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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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derrière les décors, pour tendre à nouveau mon oreille plus jeune qu’il n’y paraît, Edwige est à pied d’œuvre. Elle fascine l’oiseau rare. Vous avez un talent exceptionnel. À Paris , dit-elle , la célébrité est affaire d’opportunité. Il suffitd’avoir une étoile, de provoquer le destin. Laissez-moi vous présenter et les portes s’ouvriront.
    Hercule est séduit. Lui aussi veut tout avoir.
    Il n’aura fallu que peu de temps à Edwige de Bellerasse pour obtenir satisfaction : Hercule accepte de la retrouver au-dehors, à trois rues de là, en toute discrétion, pour prendre pied dans les cercles fermées. Ceci est l’appât… promesses illusoires. Une fois dans le carrosse de son admiratrice, puis dans ses appartements, puis dans ses bras, Rodrigue ne songera plus à briller en société, à accuser cette femme dévêtue de s’être jouée de lui, de lui avoir ouvert les cieux pour le prendre en otage. Il n’aura pas la force de tourner les talons, il se laissera étourdir, sinon par le succès, du moins par l’emprise de cette femme à qui il serait vain de résister.
    Edwige s’éclipse. Je dois faire vite.
    Je m’approche d’Hercule à l’instant où il s’apprête une fois encore à désobéir à son maître, à filer sans permission aucune, vers de nouveaux mirages.
    — Vous courez un grand danger, mon fils, lui dis-je, non sans arrière-pensée.
    Hercule s’étonne, que lui veut cet homme, ce prêtre, de quel droit ? Soit, il faut se faire reconnaître. Je déboutonne le col de mon habit et je présente le médaillon : ce médaillon qu’Hercule m’a échangé la veille contre une bourse pleine.
    — Vous ? Mais comment ? Ce déguisement…
    Hercule ouvre grand les yeux. Il hésite à sourire, il se demande si tout cela est une plaisanterie. Mais l’heure est grave.
    — Eh oui, moi aussi, dis-je, je joue des rôles, quelquefois, la nuit tombée. Pas de questions pour l’heure, jeune homme, mais de la confiance. Réfugiez-vous chez Desdémone, Desdémone qui vous attend et vous aime. Dites-lui la vérité : vous demandez asile et protection. Si vous aviez des yeux pour voir les dangers environnants, vous comprendriez. Ne sortez pas de ces murs, du moins pas sans escorte. Desdémone vous en fournira une, comptez sur elle. Allez chercher votre pièce quand elle sera faite. Après cela enfermez-vous, travaillez, préparez-vous. Paris voudra voir ce chef-d’œuvre que vous lui servirez. Ne songez qu’à cela.
    Ces mots, effectivement, ramènent Hercule les pieds sur terre. Il sort de son nuage. Il commence à comprendre, et aussitôt, il s’inquiète pour son maître. Je ne peux tout lui dire (et pour cause),mais je dois le prévenir et le rassurer en même temps du mieux que je peux.
    — En effet, lui dis-je, Edmond est également menacé, mais je me charge de sa protection. Je vous le promets.
    — Seriez-vous notre ange gardien à tous deux, monsieur ? me demande Hercule, fort innocemment.
    Que lui répondre ?
    — Hélas, à danser trop près de la flamme, je me suis brûlé les ailes.
    — Vous volez, pourtant, sans cesse à mon secours !
    — C’est que sans attache, ni loi ni cœur, je vais, telle une feuille morte, au gré du vent.
    Je ne trouve rien d’autre à dire avant de tourner le dos à notre protégé et de filer vers Fortunio changé le temps d’un soir en maître et seigneur.
    Nous remontons à bord de notre voiture. Dès que nous avons quitté les portes de la demeure, je me défais en toute hâte de mon déguisement, j’arrache le masque. Dans la cabine, tout est prévu pour que je puisse accomplir une véritable métamorphose et retrouver une allure présentable. Fortunio veut des explications, mais je n’ai pas le temps de lui en donner.
    — Rentre, lui dis-je simplement, minuit sonnée, un bon bourgeois ne songe qu’à dormir sur ses deux oreilles.
    Cela dit, je sors discrètement de la voiture. Je porte un fol visage, j’ai un pistolet coincé dans le ceinturon. Je fais quelques pas et j’entreprends le premier cavalier qui croise ma route. Le canon de ma bouche à feu lui interdit d’aller plus loin. Ton cheval ! lui dis-je, en armant le chien. L’homme vide les étriers et me tend les rênes, je monte en selle et j’éperonne mon coursier en espérant que cette belle intrigante, Edwige de Bellerasse, ne se soit pas lassée d’attendre celui qui ne viendra plus.
    Que Dieu vous garde !
    Par chance, la voiture est encore là. Je

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