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Comment vivaient nos ancêtres

Comment vivaient nos ancêtres

Titel: Comment vivaient nos ancêtres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Louis Beaucarnot
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l’enfant à vivre d’une manière exemplaire, qui le mena tout droit à la canonisation.
    Bonaventure canonisé, il fallut lui trouver une petite place dans le calendrier de l’Église romaine, une petite place où l’on pourrait chaque année penser à lui. On lui octroya le 14 juillet. À Lyon on lui confia les enfants, à Liège les portefaix et ailleurs d’autres coiporations. Saint Bonaventure s’en trouva fort bien et vit longtemps en toute quiétude l’éternité égrener ses siècles. Il avait fermé les yeux, quelques années durant, lorsque l’on avait pris fantaisie, en France, de célébrer la prise de la Bastille. Mais Napoléon, passant par là, puis les Bourbons avaient mis bon ordre à tout ça et personne n’en parlait plus guère.
    Lorsque la III e République atteint son âge de raison, l’instauration d’une fête nationale s’impose. Le choix d’une date fait couler encre et salive. Les uns reparlent du 14 juillet, les autres réclament le 4 août, en référence à la fameuse nuit, préférant célébrer une journée de réconciliation plutôt qu’un soulèvement populaire. Mais Raspail se bat si vigoureusement que les premiers l’emportent et la loi du 21 mai 1880 relègue définitivement le malheureux Bonaventure aux oubliettes. La République le remplace, sous le nom de Marianne, en souvenir du nom d’une société politique secrète naguère destinée à renverser Napoléon ni et l’Empire.
    Mais Marianne, qui n’a pas encore les traits de Brigitte Bardot ou d’Évelyne Thomas, se heurte d’emblée à des difficultés. Si elle n’a guère eu de mal à éliminer Bonaventure, elle doit en effet en découdre avec deux rivales.
    La première est le 15 août, fête de l’Assomption de la Vierge Marie. Pour beaucoup de paroisses de France, placées sous le vocable de Notre-Dame, c’est le jour de la fête patronale. S’y greffent des pèlerinages liés à diverses sources réputées miraculeuses et associées mythologiquement à la Vierge. Un peu partout ce jour est occasion de processions solennelles. L’Église célèbre la mère de Jésus avec autant de faste que de foi. La France, sa « fille aînée », est officiellement sous la protection de Marie depuis que Louis XIII l’a invoquée à Apt en 1638 pour avoir un fils et que la prière a été exaucée dès l’année suivante avec la naissance de Louis XIV. Sous l’Ancien Régime donc, le 15 août faisait figure de fête nationale avant le mot et, un siècle après, sa célébration reste réelle un mois après la date choisie par Raspail.
    Un mois plus tôt, Marianne a une autre rivale : la Fête-Dieu. Vieille de six siècles, elle s’est doublée, au XVII e siècle, du culte de l’Adoration perpétuelle. À l’apogée du printemps, elle engendre facilement, dans les rues des villes et des villages, des spectacles féeriques. Nos ancêtres répandent par les rues de véritables tapis de pétales de fleurs et de rose et pavoisent leurs maisons. Ils tendent des draps sur les façades en les agrémentant de bouquets de fleurs des champs blanches, roses, jaunes, rouges ou bleues. L’après-midi voit le défilé souvent énorme d’une procession transportant sous un dais l’ostensoir éclatant de tous ses ors, précédé des enfants portant des bannières, du clergé, du chœur des vierges de la paroisse, et suivi par l’assemblée paroissiale tout entière et endimanchée, et des notables en grande tenue. Dans certaines villes, comme à Aix-en-Provence, au XVII e siècle, la fête dure deux jours avec des représentations de mystères religieux, et pendant toutes ces réjouissances chacun se glorifie d’avoir la maison la mieux décorée de sa rue ou les bouquets les plus gros et les plus beaux.
    Nul doute alors que le 14 juillet, s’il veut s’imposer, ne doive suivre leur exemple. Les premières célébrations sont tout à fait typiques et outrancières. Chaque mairie qui a pu s’offrir un buste de Marianne l’expose à sa fenêtre, drapé de tricolore et entouré de faisceaux de drapeaux. À Andernos, en Gironde, on organise même des processions théâtrales où une Marianne flambant neuve est portée triomphalement par les enfants dans les rues de la ville.
    La fête de la République fait encore peur aux conservateurs ? Pour les rallier à sa cause, on décide de lui adjoindre une fête militaire, avec, pour « clou », un superbe défilé comme le général Boulanger sait en organiser un

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