Contes populaires de toutes les Bretagne
ornée de diamants. Féfé était abasourdi et se demandait bien ce qui
arrivait. Alors le seigneur lui dit :
— Féfé, je suis un roi puissant qu’un mauvais génie
avait condamné à finir ses jours à la porte de l’Enfer. Il m’avait donné à
Satan qui espérait que le désespoir lui livrerait mon âme. Mais j’ai résisté
tant que j’ai pu. Lorsque tu es arrivé au château, il y avait deux ans que je
souffrais ainsi. Satan espérait avoir également ton âme en endurcissant ton
cœur, mais tu es bon et tu es resté bon. Tu as eu pitié de moi. Or la pitié ne
peut pas rester à la porte de l’Enfer, voilà pourquoi nous avons pu nous
enfuir. Nous avons couru pendant neuf ans. Satan, qui voulait nous reprendre,
en a été empêché par tes prières. Maintenant je vais retourner dans mon
royaume. Je t’emmène avec moi et je te donnerai une de mes filles en mariage.
Ayant ainsi parlé, le roi frappa la terre de son pied, et
tous les seigneurs de la cour, toutes les belles dames aussi, apparurent. Ses
filles étaient là. Féfé choisit la plus belle de toutes, il l’épousa et fut
bien heureux avec elle.
Quévert près Dinan (Côtes-du-Nord).
Le début
de ce conte fait penser à la Saga de Koadalan que j’ai publié dans ma Tradition celtique
en Bretagne armoricaine , p. 169. Le reste du conte s’apparente aux Treize Grains de Blé
Noir et à
différents récits qui montrent la fuite du héros hors du château d’un magicien
ou d’un être féerique.
LE CORPS SANS Â ME
Il était une fois trois frères qui n’avaient pas de pain.
Ils en étaient réduits à s’en aller sur les routes pour essayer de trouver du
travail. Mais ils n’en trouvaient pas. Ils vivaient dans les bois, se
nourrissaient de fruits sauvages. Un jour, ils arrivèrent dans une grande forêt
et se dirent qu’ils pourraient devenir charbonniers. Ils abattirent des arbres
pour faire une grande fouée de charbon.
Quand elle fut faite et allumée, ils décidèrent entre eux
que chacun à son tour passerait la nuit à surveiller le feu pour éviter qu’il
ne s’éteignît. La première nuit, ce fut l’aîné qui se chargea de la
surveillance. Quelques instants avant minuit, il vit approcher un petit homme
qui lui dit :
— Que fais-tu là ?
— Tu le vois, je garde ma fouée.
— Alors fais bien attention à toi, dit le nain, car à
minuit, le Corps sans Âme va venir. C’est un géant qui se plaît à faire le mal
partout où il passe. Il voudra éteindre ta fouée. Mais n’aie pas peur de lui,
car en réalité il ne peut rien contre toi. Si tu ne te laisses pas effrayer et
si tu te défends avec courage, il ne te fera aucun mal et partira sans avoir
éteint ton feu.
Le petit homme disparut dans la forêt. Il faisait très
sombre et il n’y avait pas de lune. À minuit, l’aîné des frères entendit du
bruit à travers les arbres. C’était le Corps sans Âme. Il était aussi haut
qu’un chêne et il cria d’une voix à rendre sourd :
— Que fais-tu là, petit ver de terre, poussière de mes
mains ?
— Tu le vois, je garde ma fouée.
— Je vais l’éteindre. Va-t’en, ou tu t’en trouveras
mal !
L’aîné des frères prit un bâton et se prépara à combattre.
— Nous allons bien voir, dit-il.
Il se défendit si bien que le Corps sans Âme ne put parvenir
à éteindre son feu. Il s’en alla tout penaud à travers la forêt en faisant
craquer les branches autour de lui.
Au matin, les deux frères vinrent retrouver leur aîné et lui
demandèrent comment il avait passé la nuit. Comme il avait peur de les
effrayer, il ne leur dit rien au sujet du Corps sans Âme.
La nuit suivante, ce fut au tour du cadet d’être de garde.
Un peu avant minuit, il vit surgir le petit homme qui lui dit :
— Que fais-tu là ?
— Tu le vois, je garde ma fouée.
— Alors fais attention à toi, dit le petit homme, car à
minuit, le Corps sans Âme va venir pour t’effrayer et éteindre ton feu.
Garde-toi bien d’avoir peur et tiens-lui tête, car il ne peut rien contre toi
bien que ce soit un géant à l’aspect redoutable. Si tu n’as pas peur, il s’en
ira sans te faire de mal.
Le petit homme s’éloigna dans l’obscurité. Minuit venait de
sonner à l’horloge d’un lointain village quand le cadet entendit un grand bruit
de branches brisées. C’était le Corps sans Âme qui arrivait. Il était aussi
haut qu’un chêne et il cria d’une voix terrible :
— Que
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