Crucifère
sort, juste et méchant, bon, pur et impur, celui qui sacrifie et celui qui ne sacrifie pas ; il en est du bon comme du pécheur, de celui qui jure comme de celui qui craint de jurer. »
(L’ECCLÉSIASTE, IX, 2.)
Quand Cassiopée s’éveilla, il faisait encore nuit.
Elle ausculta son oiselle, qui avait repris des forces. La prenant délicatement entre ses mains, elle l’emmena dans la grande salle du Krak après avoir traversé une cour bien sombre. Des soldats s’exerçaient à la quintaine, à la lueur d’une torche tenue par un frère sergent à la mine sévère.
— Eh là ! l’interpella Cassiopée. Vous ne relâchez donc jamais vos efforts, pour vous entraîner de jour comme de nuit ?
— Bon matin, répondit le frère sergent. Rassurez-vous : si le jour est bel et bien consacré à la prière et aux exercices, la nuit l’est au repos… et à la prière.
— Mais alors, pourquoi vous entraînez-vous ? Je ne comprends pas…
Alexis de Beaujeu surgit alors de la grande salle et marcha droit vers elle.
— Je venais justement aux nouvelles. Avez-vous bien dormi ?
— Trop ou pas assez, puisqu’il fait toujours nuit.
— Détrompez-vous, Cassiopée. C’est bel et bien le matin. Il est tierce passée. Mais, depuis quelques semaines, la nuit s’attarde au-dessus de nous, et ne nous quitte plus…
Levant les yeux, elle vit qu’un voile noir obscurcissait les cieux. Un dais opaque et sombre, et qui tremblait avec un bruit d’averse.
— N’ayez crainte. Ils n’attaqueront pas.
— Mais de quoi, de qui parlez-vous ? s’enquit-elle.
— Des corbins. Nos archers et arbalétriers les tiennent à l’écart. S’ils attaquent, ce sera un carnage. Ils ne sont pas près d’oublier les dégâts que nous leur avons causés lors des tout premiers jours. Nous en avons tellement abattu que la cour en était jonchée. Impossible de ne pas marcher dessus.
— Et vous disiez manquer de viande ?
— Leur chair est si coriace que je vous mets au défi d’en avaler la moindre bouchée. Nous avons dû les brûler, dit-il en indiquant un tas de cendres dans un coin. Ces corbins sont des âmes de damnés auxquelles un maléfice a donné l’apparence d’horribles oiseaux noirs. Le fruit de je ne sais quelle sorcellerie, que pratiquent nos voisins les Assassins.
Elle réprima un frisson, et le suivit à l’intérieur de la grande salle. Où un festin de souris fut servi à l’oiselle. Pendant que son faucon se régalait, Cassiopée remercia Alexis pour son accueil.
— Et surtout pour hier soir. Sans vous, je ne sais pas ce qui serait arrivé.
— J’ai entendu sonner du cor, alors nous sommes sortis.
— Je le dirai à Simon. Il hésitait à s’en servir.
— Ce cor appartenait à l’un des nôtres. Savez-vous comment il est entré en sa possession ?
— Il l’aura ramassé sur un champ de bataille.
— Probablement, souffla Alexis. S’il vous le demande, dites-lui que je l’autorise à le conserver. Je serai toujours ravi de voler au secours d’un ami de l’Hôpital.
Cassiopée avala un peu de l’eau et du pain disposés sur la table, dans l’espoir de calmer sa faim et les gargouillements de son estomac.
— Désolée, je suis affamée.
— Ne vous excusez pas. J’aurais tellement aimé pouvoir vous offrir mieux.
Elle lui prit les mains et lui dit :
— Allons, je ne suis pas venue ici pour manger. Simon et moi…
Elle se demandait comment lui apprendre que Morgennes était son père. Mais quelque chose dans l’expression d’Alexis de Beaujeu lui disait qu’il savait déjà. Alexis et Morgennes se connaissaient depuis si longtemps. Était-il possible qu’il ait deviné ? Avait-il lu en elle les traits hérités de son père ?
— Je crois savoir ce qui vous préoccupe, dit Alexis.
— C’est possible, sourit Cassiopée.
Lui serrant à son tour les mains, il lui dit :
— Il y a quelques semaines de cela, une femme est venue nous voir.
— Ma mère ?
— Qui d’autre ?
Cassiopée se leva. Elle s’efforçait d’imaginer sa mère, à cheval dans la montagne, arrivant au Krak des Chevaliers, s’y entretenant avec Alexis de Beaujeu devant une soupe couleur d’eau.
— Elle vous a rendu visite il y a plusieurs semaines ? Mais comment a-t-elle fait ? Elle venait à peine de partir. J’ai mis moi-même plus d’un mois pour revenir.
— Elle était chaussée d’une étrange paire de bottes, legs d’un certain père
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