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De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires

De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires

Titel: De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François Flohic
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révèlent son importance. Elle manifeste ses sentiments bruyamment, avec enthousiasme. Dans son allocution, le Général reprend des termes qu’il a déjà souvent employés depuis son arrivée et insiste sur « le Québec » en train de devenir « maître de lui-même sous ses yeux ».
    Le bain de foule est si enveloppant que nous avons peine à lui faire gagner sa voiture, puis le séminaire pourtant tout proche.
    Dans l’après-midi, les événements vont prendre une tout autre tournure : est-ce le fait du bifteck de bison, d’ailleurs excellent, qui est servi à table ? Dans les villes où le cortège s’arrête, la population continue certes de manifester ses sentiments dans l’enthousiasme, mais on sent que l’accueil formel de la matinée a désormais passé. Le contact sans intermédiaire est établi entre de Gaulle et la population ; au moment du départ elle entonne spontanément La Marseillaise , qui lui sert, apparemment, à témoigner de l’unité nationale.
    Plus nous approchons de Montréal, plus la foule se fait dense. Dans les faubourgs, la liesse est à son comble. Nombreux sont ceux qui cherchent à arrêter la voiture présidentielle en se plaçant devant elle. Le retard est déjà de plus d’une heure et je dois insister auprès du chauffeur, qui roule au tour de roue, pour qu’il ne s’arrête pas, de crainte de ne pouvoir repartir : il n’y a, heureusement, ni incident ni accident !
    Le cortège atteint enfin l’hôtel de ville, où le Général et Johnson sont accueillis par le maire, M. Drapeau. La Marseillaise et Ô Canada sont une fois de plus exécutés. Je remarque, maintenant sans surprise, que l’hymne canadien est fortement contesté par la foule.
    Dans l’hôtel de ville, le silence du bureau climatisé du maire succède sans transition aux clameurs de la population. Le Général note le magnifique accueil que lui fait la ville et remercie Drapeau de la part qu’il y a prise. À ma stupéfaction, ce dernier s’évertue à en réduire la portée, le qualifiant « d’accueil d’une grande ville cosmopolite fait à un grand homme ».Après ce que je viens de vivre, je n’en crois pas mes oreilles !
    Pendant que les notabilités sont dirigées vers la terrasse où les présentations seront faites, Drapeau propose au Général de se faire photographier par un portraitiste de talent qu’il a convoqué pour l’occasion.
    À ma grande surprise, le Général, qui a horreur de poser, accepte aussitôt ; dans le studio improvisé, il se prête de bonne grâce aux exigences multiples de l’artiste, sans manifester la moindre impatience. En sortant, toujours accompagné de Drapeau, il passe devant le balcon. La foule se déchaîne en l’apercevant ; il lui répond en levant plusieurs fois les bras en signe de victoire. S’adressant alors à Drapeau :
    — Quand dois-je leur parler ?
    — Tout à l’heure, de la terrasse, où les personnalités sont rassemblées.
    — Mais je dois leur dire quelque chose ! Y a-t-il un microphone ici ?
    — Non, il n’y en a pas.
    Alors, Paul Comiti, le garde du corps du Général, tend le microphone que lui a passé un technicien. Devait-on sa présence au hasard ?
    Le Général prend acte des sentiments de la foule. D’emblée, il lui confie « le secret qu’elle ne répétera pas, d’avoir vécu une journée en tous points comparable à la libération de Paris ». Il termine son allocution improvisée, posément, calmement, par « Vive Montréal ! Vive le Québec ! Vive le Québec libre ! », portant l’enthousiasme de la foule à un paroxysme jamais égalé.
    Je note, le soir même, que ce qui s’est passé sur la terrasse n’a été qu’une formalité sans importance après l’événement que nous venions de vivre. La majorité des personnalités présentes ont la mine contrite ; je demande à Couve de Murville s’il a entendu les paroles du Général à la foule :
    — Oui, il a eu tort de parler.
    J’apprendrai que l’on reproche un mot de trop au Général : ce « Vive le Québec libre ! », slogan des séparatistes.
    Nous habitons sur le Mont-Royal la résidence de M. Bordaz, haut-commissaire du pavillon français. Ce jour-là, après dîner, le Général me demande de convoquer Couve de Murville et notre ambassadeur Leduc qui logent à l’hôtel Reine-Élisabeth. Couve de Murville est reçu, seul puis en compagnie de Leduc, pour un entretien d’une bonne vingtaine de

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