entré dans leur prison.
— Pour recouvrer notre rang ! s’écria Anaïs d’une voix forte. En échange de notre aide, notre maître nous redonnera le pouvoir et les honneurs qui nous sont dus ! Nous devons lui amener celle qui doit être retrouvée !
— Rousset n’est donc qu’un nom d’emprunt, dit avec calme Alexia.
— Oui et non ! Rousset était le nom de jeune fille de notre mère, expliqua Anaïs. Nous sommes les descendants des Chastel et des Morangès !
— Bien sûr, répondit Clio. Le suspect des premiers meurtres, le fils Morangès, était un vrai coureur de jupons ! Pas étonnant qu’il ait courtisé l’une des filles Chastel, lui ait fait un enfant et l’ait abandonné. Enfin… un bâtard, comme on les appelait autrefois…
Poussant un cri, Jean-François se précipita sur Clio et la frappa avec rage. Avec une force que les deux femmes enchaînées n’auraient pu imaginer, Anaïs tira son frère en arrière avec autant de facilité que s’il n’était pas plus lourd qu’un enfant.
— Non ! Elles doivent toutes les deux être en vie ! Le maître l'a ordonné ! Si nous lui livrons celle qui doit être trouvée, nous serons récompensés ! hurla-t-elle avec fureur à l’encontre de son frère qu’elle coinça contre le mur.
Jean-François se détendit aussitôt et se laissa glisser sur le sol. Il serra ses genoux contre lui et se mit à se balancer d’avant en arrière. Sa sœur s’agenouilla à ses côtés et le prit dans ses bras, lui parlant avec douceur. Lorsque Jean-François posa sa tête sur l’épaule d’Anaïs, celle-ci regarda Clio.
— C’est… la… la brune qui faut ! La blonde…
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