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Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi

Titel: Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Abtey
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défendant ses frontières, je crois que vous aimez mieux notre pays que cette vieille noblesse, qui, à seules fins de solder ses dettes et d’assouvir une avidité sans bornes, tout en se targuant de descendre des fils de Charlemagne, ne rougit jamais d’aller marchander nos provinces à nos voisins de tous bords !
    — Voilà qui est rudement parlé, sans détour ! approuve Son Éminence. Aidez-moi à démasquer ces intrigants, monsieur de Villefranche, et je vous ferai justice. Cependant, pour plus de prudence à l’avenir, je vous invite à corriger votre plaidoyer. Tâchons d’apprivoiser votre oncle. Hélas, vous en avez peut-être trop dit hier au soir. Je tâcherai donc de lui faire croire que je n’accorde aucun crédit à vos accusations, et qu’en me situant au-dessus de votre querelle et des stratagèmes visant à vous discréditer l’un l’autre, je cherche la conciliation. Il ne faut pas que ses employeurs l’abandonnent. Cet ambassadeur pourrait au contraire nous être bien utile, et nous aider à rompre la tête. Comprenez-vous ?
    — La colère est mauvaise conseillère, et je me repens en effet d’avoir parlé trop haut et trop vite, hier au soir.
    — C’est bien. Laissez-moi agir. Tenez, dit le cardinal en sortant une bourse de son tiroir. Voici de quoi prolonger votre séjour.
    — Votre Éminence est trop bonne, dit Edmond de Villefranche.
    — Non pas. Dites-vous que c’est une avance sur le retour de votre héritage… Aussi me ferai-je rembourser de mon côté par cette somme que votre oncle a promise. Il faut que cet homme commence à nous rendre ce qu’il vous a volé. Sans doute aurez-vous moins de scrupules à accepter cette contribution de ma main que de la sienne ?
    — En effet, répond le gentilhomme, d’une voix claire.
    — Monsieur de Villefranche, je dois savoir où vous trouver, vous et votre page.
    — Nous résidons à l’auberge du Soleil d’or , rue de l’Homme-Armé.
    — Voilà qui est noté. Je vous ferai mettre en relation avec un agent dévoué, qui mène de son côté une enquête parallèle à la vôtre. Vos conclusions se rejoignent. En vous donnant le nom de cet homme, en vous le présentant, je vous offre toute ma confiance. Ne lui faites pas défaut. Un agent doit demeurer secret. Vous serez l’un des seuls à savoir qu’il travaille pour moi. Il s’agit du chevalier d’Artagnan.

Le billet
    — D’Artagnan, dites-vous ?
    — Oui. D’Artagnan.
    — Quelle coïncidence ! J’ai rencontré cet homme hier, au théâtre de l’hôtel de Bourgogne. Par la suite, ce valeureux bretteur qui marchait dans la même direction que moi (nous séjournons à la même enseigne) est venu se ranger à mes côtés. Sans lui, sans son aide, je n’aurais pu sortir vivant de cette impasse.
    — Point de coïncidence. Qui se ressemble s’assemble. Cela d’un côté ou de l’autre. Pour le bien ou le mal. Allez, messieurs, profitez de Paris, amusez-vous. Quittez ce grave visage et cet air courroucé. L’heure est à la détente et aux fines tromperies… Il faut vous mêler au monde, en jouant sa comédie. D’ailleurs, votre oncle donne après-demain une fête en son hôtel. Je lui ai demandé de vous inviter.
    — Moi ? s’exclame avec indignation le gentilhomme Edmond de Villefranche.
    — Vous et votre page, vous irez tous deux, répond le cardinal avec fermeté.
    — Boire son vin ! Parler à ses hôtes ! Manger à sa table !
    — Absolument. Ne vous rebellez pas. Vous y montrerez bonne figure, vous y serez de la plus aimable compagnie. Il faut être loup parmi les loups, et comme eux se frayer un passage dans la basse-cour en faisant patte de velours. D’ailleurs, il me vient une idée. Nous allons vous exposer sous les feux en lui forçant la main. Votre oncle souhaite en effet mettre le théâtre et la poésie à l’honneur. Voilà l’occasion à saisir. Votre page va pouvoir donner une nouvelle représentation, je lui laisse carte blanche. Monsieur de Gaillusac, votre oncle, ne pourra refuser la chose, je me charge de le convaincre.
    C’est sur ces mots et ce nouvel accord que s’achève l’entretien. Encouragé, soutenu, défendu… et sinon redoré du moins soulagé, le gentilhomme remercie son protecteur avec chaleur et dignité.
    Dès qu’Edmond de Villefranche a passé la porte de son bureau, le cardinal vient me trouver et m’invite à le rejoindre.
    — Votre avis ? me demande-t-il. Je me suis permis de révéler votre vrai visage et

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