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Consolation pour un pécheur

Consolation pour un pécheur

Titel: Consolation pour un pécheur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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tranquillité.
    Un domestique sortit de la chambre à coucher avec un plateau chargé de mets et de boissons. Il le posa près des deux hommes et se retira.
    L’abbé de Sant Feliu était un homme plein d’astuce et un habile administrateur – ses talents lui avaient valu d’occuper les fonctions de procurateur de la province pendant que Ses Majestés étaient en guerre contre les Sardes –, et ce genre de mystification ne lui était pas étranger.
    — J’aurais suggéré une semaine ou deux à la campagne, Don Berenguer, dit l’abbé en s’asseyant en face de l’évêque. C’eût été plus convaincant.
    — Je suis peu disposé à quitter la ville en ce moment.
    — Cela se comprend, Votre Excellence. Et je pense que nous avons beaucoup de choses à discuter concernant la situation actuelle.
    — Je suis de votre avis. Mais y a-t-il quelque point particulier qui vous amène aujourd’hui ?
    — Votre médecin semble avoir déclenché une agitation soudaine au sein de ma cure, Don Berenguer.
    — Mon médecin ?
    — Hier matin, un jeune homme agréable et fort versé dans l’art de la ganterie m’a apporté une nouvelle paire de gants que je lui avais commandée. On m’a révélé qu’il était fiancé – ou sur le point de l’être – à la fille du médecin.
    — Vous parlez du jeune Daniel, le neveu d’Ephraïm.
    — Précisément. Ayant eu accès à l’abbaye, il a passé beaucoup de temps à discuter avec l’un de mes moines, à le questionner même. Cela a perturbé les autres et engendré pas mal de spéculations. C’est un désagrément de peu de conséquence, mais venait-il de votre part, Don Berenguer ?
    — Certainement pas, Don Vidal. Si j’avais souhaité parler à quelqu’un à l’abbaye, je serais allé vous trouver. Entre nous, c’est une chose fort simple à arranger. Je vais m’en occuper.
    — Merci. Je suis plus inquiet pour le jeune frère Joaquim. Il a besoin, peut-être plus que les autres, d’être tenu à l’écart du monde.
    — Inquiet, dites-vous ?
    — Après que vous me l’avez adressé, son corps s’est remis assez vite, mais nous voyions bien que son âme était en proie au trouble. Beaucoup de choses étaient très floues dans son esprit, y compris l’endroit d’où il venait. Après de longues et patientes conversations, nous en avons déduit qu’il pouvait appartenir au monastère de Sant Llorenç, près de Baga. Ce nom lui évoquait quelque chose, contrairement à toutes les maisons dont nous avons pu lui parler, et il était évident qu’il venait des montagnes.
    « J’ai aussitôt écrit à l’abbé à son propos. Il s’est écoulé quelque temps avant que je ne reçoive une réponse.
    — Cela se comprend, fit remarquer Berenguer. Ce n’est pas tout près.
    — Avant que la réponse n’arrive, Joaquim a confié quelques bribes de son histoire à un frère qui avait gagné sa confiance, puis enfin à moi-même.
    — Cela m’intéresserait de l’entendre, avoua l’évêque.
    — Je serai aussi exact que possible, dit Don Vidal, mais je vous supplie de bien comprendre que c’est un jeune homme peu éduqué dont le maigre vocabulaire n’est pas toujours précis. Certains de mes propos seront plutôt ma propre interprétation. Son histoire a commencé au début du mois de novembre dernier à Taüll, dans la montagne. Un matin, bien avant le lever du soleil, il se tenait devant la petite église de Sant Climent et en contemplait la porte, profondément troublé. Je n’ai nul doute qu’il ressemblait à un cerf traqué qui entend les chiens se rapprocher de lui. Il est ainsi chaque fois qu’il est perturbé ou qu’il a peur. Quand il a posé la main sur le loquet, le métal a brûlé sa paume comme s’il sortait tout droit des forges de l’enfer, et il était convaincu que tout le village observait son étrange comportement. Je pense que les paysans étaient toujours couchés. Personne n’allait se lever avant l’aube pour voir ce pauvre Joaquim se mettre au travail. Par charité, le père Xavier lui donnait une pièce de temps en temps – probablement quand le tronc était bien rempli – pour balayer chaque jour l’église. Le sacristain était en effet trop vieux et trop perclus de douleurs pour effectuer la moindre corvée.
    « Balayer l’église, c’était en fait le seul travail qu’il avait, hormis garder les chèvres de sa mère, lesquelles pouvaient bien se garder toutes seules. Il a

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