Comment vivaient nos ancêtres
parrain et de la marraine. La logique de ce système poussée jusqu’au bout interdit donc tout mariage entre le parrain et la marraine d’un même enfant, entre le parrain et la mère de son filleul, entre le parrain et sa filleule, etc.
C’est dans ce contexte que notre homme doit trouver une épouse ; or, s’il veut respecter les bonnes habitudes de se marier « ni trop loin ni trop près », autrement dit ni avec une étrangère ni avec une proche parente, il risque fort de rester célibataire. Heureusement, l’Église accorde assez facilement une dispense moyennant quelque menue obole, surtout pour les degrés éloignés. Le cure défend la cause auprès de l’évêque en invoquant l’étroitesse du lieu, l’âge avancé de la fille, ou encore l’intérêt des familles et le fait que le mariage sollicité permettrait, en ramenant un pré ou un puits dans la corbeille de la belle, de rétablir une paix rompue depuis plusieurs générations dans un même hameau.
Pourquoi dit-on cousins « germains » ?
Il n’y a pas en fait que les cousins qui peuvent se voir qualifier de « germains » et l’on parle tout aussi bien de frères « germains » et de sœurs « germaines ». Qu’entend-on par là ?
Le mot n’a rien à voir avec l’ancien peuple des Germains, habitants de la Germanie, désignés ainsi à l’origine par les Romains, d’après un mot latin signifiant « primitif ».
Il n’a rien à voir, non plus, avec nos prénoms Germain et Germaine, popularisés très tôt par saint Germain-l’Auxerrois, ainsi surnommé d’après sa cité d’origine.
Le terme, en fait, vient plus simplement du mot « germe » et était presque un pléonasme, en ce qu’il désignait des frères et des sœurs (comme on trouve, en espagnol, ses équivalents hermano et hermana), en référence au même germe qui les avait fabriqués. Pas complètement un pléonasme, puisque permettant de différencier les cas de frères et sœurs ayant même père et même mère (justement dits « germain(e)s) » des demi-frères et demi-sœurs, nés seulement d’un même père ou d’une même mère.
Les premiers se sont vus nommer « consanguins » et les seconds « utérins », en témoignage des connaissances ou plutôt des ignorances anciennes, faisant penser que le père transmettait à lui seul la vie (le sang) et que la femme ne faisait que prêter son corps (via son utérus) comme réceptacle.
L’agrandissement du patrimoine foncier a évidemment longtemps été une des grandes préoccupations des paysans en matière de mariage, autant que le souci d’échapper au célibat et d’avoir une femme et des enfants pour aider à l’exploitation familiale. Dans chaque famille donc, les anciens mémorisent tous ces réseaux de parentés et d’alliances quand ils ne retiennent pas, comme dans certaines régions, toute une série d’informations sur les dots versées par telle ou telle famille à telle ou telle autre, afin de pouvoir, par de subtiles chaînes de mariages, récupérer celle versée à telle maison lors d’une union célébrée trois générations plus tôt. Ils savent où l’on peut se marier pour faire une union assortie comme ils savent encourager dans certains cas des « mariages en gendre » – épousailles d’une héritière chez qui l’on va s’installer pour y succéder aux parents. Souvent ils poussent aussi les jeunes à des mariages doubles. Le fait qu’un frère et une sœur épousent une sœur et un frère économise généralement la dot. Épouser la sœur de la femme de son frère permet de rester en pays de connaissance et semble en principe assurer la concorde entre les deux sœurs devenues belles-sœurs et fréquemment appelées à vivre sous le même toit.
Dans certaines régions ces traditions se maintiennent jusqu’à la fin du XIX e siècle tant elles se révèlent fortement ancrées dans les familles et dans les professions.
De tout temps, les règles des mariages princiers ont aussi imposé ces pratiques. Les exemples les plus frappants étant ceux de Louis XIV et Marie-Thérèse, qui étaient deux fois cousins germains et avaient les mêmes quatre grands-parents. Le précédent comte de Paris, dont les grands-parents étaient tous les quatre des petits-enfants de Louis-Philippe, avait épousé une descendante de ce même roi. Il en va souvent de même dans les familles nombreuses connues ou inconnues, pour lesquelles l’intérêt patrimonial
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