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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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portes de ce labyrinthe infernal. Ce cadeau inespéré, c’est une illusion devenue réalité.
    D’ailleurs, tout cela ne serait-il pas trop beau pour être vrai ? Où se cache le lard ? L’anguille sous roche ? s’interrogent les heureux buveurs.
    — L’affaire est tout ce qu’il y a de plus honnête, gentes dames et beaux seigneurs ! Habituez-vous à ces titres ronflants , dit Molière, car ils seront désormais les vôtres.
    — En serez vous ? demande-t-on au jeune comédien.
    — Non, à mon grand regret. C’est toute une histoire. Je dois me désister, contre mon gré, ma troupe , l’Illustre-Théâtre, se retire et vous cède la place. Craignez-vous la critique ? Je vous préviens, elle pourrait être impitoyable. À Paris, elle hisse au pinacle ou elle vous traîne plus bas que terre. Vous serez dans la ligne de mire d’une plume des plus féroces et de plus influentes qui soient. Vous savez tout.
    — Eh bien, nous disons oui, et de bon cœur encore. Nous prenons l’emploi et les risques qui s’ensuivent. Tout pour être entendus ! Que la critique nous vise et nous pourfende ! Merci mon Dieu, on parlera enfin de nous !
    L’accord est unanime ! Fini les singeries et les vols à la sauvette !
    En route pour la Gloire ! Et tant pis si la Gloire ne dure qu’un soir, le temps d’une représentation.

De la taverne au campement
    — Cependant, dit l’un des bohémiens, nous ne pouvons partir de notre campement sans faire nos adieux. Nous devons remercier nos frères et sœurs nomades pour leur gente hospitalité et leur indéfectible amitié. Ne nous ont-ils pas recueillis quand nous étions chassés de toutes parts ? Et comme si cela ne suffisait pas, n’ont-ils pas élargi nos compétences en nous enseignant patiemment l’art du mime, les jeux du cirque…
    — Sans oublier, dit la jolie brune, le moyen de plumer l’oie sans la faire crier.
    — D’ailleurs ce soir, c’est liesse ! s’exclame un troisième. Tout le campement va se mettre en joie. Nous allons sortir les tambours et les guitares, mettre le feu aux torches et les agneaux à la broche ! Monsieur Molière, si vous souhaitez que nous marchions à vos côtés, il faudra d’abord nous suivre. Vous avez été grand seigneur, payant le vin et l’omelette au lard ! Nous savons prendre, mais nous savons rendre et nous savons recevoir.
    — Qu’à cela ne tienne, mes amis, allons-y ! dit Molière en versant sur la table plus qu’il ne faut pour payer ces cruches et ces œufs.
    Après tout, cet argent vient de la poche de l’aventurier don Juan de Tolède. L’esprit est partout, il rentre dans la pierre et peut animer la matière. Voici pourquoi Molière en saisissant cette poignée de bons écus, peut entendre une voix intérieure lui dicter la conduite à garder en toutes occasions :
    Ne jamais compter !
    Que la fête commence !
    Les heures ont passé. Le jour tombe. La nuit s’avance. Depuis qu’il est sorti de la maison de monsieur François de Lyon, Molière n’a pas vu le temps passer. Et pourtant, les heures se sont succédé, discrètement, fatalement.
    Oui, quand l’étonnante troupe sort de l’auberge, la panse repue, la langue chargée, mais l’âme heureuse, le soleil est aucouchant. C’est sur un chemin de braises et de lumière en feu que nos compagnons marchent en chantant, en riant, en saluant les passants.
    On franchit les rues, on descend vers les barrières, et l’on entend déjà des martèlements entraînants battre à l’unisson, monter des entrailles de la terre vers les premières étoiles. On aperçoit bientôt des cercles de feu, une ronde de danseurs, des chariots en bataille : le camp des bohémiens se révèle en contrebas.
    Aujourd’hui, Molière doit aller de mésaventure en surprise, et de surprise en rebond. Alors qu’il descend la rue, entraîné par ses nouveaux compagnons, il s’arrête soudain.
    Un homme croise son chemin, arrivant à vive allure, par une rue perpendiculaire.
    — Fortunio !
    — Molière !
    Les deux hommes se serrent la main.
    — Quelle coïncidence !
    — Heureux hasard !
    — Et où allez-vous d’un si bon pas en si charmante compagnie ? demande Molière en désignant Valériane qui salue les compagnons du jeune comédien.
    — Au campement des bohémiens, de l’autre côté des murs.
    — Eh bien, allons-y ensemble, car c’est aussi ma destination !
    — Incroyable !
    — Merveilleux !
    Le reste du chemin se poursuit comme il a débuté : dans la gaieté et

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