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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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l’église. »
    Le prieur fit un signe de tête en direction de la porte
ouverte.
    « Vous trouverez le frère Gabriel dans cette pièce, monsieur.
Il sera content d’avoir l’occasion de se lever de son bureau par ce froid. Bonne
journée ! » Il esquissa un salut et continua son chemin, ses pas
résonnant fortement dans l’église.
    Dans un petit bureau bourré de livres le sacristain était
assis devant une table jonchée de partitions musicales. La statue d’une Vierge
au nez brisé s’appuyait contre un mur comme si elle était ivre, ajoutant à l’ambiance
déprimante de la pièce glaciale et sans fenêtre. Le frère Gabriel portait un
épais manteau par-dessus sa soutane noire. L’inquiétude se lisait sur son
visage ridé. Par certains aspects, c’était un visage énergique, allongé et
osseux, mais la bouche était tirée vers le bas aux commissures et il avait de
grosses poches sous les yeux. Il se leva en me voyant, forçant ses lèvres à
ébaucher un sourire.
    « Monsieur le commissaire, messire Shardlake. En quoi
puis-je vous être utile ?
    — Je pensais que vous pourriez peut-être me faire
visiter l’église, frère sacristain, et notamment le lieu du sacrifice.
    — Comme il vous plaira… » Le ton était réticent, mais
il me conduisit dans le corps de l’église.
    « Vous êtes responsable de la musique ainsi que de l’entretien
de l’église ?
    — Oui. Et aussi de notre bibliothèque, que je peux
également vous montrer si vous le souhaitez.
    — Avec plaisir. Je crois comprendre que le novice
Whelplay était votre assistant pour la musique.
    — Avant qu’on l’envoie se geler aux écuries ! »
s’écria le frère Gabriel d’un ton amer. Se ressaisissant, il continua d’une
voix plus sereine : « Il est très doué, même s’il se laisse trop
emporter par l’enthousiasme. » Il fixa sur moi un regard inquiet. « Pardonnez-moi,
mais vous logez à l’infirmerie… Savez-vous comment il va ?
    — Le frère Guy pense qu’il devrait guérir.
    — Dieu merci. Pauvre petit imbécile ! » Il fit
le signe de la croix.
    Au fur et à mesure qu’il me faisait visiter l’église, son
humeur s’égayait, tandis qu’il racontait avec vivacité l’histoire de telle ou
telle statue, devisant de l’architecture du bâtiment et de l’art des vitraux. Il
semblait se réfugier dans les mots pour alléger son angoisse, sans se rendre
compte apparemment que, en tant que réformateur, je risquais de ne pas
approuver ce qu’il me montrait. L’impression que j’avais eue de lui, celle d’un
homme naïf et crédule, fut confirmée. Mais ce genre de personne peut être
fanatique, et je notai une fois de plus qu’il était grand et solidement
charpenté. Il avait de longs doigts délicats, mais aussi des poignets épais et
forts aisément capables de faire tournoyer une épée.
    « Avez-vous toujours été moine ? lui demandai-je.
    — J’ai prononcé mes vœux à dix-neuf ans. Je n’ai jamais
connu d’autre existence. Et je ne souhaiterais d’ailleurs pas mener une autre
vie. »
    Il s’arrêta devant une grande niche contenant un piédestal de
pierre vide sur lequel on avait placé un tissu noir. Un amas de cannes, béquilles
et autres soutiens utilisés par les infirmes s’appuyaient dessus. J’aperçus un
lourd carcan qu’on mettait autour du cou des petits bossus pour tenter de leur
redresser le dos. J’en avais porté un moi-même sans le moindre résultat.
    « C’est là qu’on gardait la main du bon larron, soupira
le frère Gabriel. Quelle terrible perte ! Elle a guéri bien des malheureux. »
Comme tout le monde, il ne put s’empêcher de jeter un coup d’œil sur ma bosse, avant
de regarder vers le tas de béquilles et de le désigner de la main.
    « Tous ces ex-voto ont été déposés là par des gens
guéris grâce à l’intervention du bon larron au cours des ans. N’en ayant plus
besoin, ils ont laissé ces objets pour exprimer leur reconnaissance.
    — Il y avait combien de temps que la relique se trouvait
là ?
    — Elle a été apportée de France par les moines qui ont
fondé le monastère de Saint-Donatien en 1087. Elle se trouvait en France depuis
des centaines d’années, après avoir été auparavant conservée à Rome pendant
plusieurs siècles.
    — Le reliquaire avait beaucoup de valeur, paraît-il. De
l’or incrusté d’émeraudes.
    — Les gens étaient contents de payer rien que pour le
toucher, vous

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