Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi
d’un plan machiavélique, d’une vengeance à l’issue sanglante.
Cette femme ne peut certes pas confesser le vilain rôle qu’elle joua dans cette affaire. Aussi, quand Edmond lui demande : Pourquoi n’avez-vous pas parlé plus tôt ? au lieu d’avouer : La honte m’en empêchait , elle préféra trouver des biais, dire :
— Pendant longtemps, il me fut impossible d’évoquer cette histoire. D’ailleurs, je ne revis jamais cet homme, il avait disparu de Paris. Il fallait attendre son retour et que celui qui serait le mieux à même de le défier fût en âge de combattre.
— Il est vrai que je n’avais que huit ans quand Tancrède mourut, répond Edmond. Ainsi vous dites que cet assassin est revenu sur les lieux du crime, vous l’avez reconnu ?
— Oui. Quinze années l’ont changé, mais j’en suis certaine, cet homme est bien le meurtrier de votre frère. J’étais présente, aux loges, à l’hôtel de Bourgogne, quand votre page Hercule monta sur scène. Souvenez-vous, le public réclamait Le Cid , la troupe de monsieur Bellerose, après avoir perdu le sien, ne savait que faire… Jusqu’à ce qu’un individu sorte l’épée, chasse de l’estrade ces gueux montant à l’assaut du théâtre pour le mettre à sac. Cet individu présenta votre page, il l’offrit au public, et le public le reçut à bras ouverts.
“Voici, me dit don Juan de Tolède, comment cette femme est parvenue à m’identifier.
Et je suis là, à quelques pas de lui, quand je vois le visage d’Edmond se décomposer. Il jure de venir frapper à ma porte, dès le lendemain, et d’accomplir son devoir.
Il ferme le poing, il baisse les yeux, s’écarte de cette femme, après l’avoir remerciée d’être venue le trouver.
Edmond n’a pas tourné la tête, il a marché droit devant lui. Il n’a pas pu voir qu’une autre personne l’observait à l’écart. Un prêtre.
Monsieur l’abbé Grégoire de Ravigneaux.”
Le mauvais prêtre, au bon endroit
« Détendez-vous, Votre Majesté, dit d’Artagnan en voyant le roi se ronger les ongles. Il faut faire preuve de courage. Laissez-moi aller tout au bout.
Comme vous, Sire, je suis stupéfait d’entendre tout cela.
Et comme vous, je veux en apprendre davantage, aussi je laisse parler l’aventurier don Juan de Tolède, l’espion Amadéor, qui est loin d’avoir terminé son rapport.
“… Le spectacle va commencer.
Les invités vont prendre place.
Ce bon bourgeois qu’est monsieur Tancelin, alias Fortunio, vient me trouver, je le renvoie. Va de ton côté , lui dis-je, courtise, je dois me placer au plus près de nos intrigants, afin de prêter l’oreille – la sourde bien entendu – à leurs conversations. Si tu m’accompagnais, ils parleraient moins librement.
Je dois faire vite. La belle Edwige de Bellerasse attire les riches partis. Il y a sa fortune, il y a ses beaux yeux. On la couve du regard et l’on s’apprête à prendre place à ses côtés. Heureusement pour moi, la vilaine figure de notre abbé Grégoire de Ravigneaux repousse les postulants. Il vient de rejoindre sa complice. C’est à croire que l’odeur de la charogne a recouvert le parfum de la tentation. Homme d’église moi-même, je semble rechercher la compagnie de mes semblables. Je m’installe dans un siège laissé libre, à droite de l’abbé.
On réclame le silence.
Hercule fait son entrée. Il entame son récital. Je n’ai pas besoin de vous dire, chevalier, qu’il se montre brillant. Il étincelle. L’amour étant dans son cœur, son âme est dans sa voix. Mais je suis vieux, je ne vois pas grand-chose, je n’entends rien au théâtre, aussi je ferme les yeux, je vais m’offrir un petit somme.
— Je suis inquiète, mon ami, dit Edwige.
— Je vous écoute.
— Pouvons-nous parler sans crainte ?
— Je le crois. Ce vieillard à ma gauche, sourd comme un pot, ronfle comme un sonneur. L’on verra peut-être que la prestation de ce jeune homme ne retient guère notre attention, mais nul n’entendra nos murmures.
— Fort bien. Il y a quelques instants, j’ai vu Adélaïde de Gaillusac s’écarter du groupe des invités au bras de monsieur Edmond de Villefranche. Cela ne me plaît guère. Ce gentilhomme pourrait savoir des choses, il a proféré des menaces, il fut reçu par le cardinal. Il cherche sans doute à se servir de sonadorable tante pour nuire à nos projets. Il serait plus sage de le supprimer. Hélas, nous ignorons ce qu’il
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