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Dans l'ombre des Lumières

Titel: Dans l'ombre des Lumières Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Laurent Dingli
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de toutes vos forces sinon nous sommes perdus.
    Les hommes luttèrent comme des damnés et, malgré tous leurs efforts, l’embarcation n’avançait pas d’une toise. Au moins avait-elle cessé de dériver.
    Le trio parvint finalement à se rapprocher du rivage. Amélie et Antoine avaient réussi ! Après deux mois d’errance, ils étaient de retour sur la rive gauche de la Loire.
    — Fais attention à toi, dit Antoine en saluant Henri. Comment feras-tu seul, avec ce courant ?
    — Je ne crains rien, mes papiers sont en règle et j’ai l’habitude de partir à la pêche dès l’aube. J’attendrai quelques heures avant de rentrer, voilà tout.
     
    Un long périple conduisit les deux amants jusqu’en Vendée. Près de dix fois, ils furent sur le point d’être arrêtés par les Bleus. Ils voyageaient de nuit, souvent guidés par des habitants royalistes du pays. Un paysan de Morlanges les accueillit ainsi non loin des Herbiers. En raison de ses infirmités, le vieux Gilles n’avait pu combattre ni traverser la Loire. Il les accompagna jusqu’à la ferme où les parents d’Amélie se cachaient depuis des semaines. Les retrouvailles furent terribles. Amélie était bouleversée de retrouver les siens en vie.
    — Père, dit-elle, d’une voix enrouée de sanglots…
    — Vous avez donc survécu, répondit simplement le marquis, avec une froideur obscène, je n’aurais jamais pu l’imaginer.
    Amélie fut atteinte en plein cœur. Elle savait que son père ne l’aimait pas, mais elle pensait que l’éventualité de sa mort l’aurait légèrement attendri, du moins qu’il aurait fait semblant d’être touché ; mais il n’en fut rien. Il se tenait là, fidèle à lui-même, raide comme une potence.
    — Ma fille, dit plus aimablement la marquise, comme je suis heureuse de vous voir…
    Mais Amélie était encore foudroyée par l’attitude de son père.
    — Partons, intervint Antoine, pour abréger cette pénible confrontation.
    — N’allez pas à La Boissière, dit Morlanges, comme s’il se souciait subitement du sort de sa fille. Les Bleus l’ont incendiée.
    Amélie ne prit même pas la peine de répondre, et ils reprirent la route.
     
    Les Loisel espéraient loger chez la veuve d’un métayer de Morlanges qui avait disparu au Mans, ou peut-être à Savenay. Ils s’approchèrent de la ferme en compagnie du vieux Gilles lorsque, au détour d’un chemin creux, ils furent soudain arrêtés par un détachement de hussards.
    En temps ordinaire, ces hommes les auraient déjà sabrés, mais ils étaient ce jour-là de bonne humeur ; ils venaient en effet de piller un château dont ils avaient violé puis tué les occupantes. Sous le poids du butin dont ils étaient chargés, leurs chevaux avaient même du mal à se déplacer.
    — Montrez vos papiers, brigands, cracha l’un des cavaliers.
    — Nous les avons oubliés à la maison.
    — Tue donc ces bougres, Berthelot, fit un autre, sinon il va encore falloir les conduire jusqu’aux Herbiers.
    L’homme se précipita sur le paysan qui accompagnait les Loisel et lui asséna un coup de sabre au niveau de la carotide. Le vieux Gilles se tint la gorge pendant quelques secondes, puis s’effondra. Le cavalier se dirigea alors vers le couple, qui était pétrifié par la scène.
    — Je vous en supplie, dit Amélie, tout en reculant et en trébuchant.
    — Nous sommes de bons patriotes, cria Antoine, nous travaillons au ravitaillement des armées de la République en bouteilles laissées par les brigands. Les gens du district pourront vous le confirmer. Si vous nous tuez, il y aura moins de vin pour l’ordinaire…
    Il ignorait lui-même comment il avait pu inventer aussi rapidement une telle baliverne. La volonté de survivre lui avait sans doute stimulé l’imagination.
    — Eh ! Bon bougre, gouailla le hussard en hoquetant, tu nous as pris pour des ivrognes ?
    — Oh ! non, citoyen, mais un peu de plaisir quand on fait la guerre n’est jamais de refus…
    — Eh ! Que connais-tu de la guerre, scélérat ?
    Pendant qu’il disait cela, il ne pensait plus à frapper. Il se tourna vers le second cavalier.
    — Va donc chercher le représentant du district.
    Puis, s’adressant à Antoine.
    — On va voir tout de suite si tu dis vrai. Mais gare ! Je n’aime pas les menteurs. Vois-tu cette lame, coquin ? Je te la passerai au travers du corps si tu as voulu me jouer.
    Les deux amants étaient terrorisés. Mais leur effroi

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