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Contes populaires de toutes les Bretagne

Contes populaires de toutes les Bretagne

Titel: Contes populaires de toutes les Bretagne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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s’écria-t-il.
    À l’instant, quatre cuisiniers, leurs grands couteaux au
poing, se précipitèrent sur Klaodig, mais les couteaux avaient à peine touché
le sac que les lames se cassèrent en mille morceaux. Alors le sonneur gonfla
son biniou et se mit à jouer l’air de la Vieille. Tout se passa comme si un
enchantement était tombé sur le manoir. Fleur-du-Kranou dansait avec Klaodig,
les cuisiniers tournaient avec les broches, les dragons faisaient le passe-pied
avec les lions et les léopards dansaient le jabadao avec les loups. Quant au roi, il avait beau s’agiter sur son lit et
crier : « qu’on le mette à la broche ! », personne ne
l’écoutait et la danse se poursuivait furieusement.
    Cependant Klaodig fut bientôt fatigué, tant était lourd le
sac qu’il portait sur le dos. Il s’arrêta de sonner et s’écroula à genoux
auprès du lit du géant affamé. Celui-ci allongea son unique main pour le saisir
et le croquer, mais dès que la main s’approcha du dos du sonneur, elle fut
repoussée comme par magie. Le géant hurla :
    — Ah ! si j’avais mon autre main !
    Klaodig se releva et vida son sac.
    — L’autre ? dit-il, la voilà ! Et si vous
permettez, monsieur, je vais vous la recoller si bien que vous serez
complètement guéri.
    Sans attendre la permission, Klaodig se mit à l’ouvrage,
comme un chirurgien consommé. Quand il eut terminé, le géant lui dit en le
regardant de travers :
    — Es-tu bien sûr que c’est solide, au moins ?
    — Sûr et certain, répondit Klaodig, mais votre main ne
sera vraiment recollée que lorsque j’aurai épousé Fleur-du-Kranou.
    — Comment ? ver de terre ! hurla le géant, de
quelles noces parles-tu donc ?
    — De celles de Fleur-du-Kranou avec le fils de ma mère.
    À ce qu’on raconte, le géant fit une colère si terrible
qu’il en eut une attaque et qu’il en mourut sur-le-champ.
    Klaodig épousa Fleur-du-Kranou. Il y eut des noces qui
durèrent quinze jours. Le poirier d’or fut transporté au Kranou après la mort
du père de Klaodig, et il donna toujours des fruits d’or. On dit aussi qu’il
eut une fille unique qui ressemblait trait pour trait à sa mère et qu’il en fut
ainsi de siècle en siècle dans la famille, si bien que pendant mille ans et
plus, les chevaliers de tous les pays firent force prouesses afin de cueillir
les poires d’or et de conquérir la merveilleuse jeune fille. Ainsi finit la
Courtise de Fleur-du-Kranou.
    Plougastel-Daoulas (Finistère).
     
    Ce conte
est une sorte de Quête du Graal , ou de « courtise » à la mode des anciennes
épopées irlandaises, quand le héros doit franchir des étapes d’initiation avant
de pouvoir épouser la fille qui lui est destinée. On notera aussi le thème,
constant dans la tradition celtique, du père qui meurt au moment des noces de
sa fille, car celle-ci représente la souveraineté qui ne peut appartenir qu’à
un seul.
L’HOMME DE GLACE
    Daïg Parker était un rude gaillard qui n’avait peur de rien.
Il venait de servir pendant sept ans dans les armées du roi et il en avait
tellement vu qu’il disait volontiers n’avoir jamais tremblé autrement qu’à
cause du froid. Or, un jour, on lui raconta que dans la ferme du Koz-Ker, à
l’entrée du bois, il se passait des choses étranges : tous ceux qui
avaient essayé de passer la nuit dans cette ferme en étaient repartis en jurant
de ne jamais y remettre les pieds. En effet, on entendait là-dedans des bruits
à vous faire dresser les cheveux sur la tête. Toutes les nuits, c’étaient des
cris, des gémissements, des supplications, puis des menaces, et parfois même
des coups de bâtons surgis on ne savait d’où au milieu des ténèbres. Bref,
personne n’osait plus habiter le Koz-Ker et la ferme tombait à l’abandon.
    Daïg Parker ne se fit pas répéter deux fois l’histoire. Il
s’empressa d’aller, dès le lendemain matin, trouver Alan Ar Braz, le
propriétaire de Koz-Ker.
    — Bonjour à tous, gens de cette maison, dit-il. N’aurait-on
pas besoin d’un valet ici ? Je ne suis ni borgne, ni boiteux, ni manchot,
et ce n’est pas moi que la peur empêcherait de dormir au Koz-Ker.
    Bien qu’Alan Ar Braz demeurât sceptique sur le courage de
Daïg, l’accord fut cependant conclu. Daïg était engagé comme valet et on lui
donnait comme travail de remettre en état le Koz-Ker et de l’habiter.
    Le lendemain, Daïg Parker alla s’installer dans la maison
froide et

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