Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
Vom Netzwerk:
contraire du premier qui chercha la gloire dans la lumière du jour, se fit voleur impie, attiré par la couleur de l’or brillant dans les ténèbres dusaint lieu. Ils paieront tous deux. L’un pour son arrogance, l’autre pour sa maladresse.
    Oui, quand le prêtre sortit, Jean ne chercha pas à se cacher. Il assumait son choix, il voulait relever son défi jusqu’au bout. L’après-midi même, après que Lamortdieu eut été confié à la garde de la prévôté, le prêtre se rendit chez les Hackard de La Hache. Germain avait déjà reçu sa visite. Une première fois, puis une deuxième. C’était donc la troisième. Précédemment, il était venu mettre en garde, puis porter des accusations, maintenant il vient demander des comptes. Il exige l’application formelle de la loi.
    — Je veux bien me montrer magnanime, dit-il, et oublier qu’un fils de bourreau, futur bourreau lui-même, se soit donné en spectacle comme un vulgaire saltimbanque… Ces saltimbanques qu’il pourrait bientôt chasser de l’enceinte communale. Mais je tiens à ce qu’il prenne une leçon. Le voleur, c’est la coutume, aura la main tranchée. J’y tiens.
    Votre fils, si agile, si svelte, est en bonne condition physique. Il nous en donna la preuve. Il pourrait, en cette occasion – celle de faire ses premières armes – prendre votre place et corriger lui-même le coupable. Qu’en pensez-vous ?
     
    La réponse du père est simple et tranchée.
    — Ce voleur a son âge. C’est peut-être son rival, peut-être son ami. C’est en tout cas son frère devant Dieu. Croyez-moi, mon fils sera bien puni pour sa faute en assistant au châtiment.
    Je prendrai la hache, une fois encore.
     
    Cette journée décidera de tout. Après avoir assisté à ce châtiment exemplaire , Jean revient chez lui, décidé à franchir le saut. Il partira. De toutes les façons, il n’a jamais voulu de cet habit rouge qu’on lui fera porter… Le bourreau et le prince ont cela en commun, aux deux bords opposés de la société, qu’ils héritent tous deux de leurs lourdes charges en venant au monde.
    À l’un le sceptre et la couronne, à l’autre la cagoule et l’acier tranchant.
     
    La liberté, personne ne vous l’offre. Elle se prend de force. Quelques jours plus tard, Jean décide de s’enfuir, en pleine nuit.
    Son père le surprend alors qu’il est sur le point de disparaître à jamais. Contre toute attente, Germain comprend. S’enfuir, changer de peau, Germain le premier l’a désiré de toutes ses forces. Mais ses forces sont tombées avec la tête de la femme qu’il aimait, par le couperet qu’il tenait à la main. Cela, Jean l’ignore encore. Plus pour longtemps.
    — J’ai essayé, dit Germain à son fils, de te protéger, de te garder parmi nous, parce que la famille est le seul rempart qui puisse nous préserver de la cruauté des hommes, de leur implacable jugement. Mais c’est toi qui as raison. Va, cours et deviens ! Fais-le pour toi, fais-le pour moi.
    La nuit est là, tous les autres dorment. Ces deux-là, le père et le fils, ne se reverront plus. Pour Germain, c’est le moment de révéler la vérité. Il dit tout. Jean, médusé, comprend d’où il vient : de la révolte, qui il est : un hors-la-loi. Germain poursuit son discours sur ces mots :
    — Ne te retourne jamais. Ton frère, trop heureux d’avoir ta place, ne sera pas à plaindre, quant à celle qui t’éduqua ici-bas, je lui parlerai ; ceux des alentours auront des mensonges pour expliquer ta disparition, je m’en charge. Que la sainte Providence veille sur toi.”
     
    Don Juan de Tolède sourit. Une larme coule sur sa joue. Il ne l’essuie pas. Il se sert à boire. Il vide son verre et sans me regarder il poursuit, en relevant le pendentif qu’il fixe à nouveau de son regard, reprenant cette pose dans laquelle je le trouvai en arrivant :
     
    “Ce disant, Germain accroche au cou de Jean une médaille de la Vierge ayant appartenu à Marie la Rouge. Elle revint au bourreau lors de l’exécution, cadeau d’adieu.
    Germain termine :
    — C’est ton porte-bonheur, qu’il garde ton âme, ne t’en sépare jamais…”
     
    Ému, dit d’Artagnan au roi, j’interroge mon compagnon :
     
    — Ainsi, c’était vous, cet enfant ? N’est-ce pas ?
    — Oui, en effet, monsieur le chevalier, répond le don Juan, c’était bien moi. Je me nomme Jean Hackard de La Hache…Comprenez que celui qui porte un tel nom ne songe qu’à une chose :

Weitere Kostenlose Bücher