Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Crucifère

Crucifère

Titel: Crucifère Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
Vom Netzwerk:
levait pour cueillir quelques pommes d’ombre, Gargano se tourna vers Cassiopée et lui dit :
    — Grâce aux bottes dont elle a hérité de Poucet, ta mère se déplace extrêmement rapidement. La rattraper n’a pas été de tout repos.
    — Comment ? Alors toi aussi tu l’as retrouvée ? À croire qu’il n’y a que nous pour ne pas y arriver…
    — Tu devrais y parvenir facilement, car elle s’est arrêtée de courir.
    — Explique-toi. Ne me dis pas que…
    Craignant le pire, Cassiopée pâlit. Mais Gargano la rassura :
    — Non, non. Ne t’inquiète pas !
    Et il partit d’un grand éclat de rire, comme si la mort de Guyane était la chose la plus improbable qui se puisse imaginer.
    — Elle n’est pas morte. Au contraire, si j’ose dire. Mais ce que tu vas découvrir ne va peut-être pas te faire plaisir…
    — C’est-à-dire ?
    — Je ne sais pas s’il m’appartient de te l’apprendre. En fait, je pense qu’il vaut mieux que ce soit ta mère elle-même qui te le dise.
    — Encore faut-il que je la retrouve.
    — Oh, tu la retrouveras. Deux femmes telles que vous ne peuvent quitter ce monde sans se croiser une dernière fois.
    — Tout de même, j’aimerais bien en savoir plus.
    — Sache qu’elle se porte comme un charme. Jamais je ne l’ai vue aussi radieuse…
    Cassiopée fit une telle mine que Gargano éclata de rire à nouveau.
    — Tu comprendras en temps voulu, lui dit-il.
    Devant tant de mystère, Cassiopée se tut. Elle comprendrait en temps voulu soit. Mais, quand ? Quoi ? Même si son intuition lui disait qu’elle savait ce dont il s’agissait…
    L’heure de partir approchait. Alors que Cassiopée aurait volontiers demandé à Gargano de venir avec eux, Simon se planta devant le géant, un sac à la main, et lui dit :
    — J’ai cueilli des fruits de cet arbre. Si, comme vous le prétendez, il a le don de ressusciter les morts, il faut que vous les portiez au cheik des Muhalliq. Vous le trouverez plus à l’ouest, dans le désert de Chamiyé…
    Gargano prit le sac, qui disparut entre ses mains immenses.
    — Oh, très bien…
    Il regarda Cassiopée.
    — Tu crois que c’est une bonne idée ?
    Cassiopée opina du chef. Oui. Si les fruits de l’Arbre Seul pouvaient aider le cheik des Muhalliq à sauver les siens, alors il fallait absolument essayer. Après avoir déposé un baiser sur la joue de son parrain, elle le gratifia d’une caresse et lui dit :
    — Je ne suis plus une petite fille…
    — Nous n’avons pas besoin d’un chaperon, ajouta Simon.
    Les deux compagnons échangèrent un regard, et Gargano comprit que, plus que les diables de l’Enfer, c’était surtout Simon qui présentait un danger pour Cassiopée.
    — Veux-tu que je vienne avec vous ? proposa-t-il.
    — Non merci, cher parrain. Cours chez les Muhalliq. Ils ont plus besoin de toi que moi.
    Alors, connaissant le caractère inflexible de sa filleule, il dit :
    — Fort bien, jeunes gens. En ce cas, il ne me reste plus qu’à me rendre chez les Muhalliq. Si vous avez besoin de moi, vous saurez où me trouver…

29.
    « Et vous dis qu’Alexandre fit faire une tour très forte, et une forteresse à l’issue de la passe, de sorte que ces gens ne pussent passer pour tomber sur lui ni sur ses gens ; et jusqu’à ce jour, elle a été appelée la porte de Fer, et c’est le lieu où le Livre d’Alexandre conte comment il enferma les Tartares entre deux montagnes. »
    (MARCO POLO,
    Le Devisement du monde.)
    Malgré l’envie – parfois – de renoncer, malgré la lassitude qui l’engourdissait, malgré la peur, la faim et la soif, Cassiopée continuait. « Ne pas réfléchir, avancer. Quoi qu’il arrive, avancer. Ne penser qu’à cela, avancer. Pour mon père et ma mère, avancer… »
    Ce n’était qu’au moment du bivouac qu’elle s’autorisait à se demander qui sa mère avait pu rencontrer. Car il était évident qu’elle avait rencontré quelqu’un. Morgennes ? Probablement pas, car Gargano l’avait mise en garde : « Ce que tu vas découvrir ne va peut-être pas te faire plaisir… »
    Un autre homme, alors ? Mais qui ? Qui rencontre-t-on sur la route des Enfers ?
    Le Diable ?
    Cassiopée réprima un frisson. Le Diable, avec ses cornes, sa queue et ses pattes de bouc. Avait-il aussi une fourche, comme dans les enluminures que sa mère peignait autrefois, en marge des manuscrits – à l’abbaye Saint-Pierre de Beauvais, où elles avaient

Weitere Kostenlose Bücher