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Délivrez-nous du mal

Délivrez-nous du mal

Titel: Délivrez-nous du mal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Romain Sardou
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l’art dont se servaient les chasseurs pour débusquer le goupil de sa tanière. Cette méthode ancestrale lui donnait beaucoup à réfléchir.
    Rainerio avait, selon les dires de sa sœur, acquis grâce à son vieux mentor de Bohême d’excellentes connaissances sur la vie des saints ; il n’y avait donc rien de singulier à ce que ce garçon finisse attaché au service d’un Promoteur de Justice dans la Sacrée Congrégation. Jusque-là tout se tenait.
    « Hormis la disparition inexpliquée de Rainerio qui frappe sa famille d’indigence et la mort violente de l’archevêque Henrik Rasmussen intervenue le même jour. Et le fait que ce livre d’Otto Cosmas ne soit pas connu d’un homme aussi renseigné que Salvestro Conti. »
    La Sacrée Congrégation.
    Le père Cecchilleli avait été clair sur ce sujet : c’était une forteresse imprenable.
    Bénédict Gui savait que, à moins de disposer de beaucoup de temps et d’y employer des soins infinis, il ne parviendrait pas à se frayer un passage dans cet organe secret de l’Église. Au reste, la police de Rome le connaissait bien : si Gui se montrait trop insistant, il serait démasqué et stoppé avant d’apprendre quoi que ce soit.
    « Dès lors, il va falloir trouver un moyen de “fumer le renard”…»
    Il se tourna vers sa domestique Viola.
    — Viola, vous qui êtes la dépositaire de tous les ragots…
    Viola appartenait à ces Romaines à qui pas une rumeur, pas une nouvelle ne pouvait échapper.
    — … n’auriez-vous pas entendu parler d’un miracle qui serait advenu récemment ?
    Viola haussa les épaules :
    — Un miracle ? Comment voulez-vous que l’on ait encore des chances de miracle dès lors que des bonshommes de votre espèce doutent de tout ?
    — Un menteur.
    — Et celui-là de Padoue qui disait avoir le don de me rajeunir en m’apposant les mains sur la nuque ?
    — Un charlatan.
    — Et le prêtre Gédéon qui exorcise les épouses infidèles ?
    — Un truqueur.
    À bout, la femme s’écria :
    — Et puis après ? Le Christ-Jésus l’a dit : les petites gens, crédules comme moi, seront mieux accueillis au paradis que des lettrés comme vous, qui divisez en parties ce qui supporte parfaitement l’unité, prouvez avec méthode ce qui est déjà clair et enseignez enfin ce dont tout le monde se moque !
    Bénédict applaudit la prestation du bout des doigts.
    Viola n’était pas fâchée d’avoir défendu son point de vue et cloué le bec de l’homme qui avait réponse à tout.
    — Vous feriez un remarquable maître d’université, reprit-il en souriant, vous avez déjà la manie de décomposer vos démonstrations par trois. Mais revenons à ma question. Un nouveau miracle ?
    Viola réfléchit.
    — Il y a bien le sang de saint Tomo qui doit se liquéfier à la Toussaint. Ou la statue de la Vierge qui sourit le jour de l’Assomption. Comme nouveauté nous avons la mousse poussée sur le tombeau du père Goulon qui, mélangée avec du vin, guérit depuis peu les paralytiques. Hors ça, il existe aussi le village de Spalatro où vivaient il y a quelques années ma sœur et son mari.
    — Eh bien quoi à Spalatro ?
    — Rien de notable aujourd’hui, mais cela ne saurait tarder. Il y a dix ans le corps d’un religieux y a été enseveli. Ceux qui savent prétendent que tout annonce ses prochains miracles.
    Bénédict hocha la tête :
    — Ceux qui savent disent cela ?
    — Oui. En tout cas, ma sœur et son mari.
    Bénédict resta un moment silencieux. Puis il se leva et alla ouvrir le battant de son secrétaire près du lit. Il en tira un morceau de pierre rougeâtre d’une livre et un sachet de poudre blanche. Il compta ensuite les pièces d’une bourse, ajouta les deux ducats d’or qui lui restaient de Chênedollé, puis serra le tout dans une petite sacoche. Satisfait, il retourna auprès de son feu.
    — Merci, Viola. Je me souviendrai du tombeau moussu de Goulon, du village de Spalatro et du sang de saint Tomo.
    Ce que disant, il replongea dans Euripide.
    La femme haussa les épaules et reprit son ménage.
    Lorsque la cloche d’une église proche sonna l’heure liturgique de tierce, Bénédict se leva pour sortir.
    Alors qu’il revêtait son manteau noir, Viola l’arrêta :
    — Serez-vous de retour pour le déjeuner ? Dois-je vous préparer un plat ?
    — Non. Une longue journée m’attend.
    Elle demanda si elle avait, aujourd’hui, l’autorisation d’astiquer son

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