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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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m’approche, au petit pas, sans avoir quitté le masque. Madame Edwige de Bellerasse n’est pas seule. Monsieur l’abbé, Grégoire de Ravigneaux, est également à bord. L’épouvantail continue d’accompagner la blanche colombe.
    J’imagine qu’il va bientôt se retirer… Je ne le vois pas tenir la chandelle.
    Je m’arrête devant la portière.
    L’abbé tourne la tête. Il voit d’abord ce masque, puis, baissant les yeux d’un degré, la bouche de ce pistolet braqué, enfin, à l’étage inférieur, cette rapière de Tolède qui a repris sa place, à senestre. Il s’alarme, s’apprête à crier, mais je le somme de se taire.
    — Pas un bruit, monsieur. Je viens solliciter votre charité chrétienne.
    Edwige de Bellerasse montre sa tête.
    — Diable, dit-elle, un brigand ! Que d’audace, monsieur ! La rue n’est pas si noire, le guet y fait sa marche, il ne devrait plus tarder.
    — En effet, faisons vite.
    Je tends la main.
    Edwige se défait de ses bijoux. Je devrais m’en contenter…
    — Peste, dis-je, auriez-vous fait vœu de pauvreté ?
    — Nos biens et notre temps, me dit l’abbé, vont aux pauvres.
    Je reconnais l’angle d’une cassette, le don de Son Éminence au parti dévot, une cassette mal dissimulée sous le manteau noir de notre bon valet.
    — Voilà qui tombe à pic. Je suis entouré de nécessiteux : des familles aux abois, trop fières pour tendre la main.
    Pour mieux me faire comprendre, je désigne ce butin secret. Il faut céder. De bon cœur. Il pleut dans mon escarcelle. Évidemment, on s’imagine maintenant que je vais quitter les lieux. Mais j’ai une dernière demande.
    — Le plus beau trésor que transporte cette voiture ne peut être livré à la multitude. Je me le réserve. Parlons chrétien, dis-je. Monsieur l’abbé, je convoite votre place. Non pas votre charge, je vous rassure, à chacun son bât, mais votre siège, dans cette voiture. Vaquez.
    Le prêtre hésite, mais je sors mon arme.
    Je vise sa tête.
    — Si vous souhaitez rester, c’est le moment de soulager votre conscience.
    Le visage de l’abbé Grégoire de Ravigneaux se couvre de sueur. S’il veut garder la vie, il doit abandonner sa complice, son meilleuratout, Edwige de Bellerasse. Celle-ci lui fait grâce . Prudente, elle ne tient pas à voir la lâcheté l’emporter sur l’intérêt.
    — C’est bien, vous pouvez nous laisser, monsieur l’abbé. N’ayez crainte.
    Notre homme ne se fait pas prier. Il quitte la voiture, n’ose prononcer le moindre mot et s’efface alors que je le salue sur ces mots : Que Dieu vous garde, l’abbé !
    Une autre fois peut-être…
    Une fois à bord, je commande le départ.
    — Fouette cocher ! Droit devant ! Va où tu veux, mais ne t’arrête pas.
    — Monsieur, me dit Edwige jouant l’effarouchée, j’attendais quelqu’un.
    — Eh bien, je vous invite à vivre une vie d’aventures : avec des rencontres imprévues et des changements de dernière minute.
    — Qu’allez-vous me faire ?
    — Tout ce qu’il vous plaira. Cela dépend donc de votre imagination.
    — Mais qui êtes-vous au juste ? Un brigand, un voleur, un criminel, ou un fougueux séducteur ?
    — Je suis un homme de goût. J’aime les femmes de votre espèce : brûlante sous la cendre des apparences, pécheresse sous le masque de la vertu.
    Edwige fait mine de protéger ses lèvres, de cacher son sein. Mais je ne suis pas dupe de ces manières aux intentions déguisées. Cependant avec ce genre de femme, il faut très vite montrer qui est le maître ; ne pas hésiter à sortir les griffes avant d’être caressant. Je pointe une dague sur la poitrine de ma prisonnière. L’acier n’est pas insensible. Il entre en sympathie avec la chair qu’il menace de déchirer, et me fait parvenir les émotions du sang. Le cœur d’Edwige bat à tout rompre. Ôtons ce déguisement , lui dis-je, je veux vous voir nue. Ne gardez que cette croix à votre cou. Exécution ! dis-je en appuyant ma lame jusqu’à lui faire pousser un petit cri.
    Edwige se débarrasse de ses jupes, je découvre les dessous de l’intrigante… des dentelles mettant en relief des formes à damner les saints du calendrier. C’est bien ce qu’il me semblait : la chair est faible quand elle est tendre .
    Edwige se cache encore, elle n’ose ouvrir grand les bras. Elle fait semblant d’avoir honte. Elle va bientôt me demander de venir la réchauffer. C’est un homme comme vous qu’il m’aurait fallu,

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