Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
Vom Netzwerk:
l’incident, Orpheline m’a paru plus
ouverte, même si elle ne parlait toujours pas beaucoup. Et elle a disparu peu
de temps après.
    — Personne d’autre ne l’a importunée, selon vous ?
    — Pas devant moi. Mais, comme je l’ai dit, elle ne se
confiait guère. » Il fit un triste sourire. « Je ne crois pas qu’elle
se soit jamais habituée à mon étrange couleur de peau. Rien d’étonnant, sans
doute, vu qu’elle était originaire d’une bourgade.
    — Et ensuite Alice est arrivée.
    Et j’ai décidé de gagner sa confiance dès le début. Ça, je
crois y avoir réussi.
    — Vous soignez le frère Jérôme. Quel est son état d’esprit, a votre avis ? »
    Il me regarda attentivement.
    « Aussi bon que peut l’être celui d’un homme qui, pour
le meilleur et pour le pire, a consacré son existence à des idéaux exigeants et
à un rigoureux mode de vie, avant de les dénoncer sous la torture. Son esprit
est extrêmement troublé, mais il n’est pas fou, si c’est ce que vous suggérez.
    — Soit. Mais c’est pour moi pure folie d’affaiblir
encore davantage un corps déjà détérioré en portant un cilice. Dites-moi, parle-t-il
parfois de son séjour à la Tour ?
    — Non. Jamais. Bien qu’il ait été horriblement torturé. Ça,
je peux l’attester.
    — Il m’en a parlé. Et d’autres choses encore… Mais je
pense qu’il ne s’agit que de fabulations destinées à me contrarier. » Le
frère Guy ne réagit pas. Je me levai et un élancement me transperça le dos. Je
fis la grimace, agrippant le bord de la table.
    « Que se passe-t-il ? »
    Je pris plusieurs profondes inspirations.
    « Je me suis tordu quelque chose en me levant. Je vais
maintenant souffrir pendant des jours. » Je lui fis un amer sourire.
« Vous et moi, nous savons tous les deux ce que cela signifie d’être
regardé comme des créatures étranges, hein, mon frère ? Mais, au moins, votre
apparence est un phénomène naturel et elle n’entraîne pas de douleur. Et il
existe un pays où elle est normale. »
    **
    Mark avait mis sa chemise et son pourpoint de rechange et s’était
assis sur mon lit. Il paraissait soucieux.
    « Ça va ? lui demandai-je d’un ton bourru.
    — Oui, monsieur. Cette pauvre malheureuse…
    — Je sais. Je suis désolé que tu aies dû subir cela. Quel
terrible choc ! Je n’avais aucune idée…
    — Bien sûr. Personne n’aurait pu savoir…
    — Mark, il faut que nous oubliions nos… différends. Nous
poursuivons le même but, il me semble. Démasquer le cruel meurtrier qui sévit
ici. »
    Il me fixa d’un air étonné.
    « Évidemment, monsieur. Comment pouvez-vous en douter ?
    — Non, non. Écoute, j’ai réfléchi à quelque chose. La
seule raison pour laquelle la soutane de Gabriel a pu être jetée dans l’étang c’est
qu’elle était trempée de sang. Le meurtrier l’a portée pour tuer Singleton, puis
l’a balancée dans l’eau avec l’épée.
    — Oui. Mais… le frère Gabriel en assassin ? »
Il secoua la tête.
    « Pourquoi pas ? Pourquoi ne serait-ce pas lui ?
Je croyais que tu le méprisais parce qu’il est sodomite ?
    — En effet. » Il réfléchit quelques instants.
« Mais… Je n’arrive pas à le voir en meurtrier. Il a l’air d’un homme capable
de… fortes affections, si on peut appeler ça ainsi, mais pas de quelqu’un qui
ferait sciemment du mal. Ou qui aurait le courage de frapper.
    — Oh ! il est capable de courage quand il le veut. Et
il a en effet de très fortes affections. Violentes même. Et là où il existe des
affections violentes, il peut y avoir aussi de violentes haines.
    — Je ne peux l’imaginer. Croyez-moi, monsieur, je vous
en prie, je ne veux pas vous contrarier, mais je ne vois pas le frère Gabriel
en meurtrier.
    — Je l’ai plaint, je l’aime bien, même. Mais en ce
domaine on ne peut se fier à son instinct. Ce qui compte, c’est la froide
logique. Comment savoir si quelqu’un est capable de meurtre ou non quand on ne
le fréquente que depuis quelque jours ? Surtout en ce lieu où la crainte
du danger aiguise ou altère tous nos sens ?
    — Ça me semble quand même impossible, monsieur. Il a l’air
d’un caractère si… doux.
    — Autant accuser le frère Edwig uniquement parce que c’est
un être méprisable, qu’il est davantage une opération arithmétique ambulante qu’un
être de chair et d’os. Il est aussi très fourbe et plein de concupiscence,

Weitere Kostenlose Bücher